À partir de La Havane, un pont aérien permet d'acheminer, après escale à Bissau, d'importantes quantités de matériel de guerre et des troupes cubaines, dont les effectifs seront évalués entre 15 000 et 20 000 hommes. Par voie maritime, des vivres, des médicaments, du matériel sont livrés, via Pointe-Noire au Congo, au gouvernement de A. Neto. De leur côté, les Soviétiques fournissent des techniciens et un important personnel d'encadrement, un appui logistique et diplomatique, des avions de transport et de bombardement.

Les pays communistes reconnaissent rapidement le gouvernement de Neto, imités par le Brésil et par une partie des États africains, dont le nombre ira croissant après que les Sud-Africains seront intervenus aux côtés de l'UNITA et du FNLA. À la fin décembre 1975, pratiquement aucun pays n'a reconnu la République populaire et démocratique de l'Angola.

Malgré des mises en garde d'une grande véhémence verbale adressées à l'Union soviétique, dès novembre, par Henry Kissinger, les États-Unis semblent frappés de paralysie face aux initiatives prises par Moscou et la Havane.

Gêné par son opinion publique, qui refuse de s'engager dans une nouvelle guerre du Viêt-nam, G. Ford ne dispose que d'une faible liberté de manœuvre. La campagne électorale lui impose une grande prudence ; ses concurrents dans la course à la Maison-Blanche multiplient les déclarations pacifistes. C'est ainsi qu'en mai 1976 Jimmy Carter affirme que la présence soviéto-cubaine en Angola ne saurait en aucun cas être considérée comme une menace sérieuse contre les intérêts américains en Afrique. L'ajournement par Washington (en représailles contre l'attitude soviétique en Angola) de plusieurs négociations soviéto-américaines (en matière d'échanges commerciaux notamment) apparaît comme une mesure bien timide.

Le soutien du Zaïre au FNLA et à l'UNITA, auxquels la République populaire de Chine prête également son concours, et celui de l'Afrique du Sud se révèlent insuffisants pour faire contrepoids à l'intervention des Soviétiques et des Cubains. Peu soucieux de perdre plus complètement la face, Zaïrois et Sud-Africains mettent fin à toute aide directe. Tandis que Pretoria s'engage à retirer ses forces armées avant le 27 mars, le Zaïre reconnaît le gouvernement de Luanda et ferme ses frontières aux adversaires de ce dernier. De son côté, en mai, dans un message adressé à Olof Palme, Premier ministre de Suède, Fidel Castro annonce que le corps expéditionnaire va être progressivement retiré d'Angola.

Alors que la plupart des États africains ont reconnu le régime de Luanda, que le Sénégal se refuse toujours pour sa part à reconnaître, des nouvelles parviennent en Europe, en avril, qui font état de la reprise des combats entre les forces du FNLA, de l'UNITA et du MPLA. Les Sud-Africains viennent d'établir un premier contact avec A. Neto, dont la Zambie, qui donna longtemps asile à l'UNITA, reconnaît le gouvernement, lorsqu'on apprend que, sous les ordres de Jonas Savimbi notamment, les nationalistes hostiles au MPLA ont remporté quelques succès militaires. L'autorité de la République populaire va-t-elle être remise en cause de manière fondamentale ? Le corps expéditionnaire soviéto-cubain ne va-t-il pas être maintenu en Angola jusqu'à complète reprise en main de la situation par le MPLA ?

Incertitude

Quelques semaines plus tôt, les Sud-Africains redoutaient sérieusement une invasion de la Namibie et de la Rhodésie par les Angolais, les Soviétiques et les Cubains. Une interprétation pessimiste d'un discours prononcé à Brazzaville par A. Neto, à l'occasion de sa réconciliation avec le général Mobutu Sese Seko, était à l'origine de cette inquiétude, dissipée progressivement depuis la reprise des combats entre frères ennemis en Angola même, et depuis que sont connues les difficultés internes du gouvernement de A. Neto.

Les succès militaires remportés par le MPLA, avec l'appui des forces cubaines, la grande victoire diplomatique que constitue la reconnaissance, en février, du gouvernement de Luanda par la France, la Grande-Bretagne, l'Italie et les Pays-Bas ne sauraient masquer le climat d'incertitude qui prévaut dans l'ancienne colonie portugaise.