Pour forer dans les fosses océaniques, le Glomar Challenger sera équipé, en août 1977, d'un train de tiges long de 7 600 m (au lieu des 6 700 m du train de tiges actuel).

Paléo-environnement

Le troisième thème sera consacré au paléo-environnement. En retrouvant les conditions de l'environnement (climat, profondeur de l'eau, sédimentation, circulation océanique) ayant régné au début puis au cours de l'ouverture d'un océan, on peut espérer comprendre les causes du dépôt de certaines roches des fonds marins ; on peut aussi espérer comprendre les mécanismes présidant au début d'une période glaciaire.

Du point de vue de la science française, l'IPOD aura le mérite considérable d'intégrer l'ensemble des spécialistes (parisiens ou provinciaux) des sciences de la Terre dans un programme international de pointe que la France, seule, ne pourrait pas entreprendre. La Communauté française des sciences de la Terre sera associée à l'IPOD non pas tellement en participant aux legs (le Glomar Challenger n'a que 14 places de scientifiques), mais en travaillant aux longues et multiples études et analyses des échantillons remontés des fonds marins qui, seules, pourront permettre de tirer tous les enseignements recelés dans les carottes.

Matière

Physique

Refonte de la théorie avec la multiplicité des particules

La révolution amorcée en physique fondamentale depuis la découverte de nouvelles particules lourdes baptisées psi (Journal de l'année 1974-75) a tenu ses promesses. Une moisson de résultats expérimentaux s'accumule dans les grands laboratoires. Un grand effort de renouvellement théorique est en cours. C'est dans la fièvre que les spécialistes attendent la mise en service d'accélérateurs de plus en plus puissants, qui mettront à l'épreuve leurs dernières hypothèses.

Les propriétés qui distinguent entre elles les particules fondamentales n'ont pas d'équivalent dans l'univers macroscopique de notre expérience quotidienne. Elles se manifestent notamment par les trajectoires photographiées dans les chambres de détection, mais il ne nous est guère possible de nous les représenter intuitivement, et notre langage courant ne possède pas de termes pour les désigner. Les lettres de l'alphabet grec sont sur le point d'être épuisées dans la nomenclature des particules récemment découvertes et, pour nommer les nouvelles propriétés qui les caractérisent, les physiciens s'amusent à puiser dans le vocabulaire ordinaire des mots dont le seul inconvénient est qu'ils risquent d'égarer l'imagination du profane. Ainsi en fut-il des particules étranges, qui ne le sont que par ce qu'au moment où on les observa elles ne cadraient pas avec les représentations alors en cours.

Charme

Il y a une dizaine d'années, la recherche d'une symétrie dans le classement des particules nouvelles conduisit quelques physiciens à imaginer l'existence d'une caractéristique encore inconnue, qu'ils baptisèrent poétiquement le charme. Outre les trois quarks (particules à charge électrique fractionnaire, déjà proposés comme constituants ultimes de la matière), il y en aurait un quatrième, le quark charmé. Son existence demeura encore plus hypothétique que celle des trois précédents, jusqu'à ce que la découverte d'un nouveau mode d'interaction du neutron avec la matière, sans transfert de charge électrique (interaction à courant neutre), remette à l'ordre du jour le quark charmé. La théorie exige en effet que le courant neutre se manifeste également par une désintégration d'une particule nommée kaon, désintégration qui ne se produit pas. Il faut donc qu'un charme pèse sur un des constituants du kaon.

Avec quatre sortes de quarks au lieu de trois (plus leurs anti-quarks respectifs), le tableau des particules possibles, fondé sur des considérations de symétrie, s'enrichit énormément. Il doit comporter de nouvelles familles de hadrons (particules sensibles à l'interaction forte, celle qui lie les constituants dans le noyau de l'atome). Or, les particules psi correspondent assez bien au signalement de ces nouveaux venus : masse de l'ordre de trois fois celle du proton, durée de vie beaucoup plus longue que celle des hadrons de masse comparable, mais dénués de charme. Si la particule psi vit si longtemps, c'est qu'elle ne peut pas facilement se débarrasser du charme par désintégration en particules déjà connues.

Charmonium

Après la première découverte, à la fin de l'année 1974, d'autres se sont succédé tout au long de l'année 1975 et au début de 1976. Les particules psi sont interprétées comme des paires quark-antiquark charmés, formant un ensemble qu on a baptisé charmonium. Ce charmonium peut (comme l'atome) occuper différents niveaux d'énergie, ce qui explique qu'on trouve des particules psi de masses différentes. Ce modèle permet de prévoir les produits de désintégration du charmonium ; ils ont effectivement été observés dans la chambre à bulles Gargamelle, au CERN, et dans celle du laboratoire Fermi aux États-Unis. Les désintégrations sont complexes et passent par plusieurs phases intermédiaires. Les durées sont beaucoup trop brèves pour être connues autrement que par l'interprétation du résultat final ; celle-ci est encore matière à discussion, mais il se peut qu'on ait obtenu des particules inconnues, formées d'un quark charmé.