En revanche, les rapports entre la Libye et les pays du Maghreb, où le colonel Kadhafi joue la carte de la modération, se sont relativement assainies. Fin juin, le chef de la révolution libyenne s'est réconcilié avec le Maroc. Un mois plus tard, il rétablit les relations diplomatiques avec la Mauritanie et renforce la coopération avec la Tunisie à l'occasion de la réunion de la commission mixte tuniso-libyenne à Tripoli, le 19 juillet.

Le colonel Kadhafi demeure cependant isolé au sein du monde arabe, où il continue à préconiser des positions maximalistes en ce qui concerne le règlement de la crise du Proche-Orient. La Libye est le seul parmi les pays arabes, à l'exception de la Syrie, a avoir pris fait et cause pour les rebelles du Fath dans leur lutte contre Yasser Arafat et les « capitulards de l'OLP ». Les moyens de Tripoli sont cependant d'autant plus limités sur le théâtre moyen-oriental que les revenus tirés du pétrole ont considérablement diminué, obligeant la Jamahiriya à réviser en baisse la plupart de ses investissements non militaires.

Haïg Kirazian

Maroc

À nouveau le réalisme

Au terme d'un long et difficile processus, le Maroc, sans remettre en question ses options fondamentales, se montre disposé à favoriser l'établissement d'un climat propice tant à la stabilité intérieure qu'à la paix extérieure.

Rumeurs

La disparition brutale du général Ahmed Dlimi, le 25 janvier, dans un accident de voiture, donne lieu à des rumeurs et à des spéculations concernant les causes exactes de sa mort. Il est vrai que la personnalité même du défunt — énergique et talentueux commandant des théâtres d'opération du Sahara, directeur des Services de renseignements et chef des aides de camp du roi — en faisait un personnage de tout premier plan. Mêlé à l'affaire Ben Barka, en octobre 1965, mais acquitté par la justice française, collaborateur du général Oufkir dont il avait assuré la relève après la mort de celui-ci, demeurée quelque peu mystérieuse, à la suite de l'attentat contre l'avion du roi (16 août 1972), Ahmed Dlimi était devenu l'homme de confiance du roi Hassan II.

Certains, comme le correspondant du journal le Monde (expulsé), n'hésitent pas, en se référant à ce passé tumultueux et aux intrigues habituelles du palais, à développer la thèse de l'exécution d'un serviteur qui aurait trahi la confiance royale en s'associant aux préparatifs d'un nouveau coup d'État.

Dialogue

L'« affaire Dlimi » n'efface pas l'éclat donné à la visite officielle du président Mitterrand, arrivé au Maroc le 27 janvier. Celle-ci permet d'éclaircir les relations franco-marocaines à la suite de quelques craintes éprouvées par Rabat concernant la continuité de la politique française après mai 1981. La France reste, en effet, le premier partenaire commercial du royaume (25 % des achats et 22 % des ventes du Maroc), où 42 000 Français résident encore.

C'est d'ailleurs dans ces deux dernières perspectives que Hassan II et le président Chadli Bendjedid se retrouvent, le 26 février, pour un premier contact au sommet après sept années de brouille. Pour le souverain marocain, cette rencontre constitue une étape vers la solution des problèmes bilatéraux et la normalisation des rapports entre les deux pays, mais aussi un pas sur le chemin de l'édification du Grand Maghreb arabe, qui est, assure-t-il, « l'un des objectifs majeurs que nous nous sommes assignés depuis notre accession au trône » (discours du 3 mars).

Mais la grande surprise vient de la rencontre, le 30 juin, du colonel Kadhafi et du roi, nul n'oubliant les prises de position du premier lors des putschs avortés de 1971 et 1972 et l'appui apporté par la Libye au Polisario. La signature, en août, d'une série d'accords libyo-marocains semble, là aussi, marquer une nouvelle étape dans les relations entre les deux pays, après dix ans de querelles acrimonieuses.

Austérité

Le dialogue rétabli, au Maghreb surtout, par le palais est volontiers attribué aux difficultés économiques rencontrées par le Maroc du fait du poids de la guerre. Le royaume, frappé depuis quelques années par la sécheresse, la mévente du phosphate (principale richesse du pays), dont le prix a baissé de plus de 50 % en dix ans, et une démographie galopante (21 millions d'habitants recensés en septembre 1982), consacre à peu près 40 % de son budget à l'effort de guerre alors que sa dette extérieure représente 10 milliards de dollars. Le roi Hassan II doit se résoudre, en juillet, à soumettre à la Chambre un plan d'austérité prévoyant la réduction des dépenses publiques de 12 % et un accroissement de la pression fiscale.