Précautions pour les roches : il fallait éviter tout effritement du grès au contact des scies. Pour augmenter la cohésion du grès, on traita avec des résines synthétiques les surfaces que l'on désirait soigner particulièrement. Les parties qui donnaient des inquiétudes et se montraient friables avaient été traitées, elles aussi, et renforcées dans la masse par des injections.

Il s'agissait ensuite de choisir les scies. Le contrat stipulait que les traits de scie du découpage — c'est-à-dire la partie des monuments qui serait irrémédiablement détruite — ne devaient pas dépasser 6 mm. Pour toutes les parties délicates, en fait pour la plus grande partie du travail, le découpage s'est effectué à la scie à main.

Autre problème pour le levage des blocs : on ne pouvait avoir recours aux pinces ou aux griffes habituelles, qui auraient détérioré les surfaces fragiles. La solution : creuser dans la partie supérieure un ou plusieurs trous et y enfoncer une tige. La prise de la tige une fois assurée au moyen d'une résine synthétique, on pouvait procéder au levage et au transport jusqu'aux emplacements de stockage.

La reconstruction

Le découpage des temples s'était terminé pendant l'été 1966. La reconstruction avait alors déjà commencé : on avait même procédé à une cérémonie officielle, le 26 janvier 1967, pour la pose de la première pierre... Et pour cette reconstruction, d'autres difficultés ont dû être résolues.

La plus sérieuse concernait la solidité, la cohésion des temples. Auparavant, cette cohésion était celle des couches géologiques dont ils faisaient partie intégrante ; maintenant qu'ils en étaient séparés, il fallait assurer la cohésion par d'autres moyens.

Avant le découpage, des échafaudages de poutrelles métalliques avaient été mis en place à l'intérieur, de façon à maintenir parois et plafonds, et pour prévenir tout risque de fissures pendant l'opération. Les mêmes échafaudages ont été installés pour la reconstruction. Et quand les blocs furent à leur nouvel emplacement, on reconstruisit une montagne autour d'eux.

C'est-à-dire que l'on construisit derrière les parois et au-dessus des plafonds un mur de béton, véritable coque à laquelle les blocs étaient fixés. Muraille de béton également derrière les façades. Et, prenant appui contre cette muraille, une immense voûte, toujours en béton, commença à prendre forme. Il s'agissait de soutenir le poids de la colline artificielle qui était prévue au-dessus des deux monuments pour reconstituer autant que possible leur environnement originel. On ne pouvait pas faire supporter ce poids par les temples : un monument moderne était nécessaire, et une nouvelle salle souterraine à Abou-Simbel, sous la voûte de béton, salle que l'on ne visitera pas...

On s'attela ensuite aux problèmes de finition : mise en place de la colline artificielle et, surtout, finition des temples eux-mêmes. En effet, les intervalles entre les blocs restaient bien visibles. On ne pouvait les supprimer ; il fallait donc les rendre invisibles. En septembre 1967, certains des intervalles furent remplis avec du grès pulvérisé, que l'on avait coloré pour l'adapter aux couleurs variées de la roche, et mélangé à une résine synthétique. Une mission internationale d'archéologues est venue juger des résultats. Elle n'a pas pu retrouver l'emplacement des joints et a donc exprimé ses félicitations.

Les deux temples reconstruits se dressent désormais 64 m plus haut et 180 m plus loin vers l'ouest. Leur orientation et leur position réciproque ont été respectées au millimètre près.

Il reste à l'Unesco à résoudre un autre grand problème : celui de Philae.

Ce monument se trouve entre les deux barrages. Autrefois périodiquement inondé, il subit actuellement de graves atteintes par suite des variations diurnes du petit lac artificiel. Pour le sauver, l'Unesco a convoqué une réunion d'experts, à la suite de laquelle le gouvernement de la République arabe unie a décidé de transférer le monument de Philae sur un îlot voisin. La campagne pour Philae, décidée au mois d'août, devait être officiellement lancée le 22 septembre 1968, à l'inauguration d'Abou-Simbel.

Découverte d'un nouveau manuscrit de la mer Morte

Ygaël Yadin, chef de la section archéologique de l'université hébraïque et correspondant de l'Académie des inscriptions et belles-lettres de Paris, a annoncé en octobre 1967 la découverte d'un nouveau manuscrit de la mer Morte, dont l'intérêt dépasse celui des précédents.