Le pays est redécoupé en 49 voïvodies (au lieu de 19 jusqu'à présent), et les districts sont supprimés en tant qu'échelon intermédiaire entre la voïvodie (région ou département) et la commune.

Fin 1974, plusieurs intellectuels polonais (journalistes, écrivains, universitaires) ont adressé aux dirigeants de Varsovie un appel en faveur des Polonais vivant en Union soviétique. On pense que plusieurs centaines de milliers de Polonais se trouvent dans les territoires incorporés à l'URSS en 1939 ou au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

Les signataires de l'appel souhaitaient voir développer l'enseignement polonais ainsi que les bibliothèques disposant de revues et de livres polonais. Bien que le gouvernement et le parti soient, en général, particulièrement susceptibles à propos de toutes les questions impliquant le voisin de l'Est, les réactions officielles ont été plus que modérées. Aucune poursuite n'a été engagée contre les signataires.

Féodalités locales

Officiellement, il s'agit de renforcer le pouvoir des régions, tout en décentralisant le pouvoir de décision. En fait, cette réforme paraît surtout destinée à briser un appareil bureaucratique pléthorique et essentiellement conservateur. À l'occasion de cette réforme, quelque 250 000 cadres du parti et de l'administration se voient mutés, déplacés, déclassés. L'objectif plus ou moins avoué étant de briser les féodalités locales, de disperser des équipes qui régnaient sur des villes ou des districts, profitant largement des avantages d'un pouvoir que rien ne contestait et qui semblait inébranlable. Cette sorte de révolution culturelle devrait, en affaiblissant le pouvoir local, renforcer l'autorité de Gierek et faciliter le contre-pouvoir syndical sur lequel les dirigeants de Varsovie souhaitent compter, en le surveillant étroitement.

Depuis les émeutes de décembre 1970 (Journal de l'année 1970-71), les ouvriers polonais ont pris l'habitude d'exercer une pression constante sur les autorités. Largement bénéficiaires des réformes de Gierek, les travailleurs recourent de plus en plus souvent à la menace de la grève, voire à la grève. Les salaires ont été augmentés. Les avantages sociaux accrus, les cadences réduites. Mais, à la déception du pouvoir, la productivité reste faible. En contrepartie, les ouvriers ne travaillent ni plus ni mieux. D'où les appels incessants, les campagnes de propagande, les encouragements à l'aide de nouveaux stimulants.

Consommation

Le gouvernement polonais encourage ouvertement une certaine consommation de produits chers, qui draîne une grande part de l'argent dont dispose la population et qui échappe à tout contrôle. C'est ainsi que les responsables de Varsovie encouragent l'achat d'automobiles (dont la production a sensiblement augmenté), de logements et de résidences secondaires.

En revanche, les autorités souhaiteraient réduire la consommation alimentaire, afin d'augmenter les exportations. Jusqu'à présent, sans résultat. Conséquence : à partir de février, une brusque tension sur le marché alimentaire. Il est difficile de se procurer de la viande, de la charcuterie et, même, certains produits laitiers. Devant la vague de mécontentement, le Premier ministre, Jaroszewicz, est obligé de lancer un appel au calme et de promettre une amélioration de l'approvisionnement.

Varsovie est obligée d'augmenter sensiblement ses exportations afin de réduire le déficit de son commerce extérieur. La Pologne s'est lancée dans un vaste programme d'industrialisation et de modernisation qui implique l'achat (à l'étranger) de biens de production et de haute technologie. Or, ces biens subissent les effets de l'inflation. Ils coûtent plus cher. Même à l'égard de l'Union soviétique, Varsovie est confrontée à une hausse des prix très sensible (doublement du prix du pétrole, par exemple). Enfin, la Pologne doit faire face à ses premières échéances pour les crédits obtenus après 1970. N'ayant pas encore réussi à développer suffisamment ses exportations de produits finis, elle doit augmenter ses exportations de matières premières et de produits alimentaires, les plus touchés par la détérioration des termes de l'échange.