Les premiers résultats de cette mobilisation sont relativement satisfaisants. L'inflation se ralentit : de 0,9 % en novembre 1974, l'augmentation des prix à la consommation tombe à 0,7 % en décembre et à 0,6 %, le mois suivant, en janvier 1975 (hausse la plus faible enregistrée depuis dix mois).

Chômage

D'autres menaces se font jour. Le 10 décembre 1975, l'industriel Henry Ford II lance un cri d'alarme : « Le temps est-venu, dit-il, de reconnaître que la récession a remplacé l'inflation au premier rang des problèmes les plus graves, et les plus immédiats. » Le taux de chômage qui, depuis le début de 1974, semble se stabiliser aux alentours de 5 %, augmente fortement en septembre, atteignant 5,8 % de la population active. Cette poussée, qui fait suite à de nombreux licenciements dans l'industrie, la construction et le commerce, va se faire de plus en plus forte au cours des mois suivants : la proportion des sans-emploi passe de 6,5 % en novembre à 7,1 % en décembre, pourcentage jamais enregistré depuis mai 1961. Il faut remonter à 1940, époque où les États-Unis épongeaient encore les effets de la grande dépression, pour trouver un nombre comparable de chômeurs : plus de 6 millions.

Au début de 1975, l'emploi est devenu le problème numéro un. En janvier, l'effectif des Américains à la recherche d'un travail atteint 8,2 % de la population active, en avril 8,9 % et en mai 9,2 %, mais ce pourcentage est beaucoup plus élevé dans certains centres industriels comme Détroit, capitale de l'automobile (21 %) ou Newark (20 %).

Aux 8,5 millions de chômeurs recensés, il faut ajouter ceux qui ne travaillent qu'à temps partiel, faute de trouver mieux, et ceux qui, découragés par la situation du marché du travail, ne cherchent même plus un emploi, c'est-à-dire, au total, quelque 4 millions de personnes.

D'autres statistiques témoignent de la gravité de la crise : en 1974, le produit national brut a diminué en volume de 2,2 % par rapport à 1973, pourcentage de baisse le plus élevé enregistré en une année depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Au cours du quatrième trimestre, le PNB a diminué en volume de 9,1 % (en rythme annuel). La production de l'industrie automobile (baromètre de l'économie) a chuté de 24 % en 1974.

Pour tenter de rétablir la situation le président Ford annonce, le 13 janvier 1975, des mesures de relance qui tournent le dos à la politique pratiquée depuis son arrivée au pouvoir. Il demande au Congrès de réduire de 16 milliards de dollars les impôts sur le revenu des particuliers et des sociétés. Il désamorce ainsi, sur ce point, l'opposition des démocrates, mais prend en même temps le risque d'encourager l'inflation. Les allégements fiscaux vont avoir pour but d'augmenter considérablement le déficit d'un budget qui, pour l'exercice 1976, pourrait atteindre 60 milliards de dollars. Ce déficit, qui peut encore s'alourdir, est le plus élevé depuis 1943. Gerald Ford signe, le 23 janvier 1975, une ordonnance qui donne le feu vert à une augmentation du prix de l'essence : cette mesure avait été écartée trois mois plus tôt.

Déboires

Sombre en raison des difficultés d'ordre économique que traverse le pays, l'année l'est tout autant à cause des multiples déboires de la politique étrangère américaine. À peine installé à la Maison-Blanche, le président Ford doit faire face à la crise de Chypre. Tandis que dans l'île les hostilités mettent en danger la paix mondiale et que des manifestations antiaméricaines se soldent, à Nicosie, par la mort de l'ambassadeur des États-Unis, la Grèce, elle, menace de retirer ses troupes de l'Alliance atlantique. Au cours des mois suivants, Henry Kissinger réussit à désamorcer la bombe chypriote et obtient quelques résultats substantiels dans la voie d'un règlement. Ses efforts sont moins concluants au Proche-Orient. En mars 1975, le secrétaire d'État entreprend sa neuvième tournée pour empêcher Arabes et Israéliens de recourir de nouveau aux armes, mais il est amené à suspendre sa mission. D'importantes divergences subsistent entre les deux parties. Le même mois, le roi Fayçal d'Arabie est assassiné, et la disparition de ce fidèle allié est vivement ressentie par les responsables américains.