L'industrie privée et le commerce de gros des produits agricoles dénoncent les privilèges exorbitants dont jouissent, selon eux, les coopératives. Cette guerre de religion, que l'on croyait éteinte, envenime les rapports des deux parties, qui ont à travailler ensemble dans les diverses interprofessions présentées comme le seul remède aux maux dont souffre l'agriculture.

L'industrie alimentaire rencontre de plus en plus de difficultés avec la grande distribution, qui lui dicte ses conditions. Les grandes surfaces, qui représentaient 30 % des ventes alimentaires en 1962, approchent cette année les 50 %. Or, 5 sociétés contrôlent la moitié des supermarchés, et 5 enseignes, pratiquement les mêmes, se partagent 48 % des hypermarchés.

Les diverses associations de consommateurs multiplient les attaques contre les additifs et colorants utilisés par les industries agricoles et alimentaires (Journal de l'année 1975-76).

Une enquête du ministère de l'Agriculture donne quelques indications sur les industries alimentaires. En dix ans, 7 000 entreprises ont disparu. Sur 16 000 entreprises, 4 268 occupent plus de 5 salariés. L'atomisation du secteur a facilité l'implantation de firmes étrangères, qui représentent 19 % de la production totale (bouillons et potages : 80 % ; crèmes glacées : 50 % ; biscuiterie : 40 %) et ont investi, de 1970 à 1975, 2,5 milliards de F. Cette dépendance coûte 110 millions de F de redevances pour l'utilisation de brevets étrangers contre 4,7 encaissés pour la même raison par la France.

Après une dure bataille financière et l'échec d'une OPA de ses deux principaux actionnaires, la société belge Général biscuit passe sous le contrôle du groupe français Aliment essentiel — Céraliment — Lu-Brun. Ainsi cette entreprise se hisse-t-elle au troisième rang mondial de la biscuiterie avec un chiffre d'affaires de l'ordre de 3 milliards de F.

Château-Margaux est vendu par la famille Ginestet à Félix Potin, après le refus des pouvoirs publics de voir la propriété de 250 ha, dont 65 de vignes (250 000 bouteilles), passer aux mains de la firme américaine National Distillers.

Les exportations agricoles et alimentaires s'élèvent, pour 1976, à 41,5 milliards de F, soit 16 % des exportations totales. Avec 66 % de ces exportations, les ventes dans la CEE plafonnent. Le solde excédentaire est de 3,3 milliards. Les importations de café et de thé, dont le coût a fortement augmenté, ainsi que celles de légumes, rendues nécessaires par la sécheresse, ont pesé dans la balance.

L'affaire du beurre

Fin février-début mars 1977, émoi dans les milieux communautaires. Devant l'ampleur des stocks (200 000 t), qui devraient doubler, selon les prévisions, d'ici à la fin de l'année, la Commission autorise secrètement l'exportation de 75 000 t de beurre vers l'URSS. Le cours mondial n'étant que de 0,90 dollar le kilo, la Communauté s'apprête à subventionner les exportateurs (français) à raison de 1,9 dollar par kg. Une indiscrétion ayant révélé l'affaire, le ministre de l'Agriculture britannique obtient de son compatriote, Roy Jenkins, président de la Commission, et en l'absence du responsable agricole, la suspension des subventions ; 36 000 t selon les uns, 45 000 selon les autres sont, en définitive, exportées vers l'URSS. Une polémique s'engage entre les partisans (dont la France) des exportations même vers les pays de l'Est, qui reprochent aux Britanniques d'outrepasser leurs droits et de faire de la discrimination politique, et ceux-ci, qui préfèrent subventionner le consommateur européen plutôt que le soviétique. Revenant sur sa décision, la Commission autorise, quelques jours plus tard, sous la pression de Finn Olav Gundelach, chargé des questions agricoles et qui avait été court-circuité par Roy Jenkins, l'exportation de 400 t de beurre vers la Bulgarie. Ainsi, peut-on constater souligne-t-elle, qu'il n'y a pas discrimination à l'égard des pays de l'Est.