Transposant dans l'étude des virus animaux à ADN l'expérience acquise au cours de ses travaux sur les virus des bactéries (bactériophages), Dulbecco a montré qu'aussitôt après l'infection certains gènes du virus commencent par stimuler la réplication de l'ADN de la cellule. Puis, dans les cellules dites permissives, les gènes viraux responsables de la synthèse des protéines virales s'expriment à leur tour, ce qui entraîne généralement la mort de la cellule. En revanche, dans les cellules non permissives, ces gènes sont réprimés ; la cellule, transformée par l'infection, peut devenir cancéreuse et se multiplier anarchiquement.

Étudiant les virus cancérogènes à ARN, Temin et Baltimore ont montré que, contrairement à ce qui était jusqu'alors un dogme en génétique, le transfert de l'information génétique ne se fait pas obligatoirement de l'ADN vers l'ARN. Une enzyme (la transcriptase inverse) peut synthétiser l'ADN complémentaire de l'ARN viral ; le programme génétique du virus s'incorpore alors à celui de la cellule infectée. Outre son intérêt pour la recherche cancérologique, la découverte de la transcriptase inverse a des incidences qui pourraient toucher la théorie de l'évolution.

Renato Dulbecco

Né en 1914 en Italie. Études de biologie. De 1942 à 1947 assistant à l'université de Turin, puis émigré aux États-Unis, où il est naturalisé en 1953. Chercheur à l'université d'Indiana, chercheur puis professeur à l'Institut technologique de Californie, directeur d'un laboratoire de recherches à l'Institut Salk d'études biologiques de San Diego. Travaille maintenant à Londres au Centre impérial de recherches sur le cancer. Ses travaux sur les bactériophages, par lesquels il a commencé sa carrière, lui ont permis de mettre au point les concepts et les méthodes qui ont ensuite été appliqués, par lui-même et par d'autres à la génétique des virus animaux. En ce sens il a joué un rôle de pionnier.

David Baltimore

Né aux États-Unis en 1937. Études au collège de Swarthmore, à l'Institut de technologie du Massachusetts (MIT) et à l'université Rockefeller. Chercheur à l'Institut Salk de San Diego, puis retour au MIT, où il enseigne la microbiologie. En 1964, seul de tous les virulogistes, Temin avait affirmé qu'il devait exister un mécanisme de retranscription de l'information génétique dans l'ADN à partir de l'ARN. Six ans plus tard, Baltimore fut un de ceux qui apportèrent la preuve de la vérité de cette hypothèse en découvrant la transcriptase inverse dans le virus de Rous et dans un virus de leucémie de souris. Depuis, la transcriptase inverse a été retrouvée dans tous les virus cancérogènes à ARN. En laboratoire, elle permet de synthétiser de l'ADN correspondant à un gène ou à un groupe de gènes à partir de leur ARN messager.

Howard Martin Temin

De vingt ans plus jeune que le précédent lauréat : né en 1934 à Philadelphie. Études au collège de Swarthmore (Pennsylvanie), puis à l'Institut technologique de Californie. Dirige actuellement des recherches à la section de virologie de l'Institut national de la santé et fait partie du groupe de travail de l'Institut américain du cancer pour la détection des virus cancérogènes. Temin a surtout travaillé sur le virus du sarcome de la poule, premier virus cancérogène connu, découvert en 1911 par Peylon Rous (prix Nobel 1966). Sous la direction d'un élève de Dulbecco, Harry Rubin, il a élaboré une nouvelle méthode de culture des cellules transformées.

Vers un nouveau départ pour la recherche

D'importantes réformes, décidées pour la plupart au cours d'un Conseil des ministres restreint le 3 novembre 1975, viennent modifier l'organisation de la recherche scientifique et technique en France. Elles traduisent une volonté de plus grande coordination et d'adaptation aux besoins économiques et sociaux. En même temps (sous l'impulsion, semble-t-il, du président de la République), la recherche fondamentale devrait être encouragée à sortir de la relative stagnation des années précédentes. Mais, au début de juin, le Comité consultatif est amené à protester contre le refus du ministère de l'Économie et des Finances d'accorder les crédits nécessaires à une expansion même modérée pour des organismes aussi importants que le CNRS, le CNEXO et l'INSERM.