Constituée à l'issue de longues et difficiles négociations, la commission d'enquête internationale, composée de Andres Aguilar, ancien ambassadeur du Venezuela aux Nations unies, Bedjaoui, représentant de l'Algérie à l'ONU, Daoudy, conseiller du président Assad de Syrie, Jayenwardene, frère du président de Sri Lanka, et de Me Petiti, ancien bâtonnier de l'ordre des avocats à Paris, se rend le 23 février à Téhéran. Mais son mandat demeure ambigu. Kurt Waldheim avait défini sa mission en précisant qu'elle aurait pour tâche d'« entendre les griefs iraniens et contribuer à une solution de la crise dans les meilleurs délais ». Pour le secrétaire général de l'ONU, ainsi que pour Washington, l'enquête ne devrait être qu'une simple formalité devant conduire à une normalisation des rapports américano-iraniens, tandis que, pour l'imam Khomeiny, elle doit servir essentiellement à dénoncer « les crimes de l'impérialisme américain et du chah ».

Désireux de se débarrasser d'une situation qui entretient l'agitation et l'instabilité dans le pays, Bani Sadr n'exclut pas pour sa part une solution à l'amiable qui permettrait de lever rapidement l'hypothèque des otages. Il souhaite toutefois que Washington fasse un geste de conciliation en admettant théoriquement les responsabilités passées des États-Unis, notamment en s'engageant à ne plus s'ingérer dans les affaires iraniennes et à ne plus faire obstacle à l'extradition du chah et à la restitution de sa fortune. Dans son action, Bani Sadr est appuyé par Sadegh Ghotbzadeh, qui va même jusqu'à affirmer qu'il n'hésiterait pas si nécessaire à recourir à la force pour contraindre les étudiants islamiques à relâcher leurs otages.

Intransigeance

Sans aller jusqu'à cette extrémité, Bani Sadr estime que le Conseil de la révolution devra faire preuve de suffisamment de fermeté pour imposer sa volonté. Mais cet organisme est pratiquement paralysé par ses dissensions : certains de ses membres veulent en finir une fois pour toutes avec l'intransigeance des étudiants islamiques, mais la majorité demeure solidaire de ceux qui « suivent la ligne de l'imam » par conviction ou par calcul électoral. L'imam Khomeiny, lui, observe un silence énigmatique, se bornant à déclarer que « le sort des otages sera tranché par le nouveau Parlement ».

Après une investigation de près de 17 jours, la commission internationale quitte Téhéran le 11 mars, sans avoir réussi à rencontrer les otages. Trois jours plus tard, le président Carter accuse les dirigeants iraniens d'avoir manqué aux engagements qu'ils avaient pris, tout en exprimant l'espoir que l'élection d'une assemblée à Téhéran permettra d'améliorer la situation. Vain souhait. Les partisans de Bani Sadr, déjà affaiblis par l'échec de la mission de l'ONU, subissent une nette défaite au cours du premier tour des élections législatives qui donne une confortable avance aux candidats du PRI.

Les nombreuses « irrégularités, pressions, fraudes et violences » qui ont entaché la consultation éliminent pratiquement de la compétition les groupes laïques et de gauche. Le parti de Bani Sadr est pour sa part la victime de la machine électorale parfaitement huilée mise en place par le clergé, qui souhaite prendre sa revanche après la défaite qu'il a subie au cours de l'élection présidentielle. Sans attendre les résultats de l'enquête sur les fraudes électorales, l'imam Khomeiny proclame le 20 mars que la consultation s'est déroulée, à quelques exceptions près, d'une manière équitable, donnant ainsi sa caution aux élus du Parti républicain.

Rupture

Le départ du chah du Panama pour l'Égypte le 24 mars, organisé avec le concours des Américains, quelques heures à peine avant que l'Iran ne puisse déposer le dossier justifiant son extradition, porte un nouveau coup sévère à la crédibilité des efforts entrepris par Bani Sadr et Ghotbzadeh en vue de trouver une solution de compromis. Les étudiants islamiques dénoncent la « perfidie » de Washington et renouvellent leurs critiques à rencontre de l'action du président de la République et du chef de la diplomatie.