La pyramide des âges des exploitants présente une image au moins aussi alarmante : la moitié d'entre eux sont âgés de plus de 57 ans.

Exploitations exiguës

Ces structures de production vétustés sécrètent la surproduction, en même temps que l'hémorragie des fonds publics. On fixe les prix agricoles essentiellement en fonction de facteurs sociaux et non de facteurs économiques, alors que la plupart des agriculteurs, enfermés dans leurs exploitations trop exiguës, sont contraints de pratiquer une politique de production intensive pour s'assurer un revenu minimal.

Le but de la réforme est évidemment de favoriser la constitution de véritables entreprises agricoles assurant à leurs exploitants une rémunération satisfaisante dans des conditions normales de travail.

D'ici à 1980, terme du programme défini par la Commission de Bruxelles, l'agriculture devra mettre les bouchées doubles. Déjà, les seuils de rentabilité dans les différentes spécialités agricoles sont très éloignés des moyennes européennes : l'exploitation céréalière devrait avoir au moins de 80 à 120 ha, le producteur laitier devrait posséder de 40 à 60 vaches, l'éleveur de 150 à 200 bovins ou de 450 à 600 porcs ; quant à l'aviculteur, il devrait vendre bon an, mal an 100 000 poulets.

Un agriculteur sur deux

Sur le plan social, les questions posées débordent très largement le cadre agricole. Selon les prévisions des experts de Bruxelles, il faut s'attendre au départ de la terre de 5 millions de personnes d'ici 1980 : en fait, un agriculteur sur deux.

Or, compte tenu du fait que la moitié de ces agriculteurs devront se reconvertir, cela implique que les autres secteurs de l'économie soient créateurs d'emplois.

Le plan Mansholt préconise également la généralisation du système français des indemnités de départ aux agriculteurs âgés (indemnité viagère de départ) et prévoit, en outre, des mesures en faveur de toutes les personnes désirant quitter l'agriculture, quel que soit leur âge.

Coût : douze milliards

Un ensemble de mesures d'encouragement — allant du crédit à la révision et à l'adaptation des législations foncières en vigueur — doit également, selon la Commission, être prévu afin de faciliter la constitution d'entreprises agricoles modernes.

En raison de l'augmentation des rendements et de la progression constante des excédents, il sera également nécessaire de réduire les surfaces cultivées. Selon le plan Mansholt, de 1970 à 1980, la superficie agricole du Marché commun devrait être réduite d'au moins 5 millions d'hectares, la majeure partie de cette superficie devant être boisée grâce à un système d'encouragement et de subventions à la sylviculture.

L'adoption de cette nouvelle politique agricole devrait s'accompagner d'un régime de prix agricoles beaucoup « plus prudent » que celui qui est actuellement en vigueur.

Le coût du plan Mansholt a été estimé à 12 milliards de francs par an d'ici à 1970. Il s'agit là d'une somme imposante, d'autant plus qu'il ne sera guère possible de réduire considérablement, dans l'immédiat, les dépenses de soutien des marchés. Mais, selon le vice-président de la Commission, le salut du Marché commun agricole et sa cohésion sont à ce prix.

Il faut investir beaucoup dans l'immédiat et dans les dix prochaines années pour ne pas avoir à faire face, à l'échéance de 1980, à une situation qui risquerait d'être inextricable, économiquement, socialement et aussi politiquement.

L'alimentation poursuit sa concentration

Dans la conserverie, des groupes importants ont confirmé leur place sur les marchés, notamment Olida, qui a fusionné avec Caby (conserverie de viande), et Saupiquet, qui a absorbé la société Cinal.

Dans la biscuiterie, où les intérêts étrangers — essentiellement américains — sont importants, on a assisté à la constitution d'un groupe qui a pris la tête de la profession autour de Lu et Brun.

Dans la brasserie, un groupe de trois se renforce : l'Européenne de Brasserie, Kronenbourg (qui a absorbé Dumesnil), et les trois sociétés rassemblées autour des Brasseries de la Comète.

Deux grandes sociétés étrangères, Unilever et Nestlé, ont réalisé des investissements importants sur le marché français, en prenant notamment des intérêts dans le secteur des produits laitiers frais et, également, pour Nestlé, dans celui des eaux minérales (Vittel).