Création

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de mythologie grecque et romaine ».

Origine du monde telle que la relatent différents mythes cosmogoniques, différentes genèses.

1. Le mythe Olympien

Le Chaos. Avant que n'existent la mer, la terre et le ciel, la nature offre une apparence unique : le Chaos, qui est, selon Hésiode, « abîme », « béance », laquelle, selon Aristote, est propre à recevoir un contenu. Ovide, imaginant le Chaos comme masse informe et confuse, se conforme en tous points à la théorie stoïcienne ; selon lui, la Terre manque de consistance et la mer de fluidité jusqu'à ce qu'un dieu (qui n'est pas identifié) démêle tous les éléments et assigne à chacun sa place, créant ainsi l'harmonie et la paix.

Ce vide, ce désordre ténébreux est néanmoins ressenti comme une divinité. Il faut que cela soit ainsi pour que, d'une cosmogonie, on passe à la théogonie.

Chaos engendre la Nuit Noire et l'Érèbe : tous deux s'unissent et enfantent l'Amour (Éros). Naissent ainsi la Lumière et le Jour, puis l'Éther. La Terre (Gaia) succède au Chaos et, seule, engendre le Ciel (Ouranos), un être immense capable de la couvrir tout entière et d'assurer aux dieux une demeure à jamais inébranlable. Ce sont les parents (mère, père) de la première race des dieux.

Voir aussi : Ouranos, Gaia

Les Titans. Parmi les enfants d'Ouranos et de Gaia, les plus célèbres sont les six Titans (Coéos [parfois écrit Cœos], Crios, Cronos, Hypérion, Japet, Océan) et leurs sœurs, les six Titanides (Mnémosyne, Phœbé, Rhéa, Théia, Thémis, Téthys) ; Gaia engendre ensuite trois Cyclopes, Brontès, Stéropès et Argès, artisans de la foudre et du tonnerre ; puis naissent les Hécatonchires (hécaton, « cent » ; cheir-, « main »), Cottos, Briarée et Gygès, appelés également Centimanes, pourvus, comme leur nom grec ou latin l'indique, de cent bras (et mains).

Craignant cependant d'être détrôné par l'un de ses enfants, Ouranos les enfouit, l'un après l'autre, à mesure qu'ils naissent, au plus profond de Gaia. N'en pouvant plus d'étouffer, Gaia les exhorte à la révolte : l'un d'entre eux, le plus jeune, Cronos, a le courage d'accepter la faucille que lui tend sa mère et, œdipien avant l'heure, il tranche les organes génitaux d'Ouranos, alors que celui-ci fait l'amour avec sa mère. La Terre et le Ciel se séparent. Fécondée par les éclaboussures de sang, Gaia enfante les Érinyes, les vingt-quatre Géants et les Méliennes, c'est-à-dire les nymphes des frênes.

Le sperme d'Ouranos est tombé dans la mer, qu'il a fécondée : ainsi naît Aphrodite, déesse de la sensualité et de l'amour, qui manquaient tant alors. Mais sans doute le pouvoir lui manque-t-il encore, car comment expliquer les incestes ? Gaia, libérée d'Ouranos, s'unit avec son fils Pontos, qui la rend mère des divinités marines : Céto, Eurybie, Nérée, Phorcys, Thaumas.

Cronos, lui, fait l'amour avec sa sœur Rhéa : elle met au monde Hestia, Déméter, Héra, Hadès, Poséidon. Redoutant, à l'instar de son père, d'être détrôné par l'un de ses descendants, et se rappelant sans doute qu'on ne peut pas faire confiance à une femme, fût-elle sa mère ou son épouse, Cronos enfouit ses enfants au plus profond de lui-même, en les avalant dès qu'ils naissent. Quant aux Cyclopes et aux Hécatonchires, il les expédie dans le Tartare, la région la plus basse des Enfers. De nouveau enceinte, Rhéa, voulant préserver son sixième bébé, se réfugie en Crète ; Zeus y naît, dans une grotte, et Rhéa en confie la garde aux Curètes entre autres. À son frère de mari, qui réclame le bébé à dévorer, Rhéa donne, enveloppée dans un linge, une pierre.

Voir aussi : Cronos

Zeus accède au pouvoir. Zeus, ayant grandi, perpétue la tradition : aidé par l'Océanide Métis, Zeus contraint son père à vomir ses frères ; puis, avec eux, et avec les Cyclopes et les Hécatonchires tirés du Tartare pour l'occasion, il mène une guerre sans pitié contre Cronos et les Titans. Après dix années de « titanomachie », Zeus et ses alliés obtiennent la victoire : les Titans sont précipités dans le Tartare et confiés à la garde des Hécatonchires.

Mais l'attrait du pouvoir est tel que les Géants s'en prennent eux aussi aux dieux, exhortés par Gaia dont le désir semble être de vouloir venger ses fils. La « gigantomachie » est un combat extraordinaire, auquel participent tous les Olympiens.

Après la mort des Géants, Zeus règne en maître sur l'Olympe et sur les mortels. Il offre l'empire de la mer à Poséidon, celui des enfers à Hadès. Les dieux ne sont plus ce qu'il convient d'appeler des divinités primordiales, des éléments qui se bousculent. Le monde s'organise sous les Olympiens.

Voir aussi : Religion des Grecs

2. Le mythe pélasgique

Eurynomé naît du Chaos et, afin de pouvoir se déplacer, elle sépare la mer et le ciel. Ophion, le serpent, la voyant si gracieuse, s'enflamme de désir et s'unit à elle. Eurynomé pond bientôt un œuf, qu'Ophion lui-même, en s'enroulant autour, se charge de faire éclore. Il en sort la nature universelle : la végétation terrestre, les astres, les fleuves... ainsi que les êtres vivants.

Eurynomé et Ophion se retirent sur le mont Olympe. Comme Ophion prétend être le créateur de l'Univers, Eurynomé le précipite au plus sombre de la Terre. Elle crée ensuite sept planètes et, à la tête de chacune, elle place un Titan, ou une Titanide : le Soleil, gouverné par Théia et Hypérion ; la Lune, par Phoebé et Atlas ; Mars, par Dioné et Crios ; Mercure, par Métis et Coéos ; Jupiter, par Thémis et Eurymédon ; Vénus, par Téthys et Océanos ; Saturne, par Rhéa et Cronos.

Le premier être humain est Pélasgos ; enfant de la terre d'Arcadie, il enseigne bientôt à ses sujets les rudiments de la civilisation.

Voir aussi : Pélasgos

La création

C'est au Chaos d'abord qu'appartint l'existence,

Puis à la Terre, offrant dans son immensité

Un sol ferme où les dieux marchent en sûreté.

Au centre ténébreux de la Terre profonde,

Le Tartare naquit ; puis l'Amour vint au monde,

L'Amour qui, le plus beau des habitants des cieux,

Dérobe à leurs ennuis les mortels et les dieux,

Et rend de ses erreurs chacun d'eux tributaire.

Du Chaos vint la Nuit et l'Érèbe, son frère ;

Mais le frère à la sœur s'unit, et leur amour

Fit, d'un hymen fécond, naître l'Air et le Jour.

Puis la Terre engendra le Ciel aussi grand qu'elle,

Dôme aux étoiles d'or et voûte universelle

Que les dieux, en marchant, foulent sans l'ébranler.

On voit encor la Terre en montagnes s'enfler,

Aux nymphes, dans ses flancs, préparer un asile,

Et mettre au jour Pontus, dont la vague stérile

Court et dresse dans l'air son front comme un géant.

La Terre, avec le Ciel, engendra l'Océan,

Coeus, Hypérion, Créus et Mnémosyne,

Théa, Japet, Rhéa, Téthys, beauté divine,

Thémis, Phœbé, dont l'or couronne les cheveux,

Et, le dernier de tous, le plus rusé d'entre eux,

Saturne, l'ennemi, le fléau de son père.

L'Hymen fit naître encor du Ciel et de la Terre

Les Cyclopes, Argès, Bronte, et Stérops, tous trois,

Par le bras et le cœur, terribles à la fois ;

Du puissant Jupiter la foudre est leur ouvrage ;

Chacun d'eux n'a qu'un œil au sommet du visage,

Et le nom de Cyclope à chacun fut donné,

Pour cet œil, sur le front, en cercle, dessiné ;

Immense est leur vigueur, leur adresse admirable.

Hésiode