Deux jours plus tard, à la suite de rétractations, on découvre le corps de Jean Bitan à moitié calciné, enterré dans un bosquet près de Saint-Quentin (Aisne). L'autopsie révèle que la victime est décédée de mort violente et non d'une crise cardiaque. Inculpé d'homicide volontaire, le 14 juillet 1975, Jean-Pierre Herbet continue de nier le meurtre.

Les rapts d'enfants

En l'espace de deux mois, deux rapts d'enfants vont tenir l'opinion en haleine.

Christophe Mérieux

Les ravisseurs prennent contact avec sa famille peu de temps après l'enlèvement de Christophe, qui a eu lieu sur le chemin de l'école le 9 décembre 1975. Ils demandent 20 millions de rançon en francs, florins et marks. Quarante-huit heures plus tard, à la tombée de la nuit, Alain Mérieux, le père de Christophe, remet la rançon aux ravisseurs sur une petite route de l'Ain. Dans leur précipitation, les bandits oublient un des sept sacs de 20 kg qui contiennent les billets de banque. Ils n'encaisseront en fait que 16 millions.

Cet oubli va retarder la libération de Christophe jusqu'au lendemain 12 décembre ; vers 20 h 30, l'enfant, recueilli par un automobiliste dans la banlieue de Lyon, sonne chez ses parents : « C'est moi », dit-il dans l'Interphone.

Son témoignage et celui de son père permettront aux policiers de cerner petit à petit la personnalité des ravisseurs. Une 504 et une Alfa Romeo blanches qui ont été utilisées par les truands sont retrouvées. Mais, surtout, l'analyse des enregistrements des conversations téléphoniques entre Alain Mérieux et les ravisseurs de son fils permet d'identifier l'un des gangsters. Louis Guillaud, un truand lyonnais surnommé le roi du non-lieu, est surveillé par la police pendant deux mois. Le 25 février, il est arrêté à Paris, au moment où il allait négocier l'achat de lingots d'or avec l'argent de la rançon. Il reconnaît avoir organisé le rapt avec trois complices, mais ne les dénonce pas. La découverte du studio d'Oullins, où avait été séquestré Christophe, permet, sur empreintes, d'identifier ses amis. L'un d'eux, Jean-Pierre Marin, est abattu le 9 mars par la police au moment de son arrestation. Sans avoir pu le prouver, les policiers le considéraient comme un des assassins du juge Renaud.

Tant que Christophe Mérieux était l'otage des gangsters, la presse, à la demande des autorités, s'est tue.

Philippe Bertrand

Dans l'affaire de Troyes, les journaux ont pu parler de l'enlèvement de Philippe Bertrand moins de quarante-huit heures après sa disparition. La police espérait ainsi susciter les témoignages. Ils n'ont pas manqué, sans qu'aucun, d'ailleurs, fasse avancer l'enquête.

En fait, tout s'est joué à Troyes entre le vendredi 30 janvier à midi et le samedi 31 à 18 h. Moins d'une heure après l'enlèvement de Philippe Bertrand, âgé de 7 ans, le ravisseur, Patrick Henry, un représentant de commerce de 25 ans, téléphonait à la famille. En fin d'après-midi, il rappelle pour fixer ses exigences.

Dans l'intervalle, la police, prévenue, a mis sur écoute le téléphone des Bertrand. Le père de Philippe fait durer la conversation 17 minutes. On repère l'origine de l'appel, une cabine téléphonique située à Bréviandes, un bourg de l'agglomération troyenne. L'intention des policiers est de suivre le ravisseur jusqu'à sa cachette. Depuis les affaires Hazan et Thodorof, au début de l'année, le ministre de l'Intérieur, craignant une épidémie d'enlèvements à l'italienne (il y a eu 10 rapts en moins d'un an, dont 7 enfants et 3 industriels), a demandé à la police de s'opposer à toute remise de rançon et de mettre tout en œuvre pour arrêter les gangsters.

Mais ce soir-là, à Bréviandes, l'arrivée inopinée d'une Estafette de la gendarmerie (semble-t-il d'une façon peu discrète) effraie Patrick Henry. Il interrompt sa conversation téléphonique et s'enfuit.

Le lendemain l'affaire est rendue publique. Selon ses aveux, Patrick Henry passe l'après-midi avec le petit Philippe dans la chambre qu'il a louée dans une pension de famille, Les charmilles. Vers 18 h, il prend peur, comprend qu'il ne pourra réaliser son projet, et étrangle Philippe avec un foulard. Il semble que l'enfant ait été drogué avant sa mort.