Après un long siège policier qui ne donne rien — forts de l'immunité diplomatique que leur confère la convention de Vienne, les hommes retranchés dans le Bureau du peuple refusent toute perquisition —, le gouvernement de Londres décide la rupture des relations diplomatiques avec la Libye et donc l'expulsion de son personnel diplomatique. Les Libyens prennent alors aussitôt des mesures semblables à l'encontre des diplomates britanniques en poste à Tripoli. Le Daily Express révèle, en août, que quatre des diplomates libyens responsables de la fusillade du 17 avril ont été pendus... Selon le journal populaire conservateur, le colonel Kadhafi « était furieux » parce que la mort d'Yvonne Fletcher avait démontré que son ambassade à Londres était « une cache d'armes et une base d'opérations terroristes ». Mais le Foreign Office n'est pas en mesure de confirmer.

L'autre affaire — rocambolesque celle-là — a trait à l'enlèvement manqué, le 5 juillet, à Londres, de l'ex-ministre des Transports nigérian, Umaru Dikko, qui avait fui son pays à la suite du coup d'État militaire du président Buhari. U. Dikko est retrouvé par Scotland Yard à l'aéroport de Stansted, drogué et enfermé dans une caisse en partance pour Lagos... Le rapt a été organisé, à l'évidence, par des diplomates nigérians en poste à Londres, avec la complicité de trois ressortissants israéliens. Le Foreign Office en tire les conséquences et juge « inapproprié » le maintien de l'ambassadeur de Lagos à Londres. Le Nigeria demande alors à son tour à la Grande-Bretagne de rappeler son ambassadeur... Si ce n'est pas la rupture diplomatique, c'est au moins un sérieux coup de froid entre les deux pays.

Dans un tout autre domaine, un événement réchauffe le cœur des Britanniques : la naissance du deuxième fils du prince et de la princesse de Galles, le 15 septembre, à Londres. Le royal baby se prénomme Henry et occupe la troisième place dans l'ordre de succession au trône, derrière son père, le prince héritier Charles, et son frère aîné, William.

Baudouin Bollaert

Italie

Les vieux démons ébranlés

Lorsque, le 11 juin 1984, Enrico Berlinguer, secrétaire général du PCI, meurt dans la salle de réanimation de l'hôpital de Padoue, après trois jours d'une agonie consécutive à une hémorragie cérébrale, personne ne se doute encore que sa disparition va constituer l'un des événements majeurs de l'année 1984. Deux jours après, un million et demi de personnes envahissent les rues de Rome pour ses funérailles. L'Italie paraît bouleversée. Le président de la République est resté trois jours au chevet du mourant. Le pape Jean-Paul II a envoyé à l'hôpital l'évêque de Padoue. Des prêtres ont célébré, un peu partout dans la Péninsule, des messes en hommage au leader communiste.

Le 17 juin, ce sont les élections au Parlement européen. L'effet Berlinguer joue à fond, et le PCI obtient un pourcentage de votes si élevé (33,2 %) qu'il réalise, pour la première fois dans son histoire, le « sorpasso », le dépassement de la Démocratie chrétienne, et devient le premier parti de la Péninsule.

Ces événements ont poussé Eugenio Scalfari, directeur du quotidien Repubblica, à intituler son dernier livre l'Année de Craxi... ou de Berlinguer ?, (Bettino Craxi est président du Conseil depuis le 4 août 1984). Oui, ces deux personnages, pour des raisons différentes, ont marqué de leur empreinte l'année qui vient de s'achever.

La question morale

En filigrane, tout au long de 1984, une question fondamentale va d'ailleurs servir de caisse de résonance aux principaux événements : la question morale, autrement dit le problème de l'assainissement de la vie publique et de la vie sociale tout court, en commençant par l'affaire Andreotti, du nom du ministre démocrate-chrétien des Affaires étrangères, traduit le 23 novembre devant le Parlement, pour aboutir aux coups de filet de la police contre le crime organisé La question morale deviendra le cheval de bataille des communistes de E. Berlinguer, tandis que le gouvernement Craxi vacillera devant les accusations qui frappent ses ministres.