Le cabinet — remanié le 30 novembre au profit de la faction Tanaka du parti libéral démocrate au pouvoir — opte pour une croissance de 8,4 % en 1982. Cet objectif est essentiellement axé sur la progression des exportations, stimulées par la baisse du yen.

La balance commerciale dégage en 1981-82 un excédent de 9,2 milliards de dollars. Les principales victimes sont les partenaires américains (l'excédent en faveur du Japon dépasse 14 milliards de dollars) et européens (plus de 10 milliards de dollars). En revanche, l'archipel n'importe pas plus de produits manufacturés que la Suisse !

Invasion

Les Japonais contrôlent, en 1981, 20 % du marché automobile aux États-Unis et 10 % en Europe. Cette véritable invasion suscite une levée de boucliers ; Washington menace Tokyo de mesures protectionnistes, en décembre 1981 ; les Dix saisissent en mars 1982 le GATT.

Toyota et Nissan finissent par accepter de réduire leurs exportations. Mais (avec une croissance de plus de 100 % en 1981) l'électronique nippone — magnétoscopes, jeux, circuits intégrés, informatique, robotique, etc. — prend la relève de l'automobile.

En France, où le déficit commercial avec le Japon atteint plus de 5,5 milliards de F en 1981 et où les Nippons contrôlent 40 % du marché de la télévision en couleurs, Michel Jobert, ministre du Commerce extérieur, n'hésite pas à déclarer en octobre 1981 : « Nous avons atteint les limites de l'intolérable. » À la bonne volonté de François Mitterrand, premier chef d'État français à se rendre au Japon, qui rencontre le 15 avril 1982 Hiro-Hito, dernier empereur de la planète, Tokyo répond en... facilitant les importations de cognac et de croissants français !

Le Premier ministre Suzuki paraît satisfait des maigres résultats des sommets des sept Grands, à Ottawa (juillet 1981) et à Versailles (juin 1982) : du moins le Japon n'aura-t-il pas été mis sur la sellette.

Agacé par les réactions des Occidentaux, un haut fonctionnaire du ministère du Commerce et de l'Industrie a menacé, le 24 mars 1982, d'accroître considérablement les échanges avec l'Est et de développer une industrie d'armement résolument tournée vers l'exportation.

Chine

Tokyo apparaît de plus en plus comme l'ami, le fournisseur privilégié de la Chine. Le Japon accapare le quart du commerce extérieur chinois, et les échanges entre les deux pays atteignent plus de 10 milliards de dollars en 1981. Tokyo octroie à Pékin, en février 1982, 1,6 milliard de dollars de crédits et le Premier ministre chinois Zhao Ziyang se rend fin mai dans la capitale japonaise.

Parallèlement, Tokyo lance une offensive de charme en direction du tiers monde. La firme Suzuki présente, en août 1981, ses excuses, pour avoir fait paraître « par erreur » une publicité désobligeante pour les pays arabes. Attitude guère surprenante quand on sait que l'Arabie Saoudite, qui fournit à l'archipel plus de 45 % de son pétrole, y investit en outre massivement ses pétrodollars.

Les seules augmentations prévues dans le budget japonais de 1982 sont les dépenses consacrées au tiers monde et celles qui concernent la Défense nationale (+ 7,7 %).

Nucléaire

Les questions militaires divisent le pays (Journal de l'année 1980-81). Sous la pression des États-Unis, qui cherchent à associer plus étroitement Tokyo à la défense de l'Occident, le parti libéral démocrate présente en mai 1982 un projet visant à modifier l'article 9 de la Constitution, qui interdit notamment au Japon le droit de belligérance.

Une controverse oppose Tokyo à la Corée du Sud, qui lui réclame un prêt de 6 milliards de dollars destiné à faire face à la menace nord-coréenne. D'importantes manifestations antimilitaristes et antinucléaires se déroulent dans la capitale, notamment lors de la visite de François Mitterrand, et le 23 mai 1982, marqué par un défilé de plusieurs centaines de milliers de personnes.

Le scandale de la baie de Minamata (Japon méridional) rebondit avec la découverte, fin 1981, d'importantes traces de mercure dans la faune marine. La consommation de poisson contaminé par des déchets — déversés dans la baie par des usines d'engrais — a provoqué depuis 1956 la mort de 234 personnes et laissé de graves séquelles chez 10 000 autres.