22 octobre : Selon Téhéran, les forces iraniennes ont occupé 700 km2 de territoires iraqiens à la suite de l'offensive Aurore IV, lancée sur un front de 150 km. Ces territoires se trouvent au nord-ouest de Marivan et au sud-ouest de Baneh, deux villes du Kurdistan iranien, ainsi que dans le saillant iraqien de la rivière Chiler inséré entre Baneh et Marivan. En outre, Téhéran annonce que les forces iraniennes ont occupé 100 km2 dans la région frontalière de Sardacht, tenue par des Kurdes iraniens soutenus par Bagdad.

23 octobre : l'Iraq riposte au déclenchement de la nouvelle offensive iranienne en bombardant les villes de Dezfoul et de Masdjed Soleiman au Khouzistan. Selon Téhéran, ces tirs de missiles sol-sol font 95 morts et 450 blessés parmi la population civile.

Haig Kirazian

Haig Kirazian

Israël

Les trois crises

Pour nombre d'Israéliens, 1983 restera une année noire. Car ils ont le sentiment d'avoir, au Liban, perdu une paix que Menahem Begin leur avait annoncée pour la fin de 1982, après avoir gagné la bataille militaire. La démission subite du Premier ministre illustre bien le désarroi d'une nation qui, malgré ses divisions, avait su préserver jusque-là son unité.

La présence au Liban

L'accord israélo-libanais de mai 1983 proclamant la « fin de l'état de guerre » entre Israël et le Liban, en dehors du fait qu'il ne résout rien sur le terrain, ne fait pas oublier aux Israéliens les conséquences d'une guerre que beaucoup d'entre eux ont sévèrement jugée. La publication, en février, du courageux rapport de la commission Kahane, qui définit les responsabilités gouvernementales et militaires des massacres dans les camps palestiniens de Sabra et Chatila, ne parvient pas à exorciser le doute qui ronge les consciences.

Le général Sharon, principal instigateur de l'invasion de juin 1982, est certes démis de ses fonctions de ministre de la Défense en février, mais il demeure, sans portefeuille, au gouvernement. Le général Eytan, chef d'état-major de l'armée quitte son poste le 19 avril, après que de hauts responsables militaires — dont le chef du Renseignement — ont été relevés.

Les partisans du mouvement La paix maintenant manifestent quotidiennement (un mort le 11 février). Des officiers et des soldats appelés à servir au Liban refusent. On tient ostensiblement le compte précis du nombre des victimes israéliennes de la guerre, qui s'élève à 517 morts au 30 août.

Du pénible débat qui s'est ainsi instauré dans l'opinion publique et qui n'est pas sans répercussions au sein de la diaspora juive, les Israéliens tirent le sentiment que, à la différence des autres guerres menées contre les Arabes, celle du Liban — contre les Palestiniens — offre un bilan plutôt négatif. Surtout, pour la première fois dans l'histoire d'Israël, les divergences manifestées à ce sujet entraînent des affrontements violents entre partisans et adversaires de la politique gouvernementale qui se reprochent mutuellement de trahir l'idéal sioniste et de faire le jeu de l'ennemi.

Dette extérieure

À cette crise morale s'ajoute une autre, d'ordre économique, permanente. L'année 1982 avait été marquée par une croissance zéro et une augmentation de 131,5 % de l'indice des prix. Malgré les efforts du ministre des Finances, Yoram Aridor, la situation demeure catastrophique. Selon un rapport du FMI, par ailleurs extrêmement critique à l'égard des « options libérales » du cabinet Begin, le déficit de la balance commerciale d'Israël doit atteindre, en 1983, quelque 5 300 millions de dollars et dépasser les 6 milliards en 1986. La dette extérieure, qui a augmenté de 15 % en 1982, se fixe autour de 20 900 millions de dollars, Israël devant rembourser pour la seule année 1983 pas moins de 5 200 millions de dollars, dont 1 200 millions à titre d'intérêts. Le service de la Dette représente, avec 10 %, le deuxième chapitre des dépenses de l'État, la Défense en absorbant 20 %. L'aide économique et militaire des États-Unis (2 600 millions de dollars en 1983) et les dons ou prêts de la diaspora constituent le principal rempart contre une éventuelle catastrophe, le Trésor israélien répugnant à adopter les mesures draconiennes qui s'imposeraient.