Le handicap spécifique de la sidérurgie française c'est la sous-productivité. Elle s'explique, en premier lieu, par la vétusté d'une trop grande partie de ses installations. Si les aciéries de Dunkerque et de Fos sont des modèles du genre, il faut savoir que près de la moitié de l'acier français est forgé en Lorraine, là où un immense effort de modernisation et de rationalisation reste à accomplir. Ajoutons que, pour des raisons sociales, la crise frappe davantage Fos que les vieilles usines de Thionville ou Longwy, et on assiste au paradoxe de voir un outil moderne sacrifié au profit de hauts fourneaux à bout de souffle. Cette situation tranche avec la jeunesse et la localisation sur l'eau des sidérurgies italienne et japonaise et, quoique dans une moindre mesure, avec les efforts gigantesques entrepris outre-Rhin et aux Pays-Bas.

Autre boulet : les charges sociales. Un exemple : le chiffre d'affaires cumulé d'Usinor et Sacilor est du même ordre que celui de Nippon Kokan ; on compte 100 000 salariés dans les deux firmes françaises, contre 42 000 seulement dans l'entreprise japonaise. Rien d'étonnant à cela quand on se rappelle que la commission sidérurgie du VIe Plan prévoyait une diminution des effectifs de 9 000 salariés et qu'ils ont augmenté en réalité de 4 000 ! La rigidité du système social français revêt un caractère quasi institutionnel dans la sidérurgie, où les licenciements ont été longtemps inconnus. Cette industrie cyclique devrait, au contraire, bénéficier d'une grande souplesse dans la gestion de son personnel.

La France est également mal placée pour réaliser des économies d'échelle, c'est-à-dire amortir au maximum ses frais de fabrication grâce à une production très importante. En dépit d'un gros effort de restructuration, la taille d'entreprises comme Sacilor (7,4 milliards de F de chiffre d'affaires) et même Usinor (10,5 milliards de F) reste inférieure à celle de l'Allemand Thyssen (36 milliards) ou du Japonais Nippon Steel (40 milliards). Dans le classement mondial des grandes entreprises sidérurgiques, Usinor n'occupe que le 12e rang et Sacilor le 26e.

Enfin, les sidérurgistes français n'ont pas pensé à mettre leurs œufs dans plusieurs paniers. Or, compte tenu des données structurelles du marché de l'acier (croissance discontinue, versatilité du cours de l'acier, concurrence effrénée), lesquelles se traduisent par une rentabilité en dents de scie, la diversification est aussi importante que la modernisation et la concentration. Les Allemands, eux, l'ont bien compris, tels Thyssen et Mannessmann qui, après avoir absorbé respectivement Rheinstahl et Demag, jouent à fond depuis quelques années la carte de la mécanique.

Vétusté des installations, rigidité des charges sociales, insuffisance de la concentration, absence de diversification, endettement écrasant, concurrence de pays neufs comme le Japon, voilà les handicaps dont souffre la sidérurgie française. Le plan acier adopté au printemps dernier contribuera certainement à réduire certains d'entre eux. Mais il est fort peu probable qu'il suffise à remettre à flot une industrie dont l'avenir est derrière elle.

Mécanique

Un point noir dans les résultats : la machine-outil

Les industries françaises de la construction mécanique tardent à retrouver un niveau de croissance satisfaisant ; 1977 sera encore, pour elles, une année grise, compte tenu des résultats qu'elles ont obtenus durant les premiers mois de l'année.

Cette constatation doit se nuancer : l'activité des entreprises mécaniciennes de biens d'équipement a diminué de 5 % pendant le trimestre de 1977 (par rapport à la même période de l'année précédente) ; en revanche, l'activité s'est accrue de 2 % dans le secteur de la transformation des métaux et de 3 à 4 % dans le secteur de la précision.

L'année précédente, 1976, a été médiocre. Certes, en valeur (chiffre d'affaires : 100 milliards de F), la production a progressé de près de 9 % (par rapport à 1975), mais, en volume, l'augmentation n'a été que de 2,40 %. Le niveau de la production reste inférieur de plus de 2 % au niveau record de 1974. La mécanique française figure pourtant honorablement, si on rapproche ses résultats de ceux de certains de ses concurrents (RFA, + 2 % ; Italie, + 4,20 % ; Grande-Bretagne, – 2,5 %). Aux États-Unis et au Japon, la production de la mécanique a été respectivement de + 7 % et de + 17,9 %.

Secteurs

En France, les secteurs de l'équipement (+ 2,30 %) et de la transformation des métaux (+ 3,90 %) et surtout celui de la précision (+ 8,90 %) font donc plus ou moins bonne figure. En revanche, le machinisme agricole (– 4,60 %) a été touché, en raison notamment de la baisse des ventes à l'étranger (– 7 %).