Devant de tels dossiers, la justice se trouve désemparée. Trop souvent des peines légères, des amendes par exemple, n'entraînent pas le respect des textes. Pour faire bouger les choses, certains magistrats ont choisi la provocation spectaculaire. Mais, pour beaucoup, l'incarcération de patrons a été ressentie comme un abus de pouvoir. Celle d'un voleur de bicyclette ne fait pas couler autant d'encre. Preuve, dit le Syndicat de la magistrature, auquel appartiennent les juges Charette et Chauvaud, que la justice a deux poids deux mesures. Signe que, arbitre dans une société de plus en plus conflictuelle, la justice a du mal à trancher en ne mécontentant aucun des camps.

Elle-même se cherche des avocats manifestent dans la rue et des magistrats font grève.

Épilogues

Bruay

Éclaircira-t-on un jour le mystère de Bruay ? Découvrira-t-on le ou les meurtriers de Brigitte Dewèvre ? (Journal de l'année 1971-72 et 1974-75). Coups de théâtre, rebondissements se succèdent pour aboutir à deux non-lieux et à un acquittement. Ce dernier intervient le 26 février 1976. La Cour de Paris statue sur le cas de Jean-Pierre, relaxé quelques mois plus tôt par le tribunal pour enfants. Les parents de Brigitte n'ont jamais cru à sa culpabilité.

Lipsky

S'il avait accepté sans broncher la peine de cinq ans de prison assortie de cent mille francs d'amende comme prix de ses escroqueries. Claude Lipsky serait sans doute aujourd'hui à la veille de recouvrer sa liberté, compte tenu des remises de peine dont il pouvait espérer bénéficier. Mais il a eu la fâcheuse idée de faire appel. Résultat : les juges de la 9e Chambre ont estimé que pour avoir escroqué quelque 134 millions à de confiants souscripteurs, l'animateur du Patrimoine foncier méritait trois ans de prison de plus.

Vierzy

Quatre ans après la catastrophe du tunnel de Vierzy, qui fit 108 morts et 120 blessés (Journal de l'année 1971-72), le tribunal de Soissons se prononce sur les sanctions qui avaient été réclamées contre 9 inculpés. Cinq d'entre eux (responsables de services à la SNCF) sont condamnés à des peines de prison assorties du sursis. Les quatre autres sont relaxés. La SNCF est déclarée civilement responsable pour les dommages causés tandis que la société chargée, en 1972, des travaux de réfection du tunnel est mise hors de cause.

Goldman

Un nouveau procès pour Pierre Goldman (Journal de l'année 1974-75) s'ouvre, le 26 avril 1976, à Amiens, devant les assises de la Somme. L'arrêt de la Cour d'assises de Paris le condamnant à la réclusion à perpétuité avait été cassé en novembre 1975 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation. Après une semaine de débats dont la rigueur et la haute tenue seront soulignées par tous les observateurs, le verdict : douze ans de réclusion pour les trois vols à main armée reconnus par Goldman et l'acquittement pour l'assassinat des pharmaciennes du boulevard Richard-Lenoir dont il a toujours nié être l'auteur. De l'avis général, ce procès fera date dans les annales de la justice. La participation active des jurés à la recherche de la vérité, leur volonté manifeste d'aller au fond des témoignages, mais aussi le libéralisme du président ont sorti ces débats du carcan habituel de l'appareil judiciaire.

Liévin

Un peu plus d'un an après le drame de Liévin (Journal de l'année 1974-75) qui coûta la vie à 42 mineurs, l'instruction continue. Confiée initialement au juge Henri Pascal, elle est remise en juillet 1975 à la Chambre d'accusation de Douai. Celle-ci rend, en février 1976, un premier arrêt ordonnant l'inculpation du directeur de la fosse 3, Auguste Coquidé, « ainsi que celle de toutes les personnes qui étaient sous ses ordres et contre lesquelles des charges seraient par la suite établies ». La Chambre de Douai reprend à son compte l'inculpation prononcée par le juge Pascal le 5 juin 1975.

Markovic

L'affaire dure depuis plus de sept ans (Journal de l'année 1968-69 et 1969-70). Le 29 août 1975, le juge d'instruction de Versailles clôt l'information : il renvoie François Marcantoni devant la cour d'assises des Yvelines sous l'inculpation de complicité dans l'assassinat de Stephan Markovic, ancien garde du corps d'Alain Delon, bien que Marcantoni ait, deux mois plus tôt, bénéficié d'un non-lieu. Le juge de Versailles est déchargé du dossier, tandis qu'un témoin, Uros Milichevic, mythomane notoire, se décide tardivement à déclarer qu'il a participé lui aussi au meurtre. Il est inculpé. Le 12 janvier 1976, la Cour d'accusation de Paris rend deux arrêts de non-lieu : l'un en faveur de Marcantoni, l'autre concernant Milichevic.

Le « Flandres-Riviera »

Le drame a lieu le matin de Noël, près de Chalon-sur-Saône. Le rapide parti de la gare de Paris-Nord, mais qui comporte aussi des wagons venant d'Amsterdam, de Bruxelles et de Calais, roule à 120 km/h vers Lyon. Il est 3 h 40. À la sortie d'une courbe, à la suite d'une rupture d'aiguillage provoquée sans doute par les très basses températures enregistrées depuis quelques jours, c'est le déraillement. La septième voiture quitte la voie, entraînant les neuf suivantes dans son sillage : 4 morts et 13 blessés seront dégagés de l'enchevêtrement de la ferraille.

Vénus-des-Îles

23 juillet 1975 : 10 h du matin. La Vénus-des-Îles, qui assure le service entre Toulon et Porquerolles, prend feu. C'est la panique. La vedette est surchargée : 407 passagers au lieu des 300 prévus, et puis, tragique malchance, la plupart des brassières et bouées de sauvetage, entreposées sous le rouf, sont tout de suite la proie des flammes qui s'échappent du moteur. Affolés, certains passagers sautent à la mer sans savoir nager. Heureusement, des navires de plaisance qui croisent dans les environs et la Galissonnière avec ses hélicoptères se hâtent vers les lieux de la catastrophe. Le sauvetage s'organise. Il y aura tout de même 11 morts et 8 blessés, dont 3 mourront ultérieurement. L'un des experts de la commission chargée de l'enquête mettra en cause le fonctionnement du circuit électrique.

René Trouvé

À Toulouse, en plein centre de la ville, le correspondant de l'hebdomadaire Le meilleur est abattu d'une balle dans la tête. Cela se passe dans l'après-midi du 19 février. René Trouvé vivait de ce qu'il est convenu d'appeler la presse à sensations. Actif collaborateur pendant l'Occupation, il est condamné à mort à la Libération puis amnistié en raison de son jeune âge. René Trouvé s'était, semble-t-il, fait dans la région toulousaine de solides ennemis.

Touvier

Le 27 octobre 1 975, après les cours de Lyon et de Chambéry, la Cour d'appel de Paris déclare irrecevables les plaintes des victimes ou des familles des victimes de Paul Touvier. Trente ans après avoir été par deux fois condamné à mort par contumace, celui qui fut le chef des services de renseignements de la Milice se trouve blanchi. Cette amnistie semble en contradiction avec la loi du 26 décembre 1964, qui stipule que sont imprescriptibles les crimes contre l'humanité. Les associations de déportés et de résistants obtiendront-elles de la Cour de cassation que justice soit faite ?

Nogent-sur-Oise : huit femmes tuées en sept ans

Le 6 janvier 1976, une jeune Polonaise de 20 ans, Françoise Jakubowska, est découverte assassinée près de la gare de Villers-Saint-Paul, petite localité proche de Nogent-sur-Oise. Elle serait la huitième victime du fameux tueur de l'ombre qui a déjà frappé mortellement sept femmes de la région. Du moins, tout le laisse supposer : les circonstances, la mise en scène, l'exécution et le lieu même du crime. Cette fois encore la victime est une femme brune ; elle a été assaillie tôt le matin dans un terrain vague, près de la voie ferrée, achevée d'une balle de carabine 22 long rifle et partiellement déshabillée. Son assassin ne l'a pas violée : il a seulement volé son sac.