Un vent d'optimisme souffle sur Force ouvrière. Fidèle à sa pratique de la concertation, André Bergeron attend, lui aussi, une reprise des négociations dans le secteur public et nationalisé : deux contrats salariaux ont déjà été signés pour 1978 aux Manufactures de tabac et à Air France. L'ouverture sociale se mesurera pour FO aux réponses qui seront faites à quatre revendications :
– le règlement de la situation choquante des vacataires de la fonction publique ;
– la réduction de la durée maximale du travail (48 heures par semaine) ;
– la négociation de minima conventionnels ;
– la 5e semaine de congés payés.

Souplesse

Face à ces demandes multiples, gouvernement et patronat adoptent une position souple. Les conversations, reconnaissent les syndicats, sont approfondies mais ne débouchent que sur des perspectives modestes bien en deçà des demandes formulées. La lettre du Premier ministre adressée au patronat le 27 avril, recommandant des négociations notamment par branches, sur les bas salaires et les conditions de travail, ne reçoit qu'un accueil mitigé.

Le CNPF de son côté déplore la procédure suivie : « L'ombre de la statue du Commandeur n'est pas de nature à favoriser une bonne politique contractuelle », affirme-t-on au siège du patronat. Et c'est sans enthousiasme que s'ouvrent, aussi bien au CNPF que dans les branches, les conversations entre les partenaires.

Débloquée au printemps, la situation sociale demeure incertaine. Pour les syndicats — et spécialement la CFDT —, il est trop tôt pour porter un jugement sur les conversations qui sont loin d'être achevées ; mais il est trop tard pour mobiliser les salariés dans les épreuves de force. D'ailleurs, la base manifeste peu de combativité ; les états-majors attendent la rentrée pour inviter à l'action après avoir fait éventuellement la preuve que leur bonne volonté n'avait pas été payante.

Lente remise en marche de la concertation

Le Premier ministre Raymond Barre adresse, le 27 avril 1978, une lettre aux partenaires sociaux pour leur « proposer des mesures concrètes de concertation et de négociation » :
– dans le cadre de la politique de l'emploi, les principales mesures du pacte national de 1977 seront reconduites. Une concertation est prévue avec le gouvernement sur l'amélioration des mécanismes de placement et les problèmes des cadres âgés ;
– le maintien du pouvoir d'achat est proposé dans le secteur public. Dans le secteur privé, des négociations par branches sont envisagées, notamment pour la fixation des minima et l'amélioration de la situation des travailleurs manuels. Le gouvernement s'engage à augmenter à trois reprises le SMIC en 1978. Un bilan de la politique salariale sera établi à la fin de l'année et préludera à d'éventuelles réformes ;
– le gouvernement souhaite un développement des conventions collectives sur la durée du travail et les conditions de travail au niveau des branches. Une modification de la loi de 1950 (loi fixant les règles des négociations collectives) est envisagée ;
– une amélioration de la participation devra faire l'objet de proposition au Parlement.

Un mois après l'initiative gouvernementale, le président du CNPF, François Ceyrac, fait part, le 24 mai, de ses propositions aux syndicats.

– Au niveau national, des discussions sont envisagées sur :
la révision du système d'indemnisation du chômage ;
l'aménagement du temps de travail ;
les retraites complémentaires et certaines questions relatives aux garanties de ressources.

– Au niveau des fédérations, les négociations porteront sur :
l'institution d'une garantie annuelle de ressources ;
 la révision des classifications ;
l'amélioration des conditions de travail conformément à l'accord du 17 mars 1975.

À la fin du mois de juin, aucune négociation ne parvient à son terme dans le secteur privé. Le pacte sur l'emploi (nouvelle version) est adopté par le Parlement ; le projet de généralisation des prud'hommes est adopté par le gouvernement ainsi que l'amélioration de la participation pour les cadres. Reste à l'étude la réforme des conventions collectives.

Les conflits du travail

La physionomie générale de l'action revendicative se caractérise par de nombreux petits conflits, des prises de position parfois spectaculaires, sans jamais déboucher sur des grèves dures. Ni les syndicats ni les chefs d'entreprise ne veulent prendre le risque d'une explosion sociale pré-électorale.

Secteur privé

L'emploi, le pouvoir d'achat et les conditions de travail demeurent les trois motifs principaux des conflits. Une seule journée nationale interprofessionnelle est décidée par la CGT, la CFDT et la FEN le 1er décembre 1977. Elle se traduit essentiellement par des défilés importants.

L'emploi

– Lip : le 9 novembre, les salariés (ils sont encore près de 500) qui occupent l'usine de Palente depuis 1976 décident une reprise d'activité sous forme de coopérative. Une souscription publique est lancée tandis que le syndic s'oppose au rachat de l'entreprise par les salariés.