La défaillance d'une des trois piles à combustible qui fournissent l'énergie électrique nécessaire à bord, venant après d'autres incidents mineurs, incite la NASA, contre les souhaits des deux astronautes, à abréger le programme prévu. Peu avant le retour, l'écran de visualisation dont dispose le commandant de bord tombe en panne à son tour. Engle réussit à remplacer l'oscillographe cathodique qui avait grillé.

La rentrée dans l'atmosphère et l'atterrissage sont réussis avec une extraordinaire précision au terme d'un vol qui a duré 2 jours 6 heures 13 minutes, au lieu de cinq jours prévus. La gageure de faire voler un même appareil deux fois dans l'espace a été tenue. Malgré l'interruption de la mission, les principaux buts ont été atteints : expérimentation d'un radar et d'un scanner à infrarouges et, surtout, essai du télémanipulateur (long bras articulé, à six degrés de mouvement) qui doit servir à la manutention du matériel transporté par la navette. Le télémanipulateur doit sortir le matériel de la soute, l'écarter de l'appareil et le lâcher dans l'espace.

Pour la troisième mission du programme STS, Columbia est confiée aux colonels Jack R. Lousma (83 jours passés dans l'espace en 1973 à bord du Skylab) et Gordon C. Fullerton (essais d'atterrissage de la navette Enterprise en 1977). Partie le 22 mars, Columbia revient le 30, le mauvais temps ayant retardé sa rentrée d'un jour. La mission est accomplie avec succès mais, une fois encore, non sans incidents : le bouclier thermique a perdu des tuiles, les verrous des portes de la soute ont gelé, un écran de visualisation ainsi qu'un transmetteur sont tombés en panne. Surtout, inexplicablement, les astronautes ont tout le temps pâti de nausées. Les annales enregistreront le premier passager clandestin de l'espace : une mouche des fruits californienne.

Ariane

Le troisième tir d'Ariane, le 19 juin 1981, a été un succès (Journal de l'année 1980-81).

La réussite de deux tirs sur les quatre de la série expérimentale suffisait à qualifier Ariane et à rendre la fusée opérationnelle. Mais un doute subsistait après l'échec du deuxième lancement. Aussi attendait-on avec beaucoup d'intérêt le quatrième et dernier tir. Le 19 décembre 1981 à 2 h 29 min (heure de Paris) et à la minute prévue, la fusée a satellisé deux charges technologiques, ainsi qu'un relais spatial de 1 014 kg, Marecs A, contribution européenne au nouveau réseau de télécommunications maritimes Inmarsat.

Ainsi qualifiée, Ariane entreprend sa carrière de lanceur opérationnel avec une série de sept tirs de promotion commandés par l'ESA. Le premier devait avoir lieu le 22 avril 1982 avec, comme charge à satelliser, deux engins de cette organisation, Marecs B et Sirio 2. Mais, entre-temps, le premier Marecs révéla de graves défauts qui incitèrent à apporter des modifications au suivant. C'est donc par manque de charge à satelliser que ce tir d'Ariane est repoussé à septembre.

Pari gagné

En espérant partager avec la navette le marché des satellites de télécommunications (Journal de l'année 1980-81), les promoteurs d'Ariane engagent un pari téméraire.

Une escadrille de cinq navettes devait être à même d'assurer une mission par semaine pour un prix moitié moindre que celui qui pouvait être pratiqué pour Ariane. Surtout, la fréquence des vols de la navette risquait d'enlever leur clientèle aux fusées classiques. Mais plusieurs circonstances ont favorisé les promoteurs d'Ariane. En premier lieu, l'interminable mise au point de la navette qui a retardé de plusieurs années les tirs programmés. La remise en état de l'appareil après les vols est très longue et minutieuse : chaque remise en état de Columbia mobilise pendant plusieurs mois 8 500 personnes dans quelque 25 entreprises. Les missions sont excessivement espacées. La cadence d'un vol par quinzaine ne sera pas atteinte avant 1988. L'arrivée au pouvoir de Ronald Reagan n'a rien arrangé. Sa nouvelle politique de défense a rendu les forces armées — principal commanditaire du programme STS — plus exigeantes encore quant à la part qui leur revient dans l'utilisation de la navette. Aussi, plusieurs missions prévues pour la NASA, parfois avec la collaboration de l'ESA, ont dû être annulées ou remises.