En France, tout achat de sang ou de parties du corps humain est interdit. Il existe 2,5 millions de donneurs de sang bénévoles. Les premières informations sur le rôle des injections de produits sanguins dans la diffusion du SIDA ont incité le secrétariat d'État à la Santé à publier, en juin, des instructions à l'adresse des médecins, receveurs et donneurs de sang, afin d'éviter « les transfusions de produits sanguins provenant de personnes présentant des risques particuliers ». Catégories mentionnées : homosexuels ou hommes bisexuels ayant des partenaires multiples ; personnes souffrant de fatigue, fièvres prolongées, amaigrissement important et inexpliqué, ganglions généralisés ; originaires d'Haïti et d'Afrique équatoriale ; enfin partenaires sexuels de personnes appartenant à l'une de ces catégories. De vives objections ont été opposées à ces mesures, dont on craint quelles aillent à l'encontre de leur but. En conduisant à enquêter sur la vie privée des donneurs bénévoles (parmi lesquels les individus à risques sont certainement rares), elles pourraient décourager la générosité et finalement tarir les possibilités des centres de transfusion.

Virus

L'origine infectieuse du mal étant démontrée, reste à identifier l'agent responsable. C'est à quoi s'emploient deux équipes américaines (Max Essex à la Harvard School of Public Health, Boston ; Robert Gallo au National Cancer Institute) et une équipe française (Luc Montagnier, Institut Pasteur). Parmi les « candidats » figure un proche parent d'un virus découvert il y a quelques années par Robert Gallo, le HTLV (Human T-cell Leukemia Virus), dont l'une des caractéristiques est d'infecter les lymphocytes T. Or, aux premiers stades du SIDA, les malades présentent une forte diminution du nombre de ces lymphocytes ; une sous-classe, dite T4, a même pratiquement disparu. Les lymphocytes T4 interviennent dans la défense de l'organisme contre les agents infectieux qui se multiplient à l'intérieur des cellules, en particulier ceux de ces agents qui sont impliqués dans diverses manifestations du SIDA. L'effondrement des T4 sous l'action du virus sera la cause des défaillances de l'immunité, livrant l'organisme aux complications multiformes du SIDA.

De leur côté, les chercheurs français, utilisant une technique originale de culture de lymphocytes prélevés dans les ganglions d'un « pré-malade » du SIDA, ont isolé un autre virus, également proche du HTLV, qui pourrait être le responsable cherché.

Prévention

En juillet, une communication des centres de cancérologie et de médecine interne de San Francisco, qui ont eu à soigner de nombreux malades, vient apporter une note différente et de nature à dissiper les craintes d'une épidémie dramatique de SIDA, comparable aux pestes de jadis. D'après les chercheurs californiens, l'agent du SIDA (qui, selon eux, devrait être cherché sur des animaux artificiellement privés de leurs défenses immunitaires) ne peut atteindre que des individus souffrant déjà d'un effondrement de leur système immunitaire, survenu pour des causes diverses : usage de drogues (fréquent chez les homosexuels américains), notamment d'héroïne, dont l'effet anti-immunitaire est bien connu ; traitements médicaux impliquant de multiples injections de produits sanguins (cas des hémophiles) ; coïncidence, dans certaines couches sociales, comme à Haïti, de malnutrition, de maladies parasitaires et de tuberculose. La fréquence des relations sexuelles avec des partenaires multiples pouvant, dans les groupes à risques, favoriser la dissémination du mal. « Nous prédisons, affirment les auteurs de la communication, que les individus immunologiquement sains ne courent nullement le risque de contracter le SIDA. »

Cancer de Kaposi

Quant au redoutable sarcome de Kaposi, qui apparaît au stade ultime de la maladie, les praticiens californiens estiment qu'il ne résulte pas directement de l'affaissement des défenses immunitaires, mais au contraire d'un sursaut sélectif et excessif de ces défenses, entraînant une prolifération cellulaire anormale. Dans cette perspective, la thérapeutique devrait s'orienter vers un blocage sélectif des facteurs de croissance sécrétés en excès chez ces malades. Cette thèse rejoint la récente découverte, en Grande-Bretagne et aux États-Unis, d'un lien entre les gènes du cancer et les facteurs de croissance.