Une certaine effervescence gagne les établissements secondaires et, de la mi-novembre à la mi-décembre, plusieurs lycées et collèges sont le théâtre de manifestations diverses. Les deux principaux incidents se produisent au lycée Montaigne, à Paris, et au lycée de Rueil-Malmaison.

Manifestations et sanctions

Au lycée Montaigne, après plusieurs jours de troubles, le 19 novembre un meeting de protestation entraîne, le 29, la comparution de trois élèves devant le conseil de discipline. Le même jour, une manifestation réunit à Paris plus de 3 000 jeunes qui s'élèvent contre la fameuse circulaire et contre les menaces de sanctions qui pèsent sur les trois lycéens. Des assemblées générales se tiennent dans plusieurs établissements. Le conseil de discipline du lycée Montaigne prononce l'exclusion des trois élèves incriminés.

Cette décision provoque des mouvements de grève, le lendemain, dans quelques lycées ; le 1er décembre, une nouvelle manifestation rassemble à Paris environ 5 000 personnes ; le mouvement se prolonge le 3 dans plusieurs quartiers de Paris et plusieurs villes de province.

L'agitation persiste au cours de la semaine suivante. Elle paraît devoir se ralentir quand les incidents du lycée de Rueil viennent la relancer. Neuf élèves, qui avaient appelé leurs camarades à faire grève, sont menacés de sanctions : les lycéens décident, le 9 décembre, l'occupation du lycée. La police intervient une première fois le 10 ; le 11, après la fermeture de l'établissement, les forces de l'ordre pourchassent les manifestants dans les rues de Rueil. Des brutalités sont signalées. Trois élèves sont exclus du lycée le 15.

En mars, de nouveaux incidents éclatent au lycée Montaigne. Des commandos du mouvement Ordre nouveau mènent plusieurs actions contre l'établissement. Une enseignante est blessée le 1er mars. La réaction des lycéens d'extrême gauche groupés au sein du Comité de lutte lycéen de Montaigne entraîne la convocation de sept d'entre eux devant le conseil de discipline. Le 21 mars, les mouvements de grève suscités par ces sanctions provoquent la fermeture du lycée jusqu'aux vacances de Pâques. Quatre élèves sont exclus. Une manifestation, qui réunit au Quartier latin plusieurs centaines de personnes, donne lieu à des heurts violents avec les forces de police. En mai, à la suite d'incidents, le lycée Jean-Baptiste-Say, à Paris, est fermé (3 élèves sont exclus).

D'autres manifestations ont lieu à Paris et en province. Des causes de mécontentement propres à chaque établissement viennent parfois s'ajouter à la protestation contre la reprise en main des lycées.

Si les groupes politiques — gauchistes ou non — ont fait la preuve de leur vitalité au cours de l'année (sans que le mouvement retrouve l'ampleur atteinte l'année précédente lors de l'affaire Guiot [Journal de l'année 1970-71]), l'attitude active de nombreux lycéens sans appartenance politique a révélé que le malaise de l'enseignement secondaire n'était pas seulement celui des professeurs.

L'Université : priorité aux mesures de sélection

La mise en place des structures prévues par la loi d'orientation s'est achevée, pour l'essentiel, en avril 1971, avec les élections au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (seuls les Conseils régionaux restent à créer) [Journal de l'année 1970-71].

Il s'agit désormais, pour les responsables de l'Éducation nationale, d'assurer le fonctionnement des nouvelles institutions et de définir une politique du Supérieur qui prenne en compte l'avenir professionnel des étudiants.

Le premier de ces objectifs — le démarrage des universités nouvelles — n'est que partiellement atteint. Les élections aux conseils d'UER, qui se déroulent de décembre à mars 1972, ne sont pas plus suivies que l'année précédente par les étudiants : le taux de participation, qui dépasse à peine 30 %, est même en baisse.

De plus, de nombreuses difficultés apparaissent dans la gestion des établissements d'enseignement supérieur. Certaines ont pour origine des conflits entre UER réunies parfois contre leur gré au sein d'une même université : c'est le cas à Marseille, où les juristes s'opposent aux médecins, à Strasbourg, où les enseignants de sciences sociales s'estiment traités en parents pauvres par les autres UER, à Montpellier, où les héritiers de l'ancienne faculté de médecine demandent à se constituer en université autonome.