Enfin, le directeur de la Révolution culturelle dans l'armée, le général Hsu Hsiang-chien, est remplacé par Hsiao Hua, qui étend ses pouvoirs.

Le Comité révolutionnaire

Dans le même temps, une main de fer s'abat sur Pékin, où éclatent, régulièrement, des foyers de guerre civile : celle du général Hsieh Fu-chih, redoutable ministre de la Sécurité, chef des Services secrets. Escorté de soldats, mitraillette à la hanche, il préside le nouveau Comité révolutionnaire de Pékin, qui remplace l'ancien Conseil municipal du maire révoqué, Peng Chen.

La composition de cette sorte de Comité de salut public est significative, pour la Chine entière et pas seulement pour la capitale, d'un nouveau tournant de la politique maoïste. Sur 97 membres, 37 ouvriers ou paysans (« pauvres », précise-t-on), 30 militaires et 26 étudiants ou professeurs. Au sein du bureau, des vedettes qui soulignent l'importance de cet organisme qu'on veut modèle : Chou En-lai lui-même, Chen Po-ta, chef de la Révolution culturelle, Mme Chiang Ching, femme de Mao, qui renforce sa position de Passionaria, Kang Sheng, comingman du Bureau politique, et l'homme de Lin Piao, Hsiao Hua (encore lui).

À la présidence du Comité, Hsieh Fu-chih, assisté de quatre vice-présidents : Wu Teh, ancien maire adjoint, exemple de la récupération entreprise des anciens cadres réhabilités, le général commandant la garnison de Pékin, un membre du Comité central et l'un des leaders de la Révolution culturelle, Chi Pen-yu, qui relance, le 1er avril, une campagne, plus violente que jamais, contre le président Liu Shao-chi, adversaire plus difficile à éliminer que Mao ne l'avait imaginé.

Toujours en place

Après un an de Révolution culturelle, un an de critiques incessantes, d'invectives, d'humiliations, de séances d'incitation à l'autocritique, pour lui et pour sa femme qui aurait tenté de se suicider, Liu, l'entêté, n'est toujours pas officiellement destitué. Il essaie même de réagir en s'appuyant sur les syndicats fidèles et les notables du régime qu'il avait installés et dont certains restent en place.

En avril, le bruit court que Mao a fini par le faire exclure du Comité central, mais, en fait, il n'aurait obtenu qu'un vote à une voix de majorité du Comité permanent du Bureau politique.

Alors Liu Shao-chi contre-attaque en réclamant, officieusement, une confrontation avec Mao lui-même (qu'il croit manœuvré par son entourage) et une convocation du Plenum du Comité central, où il espère avoir gardé une majorité favorable. Autre offensive des maoïstes en juin, le Drapeau rouge laisse entendre que Liu serait renversé.

Ainsi, après des années de patiente préparation et un an de reprise du pouvoir, Mao ne semble pas avoir réussi à se débarrasser de ses adversaires. Il n'a pas réussi à empêcher les turbulents Gardes rouges de faire éclater de nouveaux incidents diplomatiques avec les Soviétiques, les Hongrois, les Bulgares, les Cubains, les Indiens, les Birmans.

Avec les Britanniques, beaucoup de bruit pour rien autour de Hongkong : il n'a pas vraiment l'intention de récupérer la ville, beaucoup plus utile comme fenêtre ouverte sur le monde extérieur du commerce et de la finance. Alors que Macao commence à mourir d'inanition. Enfin, l'immense territoire chinois, en perpétuelle agitation, échappe toujours à Mao, qui ne règne, tant bien que mal, que sur les provinces du centre.

L'Unité retrouvée

Aussi le vieux chef doit-il composer. Fin avril, il convoque à Pékin une réunion des responsables des principaux comités révolutionnaires régionaux. Il les invite à un spectacle de ballet avant une longue conférence pour trouver les moyens de reprendre la situation en main. Parmi les décisions prises, la responsabilité de la province troublée du Setchouan donnée au général Chang Kuo-hua, qui revient du Tibet, où il a tenté de mater la révolte dans un bain de sang.

Parallèlement, le chef de la Révolution culturelle Chen Po-ta est nommé recteur de l'université de Pékin à la place de Lu Ping, que l'on aperçoit aujourd'hui balayant les pelouses.