Elle le reste sans doute aussi lorsqu'elle a l'idée d'évoquer, dans un grand spectacle bruyant et minutieusement réglé, La fièvre du samedi soir, qui s'empare de tous les jeunes aux accents de la musique disco, grand succès de toutes les boites de la planète. Outre-Atlantique, ce film, musicalement illustré par les Bee Gees, et tout entier dévoué à la danse autour d'une historiette d'une banalité à toute épreuve, a donné la fièvre à de très nombreux spectateurs. En France, son héros, John Travolta, long garçon très swinguant, à la coiffure rocky, ne provoque pas, semble-t-il, la même frénésie.
Humour
Reste l'amour. Un thème cher aux Français mais auquel les Américains, qui l'avaient un peu abandonné, reviennent en force cette année. Avec un grand bonheur. À tout seigneur tout honneur : Woody Allen, grand triomphateur des Oscars, ouvre la voie avec Annie Hall, un récit sans doute à peine transposé de sa propre liaison avec la délicieuse Diane Keaton, qui interprète le film avec lui.
Humour, finesse, spontanéité, intelligence, tendresse, Annie Hall est un petit chef-d'œuvre de comédie psychologique. Dans la même veine, La femme libre de Paul Mazursky, dresse avec une authenticité étonnante le portrait d'une femme que son mari abandonne et qui, douloureusement, mais intelligemment, se reconstruit un équilibre.
Deux jolies réussites, dont on peut rapprocher, bien que plus académique, l'adaptation qu'Herbert Ross a tournée d'une pièce à succès, Adieu je reste, qui a valu l'oscar du meilleur acteur à Richard Dreyfuss, le petit rouquin barbu des Dents de la mer.
Plus lourde, mais d'un romantisme sans fausse honte, la belle histoire d'amour de Bobby Deerfield, de Sydney Pollack, qui a fait pleurer les cœurs sensibles. Love Story n'a pas fini de faire des ravages...
Femme
En se réintéressant à l'amour, le cinéma américain a redécouvert la femme. Avec La femme libre de Paul Mazursky, qui doit beaucoup à l'interprétation de Jill Clayburg, trois grands films, cette année, donnent à de grandes comédiennes des rôles enfin à la mesure de leur talent. D'abord Julia, du vieux routier Fred Zinnemann, l'histoire d'une amitié féminine interrompue par le nazisme. Un film inégal, mais très émouvant, et surtout magistralement interprété par Vanessa Redgrave et Jane Fonda.
Ensuite, Le tournant de la vie, d'Herbert Ross, qui évoque avec beaucoup de justesse les coulisses de la danse, et donne surtout à deux monstres sacrés, Ann Bancroft et Shirley Mac Laine, l'occasion d'un superbe numéro d'actrices.
Enfin – surtout, peut-être – À la recherche de Mr Goodbar, violent portrait d'une Amérique en déroute, à travers le personnage (magnifiquement interprété par Diane Keaton) d'une jeune femme qui se veut libre, sage professeur le jour, chasseresse cynique la nuit.
L'espace, la danse, l'amour... un quatrième thème fait sa percée : le Viêt-nam. Thème jusqu'alors tabou. Mais que traitent deux des quatre films américains en compétition à Cannes. Dont Retour. Hal Ashby y montre la prise de conscience de l'Amérique devant l'horreur et la sottise de ce conflit à travers une intrigue sentimentale entre une petite bourgeoise et un vétéran paraplégique et pacifiste.
La blessure du Viêt-nam est sans doute encore mal cicatrisée : le propos est ici très affadi. Mais Jane Fonda – encore – et Jon Voight, très justement récompensé à Cannes pour ce rôle, sont remarquables.
Violence
La guerre, on la retrouve avec Sam Peckinpah, qui a pris pour prétexte le second conflit mondial pour donner libre cours à son amour de la violence sanglante dans Croix de fer. Mais elle est, en revanche, prétexte à (bons) gags dans le premier film de Marty Feldman, l'homme aux yeux en boules de loto de la bande à Mel Brooks : Mon beau légionnaire est une savoureuse parodie des films qui naguère encensaient les vertus viriles des légionnaires. Dans le même esprit, mais parodiant, cette fois, les vertus amoureuses des grands séducteurs, un autre membre de la bande à Mel Brooks, Gène Wilder, incarne lui-même, dans un film dont il est l'auteur, un succédané du grand Valentino, dans Un drôle de séducteur.
