Côté western, rien. Côté violence, outre Sam Peckinpah, une grande machinerie pas très convaincante de John Frankenheimer, sur le terrorisme, Black Sunday. Et surtout, l'étonnant portrait d'une Bande de flics américains, bornés, racistes, brutaux, brossés avec une complaisance équivoque mais efficace par Robert Aldrich.

Enfin, pour son humour à la James Bond, Un espion de trop, de Don Siegel, où Bronson incarne un agent du KGB.

Côté rétro, une seule réussite : New York New York, comédie musicale de Martin Scorsese ou, plutôt, comédie sentimentale (encore une), donnant, face à Robert de Niro, toujours excellent, l'occasion à Liza Minnelli de prouver, dans plusieurs éblouissants numéros de music-hall, qu'elle est la grande héritière des comédies musicales d'antan, où excellait sa mère, Judy Garland.

M. Scorsese signe encore cette année un film musical, inclassable et remarquable : The Last Waltz, vigoureux et enthousiaste montage à partir du concert d'adieu donné par un célèbre orchestre pop, The Band.

Perfection

À mentionner ici, puisqu'ils ont été tournés outre-Atlantique avec des capitaux et des acteurs américains, deux films signés par des Français : La petite de Louis Malle (qui représente même les États-Unis à Cannes), un film d'une éblouissante perfection formelle sur un sujet désagréable, la prostitution enfantine. Et Un autre homme, une autre chance, de Claude Lelouch, une sorte de western de charme injustement méprisé. À signaler pour mémoire, dans le lot habituel des films de science-fiction, Generation Proteus, de Donald Cammel, pour Julie Christie, rendue mère par un ordinateur, et L'hérétique, de John Boorman, fausse suite, bien meilleure, de L'exorciste, avec Richard Burton.

À surveiller, la vogue des films psychanalytiques, dont se détache, pour son titre et son interprète, Richard Burton encore, Equus. À saluer, le documentaire, remarquable, de Barbara Kopple, sur une grève des mineurs dans les Appalaches, Harlan County USA. À applaudir enfin, trois films, passés relativement inaperçus, mais qui prouvent que l'inspiration n'est pas l'apanage des grandes compagnies : Le bal des vauriens, de John Cassevetes, Stay hungry, de Bob Rafelson, et le très beau film sensible d'un nouveau venu, Silvio Narizzano, Pitié pour le prof, où l'adolescent de Harold et Maude, Burt Cort, campe excellemment un petit instituteur exilé dans les grandes plaines froides du Saskatchewan.

Italie

Au risque de se répéter, il faut bien le proclamer, l'Italie domine, encore, la création cinématographique. On dit son cinéma en crise, on dit la concurrence du petit écran de plus en plus envahissante... sans doute. Mais cette année encore, ce sont les films italiens qui sont les plus vigoureux, les plus incisifs, les plus intelligents aussi, dans leur approche lucide mais pleine d'humour des préoccupations de notre époque si tourmentée.

Palme

À Cannes, ce fut net : dès le deuxième jour, on savait que la palme ne pouvait que revenir à L'arbre aux sabots, lente fresque paysanne d'Ermanno Olmi (l'auteur d'Il Posto), où l'on voit vivre, au rythme des saisons, des familles des environs de Bergame, à la fin du siècle dernier.

Hors Olmi, presque un revenant, il faut cependant remarquer que les réussites italiennes de l'année sont toujours dues à la même poignée d'habitués – dont, d'ailleurs, on a souvent ressorti des œuvres déjà anciennes. On retrouve donc Comencini, Monicelli, Scola. Mais, chaque fois, on applaudit...

De Comencini, c'est un film tourné en 1966 qui domine surtout : L'incompris, où, sur une trame sombrement mélodramatique, le metteur en scène dessine avec une émouvante justesse le portrait d'un jeune garçon aux prises avec l'incompréhension des autres, de son petit frère et surtout de son père. Un film où l'on pleure. Mais sans honte.

Totalement à l'opposé, les deux autres films de Comencini jouent, eux, et admirablement, l'humour grinçant, la satire, à la limite de la cruauté. Le plus achevé, L'argent de la vieille, est une fable noire illustrant l'adage « l'argent va à l'argent » : Alberto Sordi, pauvre habitant d'un bidonville des environs de Rome, aura beau jouer jusqu'à épuisement avec la richissime Bette Davis, il ne gagnera jamais aux cartes contre une milliardaire...