La loi de 1986 était particulièrement généreuse : elle instituait le seul régime fiscal permettant à un investisseur de déduire du montant de ses revenus la totalité des investissements réalisés. Cette loi semblait une porte ouverte à l'évasion fiscale, mais tous les observateurs admettaient que des retombées économiques existaient. Pourtant, fin 1991, certains avantages étaient réduits.

En juin 1993, le Parlement reprend, voire élargit, la plupart des dispositions initiales. Pour les entreprises qui investiront dans les DOM avant le 31 décembre 2001, la déduction d'impôt sera de 100 %, quel que soit le secteur d'activité (alors que les dispositions précédentes favorisaient le tourisme et l'hôtellerie). Les particuliers achetant un logement neuf à titre de résidence principale ou en vue d'une location à compter du 1er juillet 1993 bénéficieront d'une réduction d'impôt de 50 % du montant de leur acquisition. Sont défiscalisés aussi les apports de capitaux privés consacrés aux équipements publics et destinés aux entreprises en difficulté.

À Saint-Pierre-et-Miquelon, offensive et désespoir des pêcheurs

Les cinquante marins et élus saint-pierrais sont partis en toute connaissance, et dans l'illégalité, dans les eaux territoriales canadiennes, comme on part en croisade. Il s'agissait de protester contre les quotas de pêche imposés unilatéralement par les Canadiens, de lancer un SOS à la France et de forcer Paris et Ottawa à reprendre les négociations concernant la répartition des quotas et la délimitation des zones de pêche.

Venu sur place, Dominique Perben, le nouveau ministre des DOM-TOM, a vu les symptômes du mal : les chalutiers à quai, le port en sommeil, l'usine d'Interpêche vide et silencieuse. Réaliste mais brutal : « Il faut oublier pour quelques années la pêche à la morue. » Certes, les marins au chômage forcé, depuis l'arrêt de toute pêche hauturière en juillet 1991, ont leur salaire payé intégralement par le fonds national pour l'emploi, mais, répliquent-ils : « Nous voulons du travail, pas de l'assistance. » Le ministre s'est engagé sur deux dossiers : la mise en place d'un système d'incitations fiscales susceptibles d'attirer les entreprises dans l'archipel et la construction d'une nouvelle piste d'aéroport.

La houille blanche dans l'enfer vert guyanais

Le plus grand barrage français sera bientôt en Guyane. En raison de l'explosion démographique des DOM (plus de 5,7 % par an) et de la mise en service d'Ariane 5 en 1995, les deux centrales au fioul ne suffiront bientôt plus. Kourou consomme à lui tout seul 20 % de l'électricité de la Guyane. Le barrage du Petit Saut, sur le fleuve Sinnamary, retiendra un lac artificiel de 300 kilomètres carrés et 3,5 milliards de mètres cubes, soit trois fois et demie le lac de Serre-Ponçon dans les Alpes. La mise en eau du barrage doit donner lieu à une opération spectaculaire de sauvetage de la faune : les chercheurs du Muséum ont recensé dans la zone à inonder 300 espèces d'oiseaux, 75 espèces de serpents, 150 espèces de mammifères. L'opération « Arche de Noé » est mise sur pied par EDF pour récupérer des animaux et les relâcher plus loin.

Une communauté antillaise fait souche dans l'Hexagone

Trois ans après le recensement de 1990, l'INSEE publie un document intéressant sur la population originaire des DOM-TOM vivant en métropole. D'un recensement à l'autre (1982-1990), le nombre de personnes originaires de Guadeloupe ou de Martinique vivant en métropole a augmenté de 21 % : elles étaient 337 000 en 1990, soit un Antillais sur quatre. 125 000 enfants nés en France de parents antillais (leur nombre a augmenté de 70 % en huit ans) s'ajoutent aux 210 000 personnes ayant émigré vers la France. Les personnes originaires des DOM-TOM et installées en France sont des actifs à 75 %. Jeunes (87 % ont de 15 à 24 ans), ces derniers sont centrés en Île-de-France. Les femmes sont plus nombreuses (52,2 %) et le secteur tertiaire est surreprésenté (80 % des emplois). Le secteur public emploie la majorité de ces personnes, surtout dans des emplois de faible qualification.

L'État au secours de la Polynésie

L'économie de la Polynésie n'était pas armée pour résister à la suspension des expériences nucléaires : 75 % des ressources locales viennent de transferts de l'État, dont 30 % au titre du ministère de la Défense. Brandissant l'épouvantail de la menace indépendantiste et des progrès du Front de libération de la Polynésie (22 % des suffrages en mars 1993), Gaston Flosse, président du gouvernement polynésien, mit sa démission dans la balance pour obtenir un accord avec le ministre des DOM-TOM, Dominique Perben. Ce « pacte de progrès » conclu le 15 septembre 1993 pallie les conséquences de la suspension des essais nucléaires. La Polynésie bénéficie d'un engagement financier de l'État de 3,41 milliards de francs sur la période 1994-1998.

Réunion : vers l'indépendance énergétique grâce à la bagasse

Une centrale électrique brûlant les déchets de canne à sucre fournit 12 % de la consommation de la Réunion. Polyvalente, la centrale de Bois-Rouge arrive à point pour répondre à la hausse de la consommation ( 10 % par an) et permet à l'île d'atteindre un taux d'indépendance énergétique de 58 %.

Claude Malassigné