Journal de l'année Édition 1991 1991Éd. 1991

Finale retour (Avellino, 16 mai), Fiorentina et Juventus Turin 0-0.

Lev Yachine : le dernier envol de l'Araignée noire

Toujours vêtu de noir, la casquette vissée sur la tête, des bras interminables, les mains d'une grandeur impressionnante, c'était l'Araignée noire, certainement le plus célèbre de tous les gardiens de but du monde. Lev Yachine est mort d'un cancer le 21 mars à Moscou à l'âge de 60 ans. Il était né à Moscou en 1929.

Pendant les 22 années de sa carrière, Yachine (1,85 m pour 83 kg au temps de sa splendeur) ne connut qu'un seul club, le Dynamo de Moscou, avec lequel il fut six fois champion d'URSS (1945, 1949, 1954, 1955, 1957 et 1959). Avec la sélection soviétique (75 caps), il remporta la médaille d'or olympique en 1956, à Melbourne, et enleva en 1960 la première Coupe d'Europe des Nations face à la Yougoslavie (2-1), dans l'ancien Parc des Princes. Grâce à lui, l'URSS aura été également quart-de-finaliste de la Coupe du monde en 1958 et en 1962, puis demi-finaliste en 1966 Retenu trois fois dans l'équipe du monde, il fit ses adieux à la compétition en 1972, avant de diriger le Dynamo de Moscou. À quelques semaines de sa disparition, il était devenu le premier champion soviétique à être nommé héros du travail socialiste.

Mais son influence sur le football s'étend bien au-delà de son propre pays. Ses sorties téméraires hors de la surface de réparation, ses réflexes fulgurants, son jeu intelligent et adroit captivaient les spectateurs et ont inspiré toute une génération de portiers. Ses tactiques inédites transformèrent l'image traditionnelle du goal. Au lieu d'être l'homme immanquablement figé sur sa ligne, il devint une figure clé, tout aussi capable de lancer une attaque que de se cantonner dans la défense. À ce jour, il reste d'ailleurs le seul gardien de but à avoir gagné le « ballon d'or » (1963), trophée attribué par l'hebdomadaire France Football et qui désigne le meilleur footballeur européen de la saison. Comme il ajoutait à cette rare panoplie de qualités une modestie que rien ne paraissait devoir entamer, il était on ne peut plus naturel que le public de tous les pays, hors de tout nationalisme et de tout chauvinisme, s'assimile à lui et en fasse un héros.

Golf

Faldo, le nouveau Nicklaus

Grâce à ses deux succès au British Open et à l'US Masters, Nick Faldo est devenu à 33 ans le numéro 1 mondial. Un seul coup raté lors du dernier US Open l'a même provisoirement privé de l'occasion de réussir le premier grand chelem de l'après-guerre. Selon Jack Nicklaus, le golfeur du siècle, le champion britannique a toutes les qualités pour lui succéder. Au moment précis où Severiano Ballesteros paraît précocement vieilli par l'intensité de son jeu, le monde du golf s'est découvert une nouvelle tête d'affiche.

Totalement introverti, Nick Faldo s'est, en effet, donné corps et âme à son sport. Sur un parcours il ne parle pas si ce n'est à sa cadette. Monstre de sang froid, il est apparemment insensible aux conditions extérieures et reste imperturbable. D'une précision diabolique dans le petit jeu, il est d'une régularité de métronome, ne donnant aucun point à ses adversaires. Mécanique bien huilée, véritable machine à frapper des balles, il est à bien des égards l'émule du joueur de tennis Ivan Lendl, à qui il peut être comparé. Avec ses quatre titres majeurs, dont un doublé aux Masters (1989 et 1990), il est plus que jamais sur les sentiers de la gloire et ridiculise ce simulacre de classement mondial, qui ignore le lauréat du tournoi des professionnels américains (USPGA), l'Australien Wayne Brady, ainsi que le vétéran Hole Irwin (45 ans), vainqueur au 91e trou de l'US Open. Pareille victoire, venant après la sixième veste verte de Jack Nicklaus (1986) et l'épopée de Raymond Floyd (47 ans) au dernier Masters, ne suggère nullement que le golf est une discipline de vieux, car on a plutôt l'âge de sa passion. Elle démontre seulement que le golf de haut niveau, combat intense mais intérieur, exige un mental à toute épreuve dont l'âge tendre justement n'a jamais eu le monopole.