Journal de l'année Édition 1967 1967Éd. 1967

La recherche médicale n'a pas été négligée pour autant. Une aide prioritaire a été accordée aux organismes inter-États de lutte contre les grandes endémies (OCGE en Afrique de l'Ouest, OCGEA en Afrique centrale). Une nouvelle méthode de lutte contre la terrible onchocercose, qui rend aveugle, a pu être mise au point.

Tous ces faits incitent à penser que, contrairement à certaines apparences, le gouvernement français n'est pas décidé à se désengager aussi sérieusement qu'ont tendance à le faire les gouvernements d'autres puissances.

Des chiffres significatifs, sur ce point particulier, sont ceux qui portent sur le nombre d'agents des personnels d'assistance technique actuellement en service sur le continent africain. Les plus récents indiquent, en effet, que la France compte 13 335 agents, la Grande-Bretagne 9 324, les États-Unis 3 789, la Belgique 2 872, l'Italie 924 et la République fédérale allemande 306.

Marché commun

Le bilan des dix premières années

En 1967, le traité de Rome instituant le Marché commun a eu dix ans. Mais le Marché commun lui-même n'en a que neuf, tandis que la politique européenne en compte dix-sept.
La Communauté européenne est née, en effet, avec le pool charbon-acier proposé par la France en mai 1950, et le jugement que l'on porte sur l'histoire du Marché commun ne peut pas être indépendant du jugement sur l'ensemble de la politique d'unification européenne.
Les auteurs du traité de Rome, comme ceux du traité de Paris qui avait institué la Communauté européenne du charbon et de l'acier, ne visaient pas seulement à créer un Marché commun. Ils voulaient contribuer, par ce moyen, à la réalisation de l'unité européenne.
Économique dans sa nature, le traité de Rome était politique dans son objet. Dix ans après sa signature, il a mis effectivement en œuvre la plupart des institutions et des processus qu'il prévoyait. Mais il n'a pas, pour autant, réalisé l'unité politique du Vieux Continent telle que la concevaient ses promoteurs, c'est-à-dire transféré à des organes communautaires une part non négligeable de la souveraineté détenue par les États nationaux.

Cela ne signifie pas que la constitution du Marché commun ait été sans effet sur l'unité de l'Europe. Loin de là. Mais cela signifie que l'unité politique n'est pas le fruit spontané et inéluctable d'une communauté économique.

Cette communauté économique devait être réalisée, selon le traité, de deux façons : d'abord par la création d'un marché unique, c'est-à-dire par la disparition des frontières économiques entre les six pays membres et la constitution d'une frontière commune avec le reste du monde (application d'un tarif douanier extérieur commun), ensuite par la mise en œuvre de politiques communes gérées par des organes communautaires. Union douanière et politiques communes, tels sont donc les deux piliers du Marché commun.

À ne considérer que les grandes orientations, on constate que l'union douanière a pris de l'avance par rapport au traité, tandis que les politiques communes auraient plutôt tendance à prendre du retard, sauf dans le domaine très important de l'agriculture. Il est vrai qu'à la différence de ce qui pouvait se passer dans l'industrie il était inconcevable de réaliser un marché agricole unifié, sans unifier en même temps les politiques agricoles.

La réalisation de l'union douanière doit se faire avec dix-huit mois d'avance sur le calendrier le plus optimiste inscrit dans le traité. Les droits de douane entre les Six auront complètement disparu en juillet 1968 ; le traité prévoyait 1970, au plus tôt. Parallèlement, les Six ont consenti à réduire d'un tiers leur protection commune à l'égard du marché extérieur, à l'occasion de la négociation Kennedy.

En matière d'harmonisation des législations, les réalisations les plus significatives concernent le contrôle des ententes (que d'aucuns jugent trop rigoureux en cette période où les entreprises européennes doivent se mettre à la taille de leurs concurrentes américaines) et l'harmonisation des fiscalités (la taxe à la valeur ajoutée a été adoptée par les Six).

L'agriculture en vedette

Dans le domaine des politiques communes, l'agriculture a tenu la vedette. L'unification des marchés et des prix, l'intervention d'une caisse communautaire pour financer l'agriculture, la reconnaissance, par ce moyen, d'une préférence communautaire, constituent autant de décisions de grande portée dans la vie de la communauté. Il est certain que de telles mesures n'auraient pas pu être prises si les gouvernements des États membres n'avaient pas été animés de la volonté politique de réaliser la Communauté.