Au xvie siècle, les fondateurs de la ville n'avaient que faire des plages. De la célèbre baie de Guanabara ils n'avaient vu que le port naturel magnifiquement protégé de toute incursion par un goulot d'étranglement qui mettrait en péril le moindre intrus. Deux forts y interdiraient son accès aux corsaires et aux vaisseaux ennemis. L'histoire leur a donné raison. À l'exception de l'expédition vengeresse de Duguay-Trouin, menée en 1711 contre la ville et le port de Rio, ceux-ci resteront imprenables.

Découverte en 1502 par une caravelle d'Amerigo Vespucci, la baie de Guanabara, célèbre par sa presqu'île en forme de sphinx à tête de pain de sucre, n'a été occupée par les Portugais qu'à partir de 1567, après qu'ils en ont chassé des huguenots français qui y avaient fondé une petite colonie. Ce n'est que deux siècles après sa fondation que Rio de Janeiro est devenue la capitale du Brésil, en 1763. Elle le restera jusqu'en 1960.

De nos jours, un téléphérique mène les visiteurs au sommet du Pao de Açucar, le Pain de sucre, à 400 m d'altitude. De la table d'orientation, on embrasse du regard une vue exceptionnelle permettant d'admirer la baie et ses îles, le pont Rio-Niteroi long de 13 km, enfin les plages de Botafogo, d'Urca et de Leme surplombées par le pic Corcovado. Tous les guides de Rio conseillent l'ascension au sommet de ce pic haut de 710 m. On y accède sans fatigue par un pittoresque funiculaire à crémaillère installé en 1884. Il assure cette ascension en une petite demi-heure. Du Corcovado, la majestueuse plage de Copacabana étale tous ses charmes.

Les rues sinueuses et étroites du vieux Rio contrastent avec la forêt de gratte-ciel du quartier des affaires qui les jouxte de toutes parts. Transformées en restaurants, des maisons du xviiie et du xixe siècle, qui bordent les rues, absorbent à l'heure des repas les employés des hautes tours et les touristes venus admirer les « azulejos » de faïence des vieilles demeures.

Rio est aussi un haut lieu de l'art baroque d'outre-Atlantique. Témoins de la grande époque de l'exploitation des mines d'or, les églises éblouissent par l'ostentation de leurs richesses. Une des trois églises « tout en or » que compte le Brésil se trouve dans l'enceinte du monastère de São Bento, construit au xviie siècle sur une des collines dominant le port. La plus vieille et la plus populaire est sans conteste l'église du couvent de Santo Antonio. Elle fait face et semble toiser celle de Saint-François-de-la-Pénitence, que le petit peuple carioca a surnommée « le saint Antoine des riches », à cause du luxe de ses marbres, de son mobilier en palissandre, de ses boiseries recouvertes de feuilles d'or et de ses peintures en trompe-l'œil. Parmi les innombrables curiosités qu'offre la ville figurent le Jardin botanique, créé en 1808 par le futur roi Juan VI, que l'on compare à une cathédrale végétale, et le stade de Maracaña, le plus grand du monde avec ses 170 000 places et l'ombre de ses prestigieux footballeurs : Garrincha, Pelé et Ronaldo.

Le carnaval de Rio

Chaque année, le Carnaval est l'occasion à Rio d'un fantastique défilé des écoles de samba. Le spectacle offert est devenu une des grandes attractions populaires qui soient au monde. À cette période, les hôtels sont bondés et la ville est envahie par une foule de touristes. À cause de l'ingéniosité des écoles rivales à se costumer et de la beauté des parures exhibées par chaque groupe, la grande parade remporte depuis plusieurs décennies un immense succès auprès des spectateurs, entassés dans les tribunes en gradins implantées sur une des plus belles avenues de la ville.

Brasília, la capitale du xxie siècle

Au Brésil, le xxie siècle a commencé dès la fin des années 1950, quand le président Juscelino Kubitschek, élu en 1955, a pris la décision de transférer la capitale au centre du Brésil et par conséquent de bâtir une ville nouvelle. Trois hommes ont uni leurs efforts pour doter la fédération brésilienne d'une capitale qui soit à sa démesure : l'urbaniste Lucio Costa, qui dessina le plan-pilote de Brasília, l'architecte Oscar Niemeyer, qui conçut la majorité des bâtiments, et l'entrepreneur Israël Pinheiro, qui fut chargé de la réalisation des travaux.

Le premier ouvrage livré fut le palais de la Présidence, afin de permettre au chef de l'État de passer le pouvoir à son successeur, Janio Quadros, à Brasília même. Peu à peu, le rêve d'un président est devenu la fierté d'un peuple et d'une nation. La fête de l'inauguration s'est tenue le 21 avril 1960. Brasília compte aujourd'hui un million d'habitants. Elle est à 1 100 km de Rio, 1 000 km de São Paulo, à 1 500 km de Salvador de Bahia et à 2 000 km de Belém.

Bernard Lehembre
Historien