Représentés par Stokely Carmichael, président du Comité de coordination des étudiants non violents (SNCC), et par Floyd MacKissick, président du Congrès pour l'égalité raciale (CORE), les défenseurs du pouvoir noir se battent pour la création de structures économiques et politiques noires. Ils affirment qu'ils n'agissent pas ainsi dans un dessein raciste, mais pour établir une puissance noire qui puisse discuter d'égal à égal avec la puissance blanche.

La généralisation du slogan « pouvoir noir » parmi les jeunes couches de la population de couleur effraye la majorité blanche du pays, qui a manifesté sa désapprobation lors des élections du mois de novembre 1966. Le phénomène a été particulièrement sensible dans la région de Chicago et en Californie, où des émeutes raciales s'étaient multipliées durant tout l'été 1966.

La population noire a obtenu satisfaction pratiquement sur tous les points de droit qu'elle a soulevés. Ses revendications portent maintenant sur l'amélioration de sa situation sociale et économique, que les tribunaux ne peuvent pas lui accorder et que les structures de la société américaine ne permettent pas, dans l'immédiat au moins, de satisfaire.

Un domaine réservé

Les programmes sociaux du président Johnson, la « lutte contre la pauvreté », étaient destinés en partie à remédier à cet état de chose. Ils s'adressaient également à la partie la plus défavorisée de la population blanche.

Les programmes sont remis en question par la nécessité d'une plus grande rigueur budgétaire due à l'importante augmentation des dépenses militaires, et par la mauvaise humeur des parlementaires à l'encontre de la communauté noire.

Les critiques adressées à la guerre contre la pauvreté sont d'autant plus sévères que les programmes de Johnson avaient été lancés sans aucune préparation, dans une improvisation certaine. Il est facile aux adversaires du programme de mettre en relief de nombreux abus et gaspillages, et de dénoncer la volonté du gouvernement fédéral de s'immiscer dans un domaine réservé aux droits des différents États.

Pour éviter une épreuve de force avec un Congrès qu'il contrôle de moins en moins, le président Johnson réduit sérieusement les crédits de la guerre contre la pauvreté dans son budget pour l'année fiscale 1967-1968.

Le changement d'attitude des parlementaires à l'égard de la communauté noire s'était manifesté dès l'automne 1966 par le rejet d'un train de lois sur les droits civiques, dont un des principaux points prévoyait l'interdiction de la ségrégation dans les grands ensembles.

Après les sénateurs, les membres de la Chambre des représentants allaient, quelques mois plus tard, traduire leur mauvaise humeur par la suspension d'abord, puis par l'exclusion du pasteur noir Adam Clayton Powel, représentant de Harlem. Celui-ci, accusé d'offense à la Cour et de détournement des fonds du Congrès, n'eut aucun mal cependant à se faire réélire dans la même circonscription.

La guerre du Viêt-nam, dont le coût a été évalué à plus de 25 milliards de dollars pour l'année fiscale 1965-1966, a de fortes incidences sur l'économie américaine, en progression constante depuis plus de trois ans.

L'agitation sociale

Ce malaise s'est traduit durant les premiers mois de 1967 par deux phénomènes en apparence contradictoires : surchauffe de l'économie et ralentissement très net de l'activité de certains secteurs, la construction, l'automobile et l'électroménager en particulier.

Quelques mois plus tard, certains experts dénoncent un risque de récession, sans qu'ait été freinée pour autant l'augmentation du coût de la vie, accentuée par de très durs mouvements de grève et une situation sociale toujours tendue.

Ce risque de récession explique que le président Johnson, après avoir demandé au Congrès de se prononcer en faveur d'une augmentation des impôts, n'ait pas hâté le mouvement dans ce sens. Ces signes d'une légère récession ont largement contribué à aggraver le mécontentement de l'opinion.

Liens étroits avec l'URSS

En politique étrangère, c'est le conflit vietnamien et ses incidences qui constituent la préoccupation majeure de l'Administration. Deux des trois voyages accomplis par Johnson ont été consacrés au problème.