À travers les Régions

Alsace

Les Alsaciens ont bien cru que leur région allait être touchée par les « affaires », après la mise en examen du directeur général des services, Philippe Garing, bras droit du président du conseil général et membre du Conseil constitutionnel Marcel Rudloff (CDS). Alertés par la chambre des comptes d'Alsace, les enquêteurs strasbourgeois ont mis au jour tout un réseau de corruption et de blanchiment d'argent. Parmi les affaires dans lesquelles se trouve impliqué P. Garing, le projet « Rhexania » devrait faire de l'Alsace un pôle européen de production audiovisuelle : la chambre n'a pas acquis la certitude que les prestations fournies par la société Réflexion Média Riposte (RMR) – un rapport de 70 pages traitant de généralités – pouvaient justifier une dépense de 4,1 millions de francs... Le remplacement de Philippe Garing par André Klein, jusqu'alors directeur général du conseil général du Haut-Rhin et du comité d'action économique et sociale de ce département (CAHR), redonne au conseil général crédibilité et efficacité. C'est lui qui a le plus œuvré en Alsace, au travers du CAHR, pour attirer les investisseurs japonais. On lui doit indirectement les 3 000 emplois créés en Alsace par les firmes nippones depuis les années 1980 (Sony à Ribeauvillé, Ricoh à Wettelsheim, Sharp à Soultz, etc.). André Klein a toujours considéré que l'ouverture de l'Europe était nécessaire pour défendre le plein emploi. C'est encore plus vrai au moment où l'Alsace est confrontée à la crise : malgré les investissements allemands et suisses, malgré les 60 000 frontaliers, la proportion de chômeurs est passée de 5,2 % de la population active en 1980 à 7,8 % en 1994.

L'épilogue de cette affaire de corruption permet en outre l'arrivée de Hubert Haenel (RPR), sénateur, vice-président du conseil régional, originaire du Haut-Rhin, aux côtés de Marcel Rudloff. Cela avait été convenu après les élections de mars 1992 mais n'avait pu se faire, en raison de la présence aux leviers de commande de P. Garing. L'arrivée de A. Klein et de H. Haenel symbolise la revanche des Haut-Rhinois sur les Bas-Rhinois, suspectés de condescendance à l'égard de leurs voisins du Sud.

Par l'intermédiaire d'un questionnaire envoyé aux 418 000 familles du Bas-Rhin (« Pensez-vous que l'idée de réunifier le Bas-Rhin et le Haut-Rhin en une seule collectivité est une bonne chose ? »), Daniel Hoeffel (UDF), président du conseil général, mais aussi ministre délégué à l'aménagement du territoire et aux collectivités locales, relance le débat sur la fusion des deux départements alsaciens.

S'agit-il pour lui, dans la perspective des élections municipales de 1995, de se placer de fait à la tête d'une liste de personnalités de la majorité susceptible d'enlever la mairie de Strasbourg à Catherine Trautmann (PS) ?

Avec une progression de 29 % du nombre de bénéficiaires du revenu minimum d'insertion (RMI), l'Alsace enregistre une des plus fortes progressions parmi les Régions françaises. Est-ce la fin de l'exception alsacienne ? Forte de son réseau de PME et de sa tradition de solidarité, la région multiplie les expériences d'« insertion par l'économique » et demeure relativement privilégiée.

Strasbourg n'organisera pas de matches lors de la Coupe du monde de football 1998 : les travaux d'agrandissement du stade de la Meinau seraient trop onéreux.

Aquitaine

À Bordeaux, le « système Chaban », qui fonctionne depuis 1947, semble toucher à sa fin et la guerre de succession pour accédera l'hôtel de ville est ouverte. Déjà mis à mal par la politique culturelle symbolisée par le centre d'art plastique contemporain, le consensus dont bénéficiait Jacques Chaban-Delmas vole en éclats à l'occasion d'un vote par les élus de la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB) sur le métro.

Après dix années de tribulations, Jacques Chaban-Delmas a réussi à faire approuver, le 10 janvier 1994, son projet de métro pour l'agglomération bordelaise : ce sera un véhicule automatique léger (VAL) desservant chaque rive, la mise en service du premier train devant intervenir en 2001. Mais le rejet du traité de concession du VAL, le 22 juillet, s'il n'enterre pas le projet, le retarde considérablement. Pour François-Xavier Bordeaux, chef de file de l'opposition socialiste, c'était « le métro le plus cher de France, à 800 millions de francs le kilomètre, contre 250 millions ailleurs ». En refusant d'approuver le texte, les élus UDF ont rejoint le RPR Jacques Valade, président du conseil régional, candidat à la mairie de « la capitale d'Aquitaine » et dont les réticences quant au projet sont bien connues.