La technologie de tréfilage employée par Alsthom pour la fabrication des fils supraconducteurs au niobium vient d'être transférée au nouveau domaine des céramiques supraconductrices. En décembre 1988, les chercheurs de Marcoussis ont annoncé la mise au point des premiers microfilaments à base de composés Y-Ba-Cu-O enrobés dans une matrice de cuivre. De nouvelles applications s'ouvrent ainsi à la cryoélectricité, qui va s'affranchir des contraintes de l'hélium. Les futurs TGV seront, probablement, équipés de transformateurs et de moteurs construits avec ces nouveaux fils refroidis à l'azote liquide. À moins que les travaux intensifs des chercheurs ne débouchent sur de nouveaux composés supraconducteurs à la température ambiante (En France, la veille technologique sur la supraconductivité est assurée par un groupe d'experts dont les rapports sont publiés par le Centre de prospective et d'évaluation et l'association Aditech, 96, bd Auguste-Blanqui – 75013 Paris – Tél. (1) 47 07 14 41).

Dans ce domaine des transports terrestres, citons enfin l'application la plus spectaculaire : le train à lévitation magnétique. Outre l'absence de résistance au passage du courant électrique, les supraconducteurs présentent en effet une autre étonnante propriété : ils « repoussent » les champs magnétiques extérieurs. C'est l'effet Meissner, mis en évidence lorsqu'on dépose un petit aimant sur un matériau supra : l'aimant flotte dans l'air... Sur ce principe, les Japonais ont construit un prototype de train à lévitation magnétique, le HSST (High Speed Surface Train), dont les « rails » sont constitués d'une piste supraconductrice refroidie à l'hélium. Cette contrainte cryothermique rend naturellement illusoire l'exploitation d'un tel véhicule en milieu urbain, bien qu'un projet soit à l'étude pour relier le centre-ville de Las Vegas à l'aéroport.

Ce train « fantôme » avec ses « rails » à – 269 °C, tout comme les idées de stockage de l'énergie électrique dans d'immenses bobines supraconductrices enfouies dans le sol, sont deux exemples révélateurs des projets les plus futuristes lancés dans ce domaine. L'étrange phénomène observé voici près de quatre-vingts ans par Kamerlingh Onnes dans son modeste laboratoire de cryogénie de Leyde continue à fasciner les chercheurs du monde entier.

Claude Gelé
Ingénieur mécanicien, Claude Gelé est journaliste scientifique et technique, spécialisé dans les technologies de pointe, notamment la productique et l'informatique industrielle. Il collabore à plusieurs revues professionnelles et magazines de prospective technologique, notamment Science & Technologie.