Deux résultats inattendus ont été apportés par le dosage de l'hormone hypophysaire qui stimule la lactation, la prolactine. L'administration d'oestrogènes à des femmes ménopausées semble élever la teneur du sang en prolactine, hormone qui pourrait peut-être jouer un rôle dans le déterminisme du cancer du sein. Ceci conduit à nuancer l'attitude thérapeutique devant la ménopause.

D'autre part, certaines tumeurs de l'hypophyse qui sécrètent de la prolactine en abondance associent une galactorrhée (écoulement de lait par le mamelon) à un hypogonadisme, c'est-à-dire une déficience des glandes sexuelles. Or un nouveau médicament, dérivé de l'ergot de seigle, la bromoergocryptine, arrive à tarir la sécrétion de prolactine et, par voie de conséquence, à libérer la sécrétion des hormones qui stimulent les gonades. Cet antiprolactinique est en cours d'essai dans le traitement du cancer du sein.

CRF

Dans une situation de stress, l'hypothalamus sécrète une hormone appelée CRF (Corticotropin Releasing Factor) qui provoque la sécrétion par l'hypophyse d'une hormone, laquelle à son tour stimule la production d'hormones par le cortex de la glande surrénale. On pensait n'avoir plus rien à apprendre à ce sujet. On a découvert que tous les tissus lésés (et non pas seulement certains noyaux de l'hypothalamus) peuvent libérer du CRF. Mieux, cette libération est susceptible d'un rétro-contrôle : toute élévation du taux de corticoïdes dans le sang supprime la sécrétion de CRF par les tissus lésés. C'est là une expérience qui met à mal un dogme, mais qui ouvre des perspectives.

Somatostatine

En 1972, le professeur Guillemin, aux États-Unis, cherchant le facteur de libération de l'hormone de croissance (ou somatotrope), avait trouvé son inhibiteur, le SRIF ou somatostatine. Le SRIF inhibe les bouffées de sécrétion d'hormone somatotrope, induites notamment par l'hypoglycémie insulinique. Inhiber la somatotrope devrait avoir une action favorisante dans le traitement du diabète. C'est bien le cas pour le SRIF. Mais il est loin d'être un simple hypoglycémiant. Il bloque la sécrétion des trois hormones du pancréas. Son affinité pour les cellules de Langerhans (cellules endocrines du pancréas dont certaines produisent l'insuline) est 10 à 100 fois plus élevée que pour l'hypophyse. C'est là que tout se complique ; Dubois sur les conseils de Guillemin, s'efforçant de localiser par immunofluorescence les cellules à somatostatine, a la surprise d'en découvrir non seulement dans les îlots de Langerhans, mais tout le long du tube digestif. S'agit-il d'un même SRIF ou de deux SRIF voisins ? La régulation de l'insuline se fait-elle par voie sanguine ou par contact direct comme on peut être amené à le penser ? C'est ce que l'on ignore encore. Quoi qu'il en soit, la découverte de Dubois est le type même des découvertes qui posent plus de problèmes qu'elles n'en résolvent.

Pancréas

Greffe de pancréas ou pancréas artificiel, c'est la question qui, depuis un peu plus d'un an, domine la diabétologie (Journal de l'année 1974-75). Le pancréas artificiel est un appareil capable d'interpréter en continu la glycémie du patient et de lui injecter soit de l'insuline, soit du dextrose en quantité appropriée pour maintenir une glycémie normale. Cette nouvelle prothèse est d'une conception beaucoup plus délicate que les stimulateurs intracardiaques. Sans doute est-elle susceptible d'amélioration, voire de miniaturisation ; elle n'en résout pas pour autant le problème du diabète.

Plus sensationnelle est la nouvelle d'une transplantation réussie de cellules pancréatiques. Depuis six ans, plusieurs essais se sont soldés par un rejet pour des raisons immunologiques évidentes. Deux équipes différentes assurent avoir résolu le problème, Selzer et Boyles, aux États-Unis, pratiquent une allogreffe sur des receveurs non apparentés aux donneurs, sans utilisation d'immunosuppresseur. Les greffons ne sont pas rejetés dans la mesure où ils ont été cultivés quatorze jours avant l'implantation sur des milieux appropriés. Le recul de ces expériences va de trois à dix mois. R. Eloy et ses collaborateurs, en France, auraient obtenu la guérison du diabète expérimental de l'animal en lui injectant des îlots de Langerhans dans le foie. Quoi qu'il en soit de ces recherches, la greffe de pancréas est au centre des préoccupations actuelles.

Récepteurs

Un des problèmes toujours d'actualité est d'élucider le mécanisme par lequel une hormone agit sur la cellule-cible qui la reçoit. Grâce aux travaux de plusieurs chercheurs (Toft, Gorski, Jensen, Edelman, O'Malley), on connaît la structure de la protéine réceptrice de la progestérone. C'est un dimère. Elle est constituée de deux sous-unités A et B. le tout ressemblant à deux cigares jumelés. Chaque sous-unité a un site récepteur pour la progestérone (qui se fixe au bout du cigare). À l'origine, la molécule réceptrice se trouve dans le cytoplasme de la cellule. Après avoir fixé deux des molécules de progestérone qui ont pénétré dans la cellule, le récepteur est activé et pénètre dans le noyau, qui contient 5 000 sites accepteurs pour les complexes hormone-récepteur. La sous-unité B se lie à la chromatine en un point défini par la présence de protéines acides, et permet à la sous-unité A une interaction directe avec l'ADN adjacent. Il en résulte une synthèse d'ARN messager. Le gène est activé lorsque le complexe hormone-récepteur s'attache à la chromatine. Il ne s'agit pas, chez les eucaryotes (cellules à vrai noyau), de lever un répresseur (comme cela se passe chez les bactéries), mais bien d'activer un gène. La protéine réceptrice libérée n'est pas détruite et peut retourner dans le cytoplasme pour convoyer d'autres hormones vers le noyau.

Ingénierie génétique : pour et contre

Décidée à la conférence biologique internationale d'Asilomar, en février 1975 (Journal de l'année 1974-75), la levée de l'embargo sur les expériences d'ingénierie génétique a suscité une levée de boucliers dans les milieux dits écologiques, puis, au cours du second semestre, une vigoureuse contre-offensive des organismes de recherche.

Institut Pasteur

À la publication, en juin 1975, d'un manifeste du Groupe information-biologie demandant l'arrêt des manipulations génétiques, l'Institut Pasteur répond par un communiqué dans lequel il dénonce l'« irresponsabilité » des rédacteurs de ce texte et les accuse de créer un climat d'inquiétude par « des erreurs scientifiques évidentes et des contre-vérités délibérées ».