Oreste

Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de mythologie grecque et romaine ».

1. Fils d'Agamemnon et de Clytemnestre.
Lorsque Égisthe assassine Agamemnon, Oreste, encore enfant, est sauvé par sa nourrice Arsinoé (ou Laodamie). Sa sœur Électre le confie au roi de la Phocide, Strophios, qui est aussi son oncle. Oreste se lie d'amitié avec le prince Pylade et peut-être deviennent-ils amants. Lorsqu'il a atteint l'âge adulte, Oreste, sur les conseils d'Apollon, décide de venger le meurtre de son père.
Il retourne à Argos, ou à Sparte, se faisant passer pour un étranger venu annoncer la mort d'Oreste. Ayant gagné la confiance d'Égisthe, il peut mettre ses projets criminels à exécution. Il n'épargne pas non plus sa propre mère, Clytemnestre, devenue la femme d'Égisthe.
Mais comme pour le justifier, ou pour atténuer l'horreur du matricide, Eschyle lui fait dire qu'il n'a été que l'instrument d'Apollon, le dieu lui ayant promis l'impunité pour son crime, alors que s'il désobéit, le châtiment divin sera effroyable. On retrouve cette justification dans les Euménides (465 av. J.-C.) : « La responsabilité de ce meurtre, Loxias la partage avec moi. » Chez Sophocle, Oreste a beaucoup plus de personnalité et, partant, beaucoup moins de scrupules à accomplir la vengeance, qu'il considère comme un devoir sacré.
Pourtant Oreste est aussitôt la proie des Érinyes. Frappé de folie, il consulte l'oracle de Delphes. Apollon, qui ne l'a pas abandonné, lui conseille de se rendre en Tauride, d'y récupérer la statue d'Artémis Orthia, conservée par le roi Thoas, et de la rapporter à Athènes. Oreste et Pylade se rendent en Tauride. Là, les deux amis sont capturés par les Taures, qui ont coutume d'immoler tous les étrangers à la déesse. Or, il se trouve que la prêtresse préposée aux sacrifices est justement Iphigénie. Reconnaissant son frère, Iphigénie libère les deux suppliciés, et tous trois quittent la Tauride en emportant la statue. (Cette statue, égarée, est par la suite retrouvée par un certain Astrabacos qui, de l'avoir contemplée, en perd la raison.)
Voir aussi : Astrabacos
De retour dans le Péloponnèse, Oreste s'empare du trône de Mycènes autrefois occupé par son père. Il fait assassiner Néoptolème par les Delphiens, il épouse ensuite sa femme, Hermione, la fille de Ménélas. Mais un oracle l'incite à quitter Mycènes et à s'installer en Arcadie ; il y meurt des suites d'une morsure de serpent. Il est enseveli à Tégée. Les Lacédémoniens retrouvent son corps : il mesure plus de trois mètres.
Oreste a vécu quatre-vingt-dix ans et régné soixante-dix ans.
Chez Euripide, Oreste, en proie aux « Bienveillantes », aux « Faces de chiennes » (les Érinyes) attend, en compagnie d'Électre qui s'efforce de le consoler, le jugement des gens d'Argos : vont-ils tous deux être lapidés ou exilés ? Oreste implore l'aide de Ménélas qui la lui refuse. Pour se venger, le frère et la sœur, avec l'aide de leur ami Pylade, entreprennent d'assassiner Hélène. Mais celle-ci est enlevée sur l'ordre des dieux ; Oreste tourne alors son glaive contre Hermione afin de couvrir sa fuite. Apparaît Apollon qui dicte ses volontés à tous et rassure Oreste et Électre sur leur sort. Tout est bien qui finit bien : Hélène, immortelle, sera la compagne de Castor et Pollux pour le salut des marins ; Ménélas devra se choisir une autre épouse. Si Hélène est si belle, c'est uniquement pour que les Grecs et les Troyens s'affrontent et que cette guerre, avec ses nombreuses victimes, soulage la terre d'une population trop importante. Oreste devra quitter Argos pour l'Arcadie (Parrhasie), y demeurer une année puis retourner à Athènes où il sera jugé par les dieux et défendu par Apollon lui-même. Hermione deviendra sa femme ; quant à Néoptolème qui devait l'épouser, son destin est de périr à Delphes. Pylade épousera Électre. Oreste régnera sur Argos et Ménélas sur Sparte.
Variantes
I. Oreste éprouve beaucoup de scrupules à tuer sa mère, même si l'ombre de son père lui enjoint de le faire. Tout un tendre passé lui revient en mémoire, fait de pudeur, de respect, d'amour et d'honneur, de reconnaissance même envers cette femme qui l'a mis au monde : comment pourrait-il enfoncer une lame dans ce ventre qui l'a nourri ? Il faut alors l'influence de son ami Pylade, sa conviction, ses exhortations à la vengeance, pour qu'Oreste oublie (un peu vite, il vrai) ses scrupules et qu'il commette son crime.
II. Les Euménides lui apparaissent noires au moment même où elles lui font perdre la raison. Oreste, avec les dents, se coupe un doigt. Les Euménides deviennent blanches et il recouvre sa lucidité. Il offre alors deux sacrifices : l'un expiatoire aux Euménides noires, l'autre propitiatoire aux blanches.
III. Après avoir tué sa mère, Oreste est purifié, avant d'être jugé sur l'Aréopage. Cette purification a lieu soit à Delphes, et dans ce cas effectuée par Apollon lui-même, soit à Trézène.
IV. Pour expier le meurtre de sa mère, Oreste se rend en Italie, avec Iphigénie et Pylade, entre Rhégium et Taurinum.
2. Fils d'Oreste et d'Hermione.
Après avoir tué sa mère, Oreste s'enfuit avec Hermione jusqu'en Émathie (Macédoine) ; leur enfant, nommé lui aussi Oreste, demeure dans la région. Adulte, il conquiert le territoire qui s'étend entre la Macédoine et la mer Adriatique ; il appelle Orestide la région sur laquelle il règne.
Oreste et Clytemnestre
clytemnestre. Je t'ai nourri ; laisse-moi vieillir.
oreste. Auprès de moi, vous, qui avez tué mon père ?
clytemnestre. La faute, mon fils, est au Destin.
oreste. Le Destin aussi a décidé votre mort.
clytemnestre. Crains les imprécations d'une mère, ô mon fils !
oreste. Votre fils ! vous l'avez rejeté, précipité dans l'infortune.
clytemnestre. Oh ! non ; mais envoyé dans une maison amie.
oreste. On m'a vendu, doublement vendu, moi, le fils d'un père libre.
clytemnestre. Eh ! quel prix m'en est revenu ?
oreste. Je rougirais de le dire.
clytemnestre. Dis ; mais les torts de ton père, il faut les dire aussi. [...] Mon fils, tu veux donc tuer ta mère ?
oreste. C'est par vous, non par moi, que vous périssez.
clytemnestre. Songe aux chiens vengeurs d'une mère.
oreste. Et ceux d'un père, où les fuir, si je l'oublie ?
clytemnestre. En vain je pleure, je supplie, vivante encore ; c'est parler à la tombe.
oreste. Le destin de mon père a réglé votre sort.
clytemnestre. Hélas ! c'est bien un serpent que j'ai nourri ! Il n'était que trop vrai, mon effroyable songe !
oreste. Ce que vous avez fait vous-même, c'est votre tour de le souffrir.
Eschyle
