Celles-ci, en effet, pourraient être mal accueillies par une opinion publique, que l'État a lui-même habituée à un certain bien-être, conformément aux thèses d'un néolibéralisme économique, cher à Menahem Begin, ainsi que pour des raisons électorales. La dévaluation constante du shekel par rapport au dollar et l'aggravation considérable du déficit de la balance commerciale font craindre une récession brutale et l'apparition du chômage, jusqu'à présent très réduit. Ces appréhensions, confortées par les critiques émises par la Banque d'Israël, expliquent, en partie, certains mouvements de protestation — ainsi la longue grève des médecins — et la baisse de popularité du Likoud.

Démission de Begin

Les conséquences intérieures de la guerre du Liban et la crise économique endémique mettent le gouvernement Begin dans une position peu confortable. Un sondage, en mai, prévoit même l'échec du Premier ministre et de sa coalition (majorité de 4 voix au Parlement) en cas d'élections anticipées. Devant le flot des contestations de tous ordres et de toutes origines, le gouvernement et son chef surtout donnent une impression d'indécision. Les critiques, dont Menahem Begin est l'objet au sein même d'un cabinet où Moshe Arens a remplacé Ariel Sharon à la Défense, mais où ce dernier reste très écouté, affaiblissent son autorité. L'élection, le 22 mars, du travailliste Haïm Herzog à la présidence de l'État est considérée comme un nouvel échec du Premier ministre.

On sait l'homme très affecté par la mort de sa femme en novembre 1982, par sa mise en cause personnelle dans le rapport Kahane et par le débat passionnel qui se développe en Israël à propos du Liban. Aussi, l'annonce de la démission de Menahem Begin, le 28 août, même si elle cause un choc chez ses partisans, ne constitue pas une véritable surprise. Malgré les pressions de son cabinet et de son parti, malgré quelques manifestations populaires de soutien, le Premier ministre maintient sa démission, remise officiellement au président Herzog le 15 septembre. Au Likoud, on s'active pour trouver un successeur. Itzhak Shamir est finalement désigné pour reconduire la coalition gouvernementale, après avoir été choisi par le parti Hérout.

Devenu, le 10 octobre, le septième Premier ministre d'Israël, I. Shamir fait face à la crise financière : dévaluation de 23 % du shekel et augmentation de 50 % du prix des produits de base. L'annonce, le 13 octobre, par le ministre des Finances de l'adoption du dollar comme monnaie officielle provoque une tempête politique et la démission de Y. Aridor, qui est remplacé par un faucon, partisan de la rigueur.

Portrait
Haïm Herzog un président modéré pour Israël

L'élection, le 22 mars 1983, de Haïm Herzog à la tête de l'État est volontiers interprétée comme un acte politique, malgré le caractère purement représentatif de la fonction présidentielle. Haïm Herzog, présenté par le parti travailliste, l'emporte en effet sur le candidat du Likoud, coalition dirigée par Menahem Begin.

Âgé de soixante-cinq ans, Haïm Herzog a une vie bien remplie, comme il sied à tous ceux qui ont participé de près à la création de l'État hébreu. Né en Irlande du Nord, il reçoit une éducation et une formation toutes britanniques : Cambridge et Sandhurst. Puis il rejoint la Palestine avant de servir, durant la Seconde Guerre mondiale, dans les forces alliées, sous les ordres du maréchal Montgomery. Sa vocation militaire et son attachement au sionisme le conduisent naturellement à regagner la Palestine pour y faire la guerre de 1948. Son nom reste attaché à la construction de la route stratégique qui, à travers la Judée, permettra aux forces juives de dégager Jérusalem. La guerre finie, il est nommé à la tête du renseignement militaire, dont il va faire un instrument redoutable.

Sa carrière militaire s'arrête en 1962. Il devient alors un brillant homme d'affaires, ce qui ne l'empêche pas de consacrer une partie de son temps à l'université et au journalisme. La guerre de juin 1967 le retrouve d'ailleurs comme porte-parole officiel du gouvernement. Remarqué à cette occasion, tant en Israël qu'à l'étranger, il accepte sa nomination comme ambassadeur à l'ONU, où il mettra à profit ses qualités de juriste et sa foi dans le sionisme pour défendre la cause de l'État juif, souvent malmené dans l'enceinte internationale.