Les membres fondateurs de Radio Fil bleu, la radio libre de Montpellier muselée en 1978, portent plainte, début avril 1980, contre RMC pour installation « illégale » en territoire français.

Riposte du monopole : à peine Fréquence-Nord à Lille et Radio 7 à Paris lancées par Radio-France, une nouvelle offensive est menée contre les pirates, avec la saisie de Radio Quinquin après sept mois d'émissions quotidiennes, de Radio cœur d'acier à Nancy, de Radio Paris 80, à Paris. Mais, à Lille et à Lyon, la police intervient de nouveau, fin juin, dans les locaux des radios libres.

En jeu, le monopole bien sûr, mais surtout le débat politique ouvert par l'approche des élections présidentielles de 1981. Qui exprimera quelles idées, et où ? Globalement, les radios libres s'inscrivent dans l'opposition. Politique, syndicale. Les museler procède d'une stratégie politique évidente pour un objectif à court terme : les élections. Mais après ?

Le service public, financé essentiellement par la redevance, peut-il songer à l'installation d'un réseau plus affiné de radios locales sans le recours aux financements privés ? D'autant plus que se profile, dans un avenir maintenant proche, l'exploitation de techniques nouvelles qui redistribuent les cartes de la communication radiodiffusée : le satellite, d'ici à trois ou quatre ans, multipliera le nombre de canaux, permettant une distribution beaucoup plus large de programmes. Quant au câble, dont bon nombre de villes nouvelles sont équipées, son exploitation ouvre des possibilités infinies : l'utilisation récente de la fibre de verre, qui permet le passage de fréquences beaucoup plus rapides et nombreuses, laisse envisager le développement d'un tissu beaucoup plus serré et diversifié de programmes.

Cinéma

La production américaine retrouve la première place

La France a redoré son blason grâce à Alain Resnais et son Oncle d'Amérique. Elle en avait bien besoin : jamais on n'avait tant pleuré sur le déclin du cinéma français. Déclin que les chiffres n'indiquent que très faiblement : la fréquentation reste stable, le nombre de films produits aussi, et, cette année, les films français ont enfin retrouvé la faveur du public en atteignant 50 % de la fréquentation. Mais, si la quantité est là, c'est souvent la qualité qui manque. Et, cette année encore, c'est surtout l'Amérique qui tient le haut du pavé pour les films-événements.

Inquiets, les professionnels le sont partout, sauf aux États-Unis. Et la baisse du taux de la TVA, enfin effective depuis novembre 1979, n'a guère apporté le souffle nouveau qu'on attendait.

La concurrence du petit écran reste toujours le cheval de bataille du cinéma. Un pas est franchi : les films seront un peu moins nombreux à la télévision, et chaque chaîne est dotée d'une carte de producteur, ce qui lui permet d'investir dans des films. Il reste à faire payer au juste prix les films que le petit écran achète pour les diffuser à domicile.

Il reste aussi à organiser l'avenir avec le développement, sensible dès cette année, des vidéocassettes et des vidéodisques.

France

Mauvais, le cinéma français ? Routinier, sans doute, dans son ensemble : on n'a guère, cette année, rencontré de révélations. Une réussite, Mon oncle d'Amérique, d'Alain Resnais, cinéaste secret et original, qui tente l'exploration d'une voie nouvelle à l'écran, celle de la science.

Audacieuse démarche que celle du film : tout en racontant une ou plutôt trois histoires, somme toute banales, Resnais les fait commenter par le professeur Henri Laborit. Et, miracle, parvient à ne jamais rebuter. Mieux encore : son film émeut, passionne et stimule. Un montage fort habile intègre romanesque et commentaires, et les personnages ne deviennent jamais des cobayes. Il est vrai qu'ils sont remarquablement interprétés par Gérard Depardieu, qui est désormais l'acteur numéro un de notre cinéma, par Roger Pierre, ici à contre-emploi et étonnamment juste, et, surtout, par Nicole Garcia, qui, avec ce rôle, s'affirme comme une des personnalités féminines les plus fortes et les plus attachantes du moment.