Agamemnon

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de mythologie grecque et romaine ».

L'une des principales figures de la Grèce antique. Selon les uns, il est le fils d'Atrée et le petit-fils de Pélops, et d'Aéropé ; selon d'autres, il est celui de Plisthène et d'Aéropé.
Roi des rois, fils d'Atrée, j'ai vengé la femme de mon frère, et je meurs des mains de la mienne. Que m'a servi de punir dans ma douleur le ravisseur d'Hélène, si Clytemnestre tue le vengeur de l'adultère ?
Agamemnon et son frère Ménélas sont élevés avec Égisthe, le fils de Thyeste, dans la maison d'Atrée. Atrée ayant été assassiné par Égisthe et Thyeste, Agamemnon se rend à Sparte avec Ménélas et épouse Clytemnestre, la fille de Tyndare, après avoir tué son premier mari, Tantale, et son fils. Elle lui donne quatre enfants : Iphigénie, Chrysothémis, Laodicée (appelée Électre par la suite), Oreste. Hélène, la sœur de Clytemnestre, se marie avec Ménélas.
Agamemnon succède à Thyeste. Il est roi de Mycènes, roi d'Amyclées, de Sparte, mais aussi, dans les textes postérieurs à ceux d'Homère, roi d'Argos.
Pâris enlève Hélène. Agamemnon, désirant venger son frère qui lui demande son aide, monte une expédition contre Troie ; il en devient le commandant suprême : cette fonction lui revient de droit parce que, d'une part, c'est son frère qui a été lésé, d'autre part parce que, grâce à son immense fortune, il est considéré comme le plus grand roi de la Grèce. Il a sous ses ordres directs cent vaisseaux. Après de longues années de préparatifs, la flotte grecque mouille enfin dans le port d'Aulis, en Béotie, prête à prendre le large. Mais Agamemnon tue un cerf sacré, et tient ensuite des propos arrogants à l'égard d'Artémis ; ce comportement provoque la colère de la déesse. Comme châtiment, elle fait tomber les vents, empêchant ainsi la flotte grecque de mettre à la voile.
Le devin Calchas apprend à Agamemnon que le sacrifice de sa fille Iphigénie apaisera le courroux de la déesse. L'ambition du roi surpasse son chagrin. Il fait appeler Iphigénie, sous le prétexte qu'Achille désire l'épouser. Sur l'autel, alors qu'elle s'apprête à être égorgée, Iphigénie est enlevée par Artémis, qui lui substitue une biche, et emmène la jeune femme en Tauride. (Pyrrhos ou Néoptolème, le fils d'Achille, ne manquera pas de le rappeler lorsque Agamemnon s'opposera au sacrifice de Polyxène, réclamé par le roi de Thessalie.)
Voir aussi : Iphigénie, Polyxène
Les vents redevenus favorables, l'armée grecque part faire la guerre à Troie.
Voir aussi : Achille, Troie, cheval de Troie
Le retour et la mort
Après bien des vicissitudes, notamment dans le camp grec, Troie, abandonnée par les dieux, capitule. Une querelle s'élève entre lui et Ménélas au moment de lever l'ancre : alors qu'Agamemnon tient à offrir des sacrifices à Athéna, Ménélas entend mettre à la voile sur-le-champ ; les offrandes accomplies, il se rend à Ténédos.
Agamemnon prend pour maîtresse Cassandre, fille de Priam. Ils ont deux enfants : Télédamos et Pélops. Cassandre, prophétesse remarquable, a été condamnée par Apollon à ne jamais être crue. Prévoyant les desseins meurtriers de Clytemnestre et d'Égisthe, elle supplie Agamemnon de ne pas retourner dans sa patrie. En vain. Avec le concours de vingt hommes à sa solde, Égisthe ourdit le complot. Agamemnon est tué au cours d'un festin. À Ulysse, descendu dans l'Hadès, l'ombre de l'Atride raconte comment sa « maudite femme » l'a fait périr d'une mort infamante, comment ses serviteurs ont été égorgés sans scrupules, comment le sang fumant ruisselle sur les tables et le sol ; combien le cri de Cassandre, égorgée elle aussi, a été un moment douloureux.
Selon certains, Clytemnestre a tué seule Agamemnon, sans l'aide d'Égisthe. Plus tard, Oreste venge son père en tuant Égisthe et Clytemnestre.
Voir aussi : Clytemnestre, Oreste
Apollodore livre un détail intéressant : Égisthe et Clytemnestre demandent à Agamemnon de passer un vêtement ; le roi s'exécute ; mais le vêtement n'a aucune ouverture, ni pour la tête, ni pour les bras : ainsi, la victime est prisonnière et, surtout, ne peut voir le coup fatal la frapper. De plus, les deux meurtriers (preuve supplémentaire de leur lâcheté ?) ne rencontrent pas le regard du grand Agamemnon.
Bien que doté de qualités inférieures à celle d'Achille ou même d'Ajax, Agamemnon reste une figure majeure dans la tradition épique grecque. Il est magnanime, chevaleresque, majestueux, puissant. Dans l'Iliade, ses yeux et sa tête sont comparés à ceux de Zeus ; sa poitrine à celle de Poséidon ; sa carrure à celle d'Arès. Il est fier, fort et veut le montrer ; à Achille, qui l'accuse d'abuser de son pouvoir, il réplique qu'il prendra de force la jeune Briséis uniquement pour lui montrer qu'il est le plus fort et pour qu'à l'avenir nul n'ose s'adresser à lui comme à un égal.
Dans la pièce d'Eschyle, qui porte son nom, c'est une figure simple (il refuse les honneurs – cyniques – que Clytemnestre veut lui faire) et sympathique et d'autant plus qu'il a face à lui une épouse virile, particulièrement sûre de soi et sans doute odieuse quand on sait le projet meurtrier qu'elle est sur le point de réaliser.
Variantes : Les causes de l'immobilisation de la flotte achéenne
I. Agamemnon avait fait vœu d'immoler à Artémis ce qui naîtrait de plus beau certaine année, qui s'est trouvée coïncider avec celle de la naissance d'Iphigénie, la plus belle. Aussi la sacrifie-t-il.
II. Agamemnon refuse de lever l'ancre, tant la mort de son ami Argynnos, qui s'est noyé dans le Céphise, l'a bouleversé. Et c'est à cause de ce retard qu'Iphigénie est immolée.
III. Artémis se montre très courroucée : les Grecs ont offert des sacrifices à tous les dieux, sauf à elle. Aussi provoque-t-elle une tempête qui met à mal la flotte d'Agamemnon. Sur les conseils de Calchas, on sacrifie à la déesse et la tempête cesse.
La mort d'Agamemnon
Debout près des cadavres d'Agamemnon et de Cassandre, Clytemnestre fait le récit de son crime.
clytemnestre. Après avoir longuement parlé tout à l'heure, comme il convenait à la circonstance, je ne rougirai point de me contredire. Comment, sans le mensonge, préparer la ruine d'un ennemi qui semble vous être cher ? Comment dissimuler le rets de malheur dont on l'enveloppe de façon à ce qu'il ne puisse échapper ? Il y a longtemps que je méditais ce coup qui devait venger une antique injure : à la fin, l'heure est venue, et je reste debout à l'endroit où j'ai frappé ; le forfait est accompli. J'ai fait en sorte, pourquoi le nier ? qu'il ne pût ni fuir ni se défendre. Un filet sans issue, comme à la pêche, l'enserre de toute part, riche tissu, fatal à sa vie. Deux fois je le frappe ; deux fois il gémit et laisse aller ses membres ; tombé, un troisième coup l'achève, et le Zeus souterrain, le gardien des morts, voit ses désirs comblés. C'est ainsi qu'il expire et qu'à terre le sang coule à flots de ses blessures ; rejaillissant sur moi en gouttes noires, la rosée du meurtre réjouit mon cœur, comme la pluie de Zeus fait le blé, dans la saison où l'épi sort de son enveloppe. Voilà ce qui s'est passé. Quant à vous qui êtes ici, vieillards d'Argos, vous m'approuverez si cela vous convient ; pour moi, je m'applaudis de mon acte. S'il était permis de faire des libations sur un cadavre, c'est ici qu'elles seraient légitimes ; que dis-je, elles seraient de toute justice. Cet homme avait comblé d'horreurs la coupe domestique ; lui-même, à son retour, il l'a vidée.
le coryphée. Nous admirons l'impudence de ta langue ô toi qui te vantes ainsi du meurtre de ton époux.
clytemnestre. Vous me prenez pour une femme sans résolution ; mais c'est d'un cœur ferme que je vous parle. Louange ou blâme, tous les discours, pour moi, ont la même valeur. Voilà Agamemnon, mon époux ; voici la main qui l'a frappé. L'ouvrage est d'une bonne ouvrière. J'ai dit.
Eschyle
