Paris a eu moins de chance. Les vestiges romains et médiévaux découverts sous le parvis de Notre-Dame, ceux de la rue Soufflot, seront sacrifiés. De même ont été sacrifiés les pavillons de Baltard, aux Halles, dont la conservation était demandée par les plus hautes compétences de l'histoire et de l'architecture. Tout au plus l'un d'entre eux sera-t-il démonté et reconstruit, mais hors de Paris et dans un endroit qui reste à déterminer.

En Provence, la campagne lancée pour protester contre la mise en exploitation du célèbre site des Baux a échoué. Une société minière exploitera les gisements de bauxite qu'elle y possède. Les assurances qu'elle a prodiguées n'ont pas entièrement tranquillisé les défenseurs d'un des sites archéologiques et naturels les plus extraordinaires de France.

Hors de France, la situation n'est pas moins grave pour de nombreux sites archéologiques.

Selon le correspondant du quotidien Le Monde, Rome, dans un rayon de dix kilomètres autour du Capitole, aurait perdu depuis vingt ans 20 villes archaïques, 20 thermes, 40 sanctuaires, 25 ponts, 25 kilomètres de voies antiques, 11 aqueducs et 2 500 tombes ou mausolées...

Athènes est menacée dans son cœur. On envisage de construire autour de l'Acropole une rocade bordée d'immeubles élevés, ce qui conduirait à un véritable saccage du site et à des destructions massives dans le vieux quartier de Plaka, un des attraits de la ville.

Trois experts envoyés par l'Unesco à la demande du gouvernement grec avaient déposé un rapport en 1968 : tous les monuments de l'Acropole étaient gravement menacés par le soufre des fumées industrielles. Les experts recommandaient l'enlèvement immédiat des cariatides, qui se trouvent « dans un état dramatique ». La frise du temple d'Athéna Nikê et celle des Panathénées devaient également être déposées.

Le moyen le plus efficace de ralentir la corrosion serait de laver chaque année soigneusement les monuments. Des travaux préalables ont commencé. L'Institut géographique national de Paris a été chargé d'effectuer la photogrammétrie intégrale de l'Acropole et de ses monuments. Une première mission s'est rendue à Athènes à la fin de 1971.

Pour Venise, que l'on croyait irrémédiablement condamnée, un espoir est né. Les autorités italiennes ont enfin accepté de participer au financement du plan de l'Unesco pour mettre hors d'atteinte les édifices menacés et contrôler la circulation des eaux perturbée par les activités industrielles.

À Angkor, devenue zone d'opérations militaires, les travaux de restauration des célèbres temples ont dû être stoppés. Ils servent d'asile aux réfugiés.

Pour Philæ, menacée de submersion par la construction du barrage d'Assouan, on attend encore les fonds qui permettront de commencer les travaux de démontage, de transfert et de reconstruction sur une autre île.

À Java, le célèbre monument de Boroboudour est menacé d'effondrement. Il devrait être en grande partie démonté puis remonté sur des dalles de béton. Il faudrait aussi traiter ses frises et ses statues rongées par les micro-organismes. Mais cela coûterait plus de huit millions de dollars...

Un problème différent mais tout aussi sérieux est posé par les peintures murales des grottes préhistoriques. L'exemple dramatique de Lascaux montre qu'il faut les protéger contre les perturbations causées principalement par les visiteurs. Les nouvelles salles de Niaux avaient été scellées peu après leur découverte en décembre 1970. On a fait de même au début de 1972 pour la grotte du Fontanet, dans l'Ariège, où des peintures ainsi que des traces de pas préhistoriques avaient été découverts.

Quant à la grotte de Lascaux, il est probable que sa fermeture au public sera définitive. On envisage d'en construire une reproduction, une réplique, qui, elle, sera accessible aux visiteurs. C'est peut-être la solution qu'il faudra désormais adopter si l'on veut sauver les précieux vestiges de l'art préhistorique...

Sociologie

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