L'Europe ne semble pas non plus être un sujet de consensus entre les deux hommes. Le leader du New Labour serait plutôt à ranger dans le camp des eurosceptiques et si Lionel Jospin, européen lucide, émet des réserves sur les modalités pour arriver à la monnaie unique, elles paraissent bien timides par rapport aux obstacles mis outre-Manche (vote aux Communes, référendum). N'empêche, en dépit de ces oppositions, le tandem Blair-Jospin pourrait faire progresser l'Europe sociale. Le Britannique, dont le pays prendra la présidence de l'Union européenne en juin 1998, a déjà annoncé, à Malmö, lors du congrès des Partis socialistes européens, sa volonté de s'attaquer au chômage (18 millions de personnes dans l'UE). N'a-t-il pas fait adhérer son pays à la Charte sociale européenne ? Ce qui laisse à penser à Lionel Jospin que tout n'est pas si mauvais chez son jeune homologue de Londres !

B. M.

Les femmes dans la politique française

Avec 11 % d'élues dans la nouvelle Assemblée nationale, la France est encore loin de la parité entre les hommes et les femmes. Au moins, notre pays n'est-il plus la lanterne rouge de l'Europe dans ce domaine. Et si, aujourd'hui encore, 5 % seulement des municipalités sont dirigées par des femmes, l'arrivée en nombre de représentantes du deuxième sexe, et à des postes clés, dans le gouvernement Jospin marque un vrai tournant.

Aux dernières élections européennes, Michel Rocard, sans grand succès, avait inventé le concept « chabadabada » alternant un homme et une femme sur sa liste. En 1995, Alain Juppé inventait celui des « juppettes » en prenant douze femmes dans son gouvernement avant... d'en renvoyer huit sans ménagement quelques mois plus tard ! La mode était alors aux quotas : il fallait des femmes comme caution pour faire oublier que la politique était... une affaire d'hommes. Elles servaient ni plus ni moins d'alibi. N'avait-il pas fallu attendre 1945 pour leur donner le droit de vote et d'éligibilité ? 1965, pour que leur mari ne s'oppose plus à l'exercice de leur activité professionnelle ? 1982 pour qu'une loi leur donne accès à la fonction publique et, un an plus tard, à l'égalité professionnelle ?

Paradoxalement, c'est la déconfiture du PS en 1993 qui va accélérer la féminisation de la vie politique. Les ténors sont battus et en 1995, quand il reprend les rênes du parti de François Mitterrand, Lionel Jospin va les imposer à des postes clés. Il s'agit de renouveler le PS et de lui donner une nouvelle crédibilité en rompant avec les pratiques passées. Le premier secrétaire de l'époque, fort de son score à la présidentielle qui le désigne comme le leader naturel de la gauche, va mettre toute son autorité dans la féminisation de la vie politique.

Des quotas à la parité

En dépit des réticences, il décide de présenter 30 % de femmes aux élections législatives. Mieux, pour mettre « le droit en accord avec les mœurs », il inscrit la parité dans le programme socialiste. Le pari est risqué mais gagnant. En dépit de leur manque de notoriété, les femmes apportent un souffle nouveau, un souffle de modernité et de moralité de la vie politique lors des élections provoquées par la dissolution voulue par Jacques Chirac. Nommé à Matignon, Lionel Jospin poursuivra sur sa lancée en leur confiant six ministères et deux secrétariats d'État, avec deux femmes en tête de l'ordre protocolaire d'un gouvernement resserré de 26 membres : Martine Aubry, ministre de l'Emploi et de la Solidarité, et Élisabeth Guigou, garde des Sceaux.

Sur ce terrain et alors que, à son tour, la droite désorientée après son revers électoral est en pleine refondation, RPR et UDF sont obligés de suivre le mouvement. Un mouvement de longue haleine où le volontarisme reste nécessaire. Si, aujourd'hui, avec 8 femmes ministres et 59 élues à l'Assemblée nationale, la France n'est plus la lanterne rouge de l'Europe derrière la Grèce, le chemin de la parité reste long à parcourir.

B. M.

Les femmes au gouvernement :

1936. Trois sous-secrétaires d'État nommées dans le gouvernement du Front populaire.