Après cette mitose, les cellules filles ont deux possibilités : ou bien recommencer un cycle pour se diviser à leur tour (elles entrent pour cela dans la phase G1), ou bien se spécialiser dans un tissu particulier, en perdant à ce moment-là la faculté de se diviser ; elles entrent alors dans la phase A1, dont la suite est la phase A2, ou la mort cellulaire.

Entre les phases M, d'une part, et les phases G1 et A1 d'autre part, existe une phase-embranchement D.

Membrane

Selon William Bullough, ces produits agiraient d'abord juste avant la duplication de l'ADN au cours de la phase S, ensuite juste avant la phase M.

Un troisième point d'action serait la phase intermédiaire D. Lorsque le niveau de chalone s'abaisse pendant cette phase, la cellule s'engagerait dans la voie G1, tandis qu'à une élévation du niveau de chalone correspondrait la spécialisation dans la phase A1.

Bullough postule une action directe des chalones sur le noyau cellulaire. D'autres chercheurs pensent plutôt à une action indirecte au niveau de la membrane cellulaire. On sait, en effet, que, loin de constituer une simple enveloppe inerte pouvant servir de filtre entre le cytoplasme et l'extérieur, la membrane cellulaire est un véritable organite, responsable de fonctions très importantes, comme, par exemple, la fixation d'hormones sur des récepteurs spécifiques.

Les chalones pourraient donc agir en déclenchant, au niveau de la membrane cellulaire, des réactions enzymatiques susceptibles de modifier une ou plusieurs étapes de la division cellulaire.

Parmi les tenants de cette théorie se trouve l'Américain Jack Houch, qui s'appuie sur le fait que, si les cellules cancéreuses en culture sont bien sensibles aux chalones, un simple lavage suffit à leur permettre de reprendre leur activité de division – alors qu'il faut plus de trois lavages pour les cellules saines. Tout se passerait comme si les chalones se liaient plus fortement à ces dernières qu'aux autres. On a pu mettre en évidence le fait que les chalones se fixent sur des fragments de membranes cellulaires.

Difficultés

Quel que soit le mode d'action de ces composés, ils agissent sur la multiplication des cellules cancéreuses en culture de tissu. Chez l'animal, l'administration de chalones a permis la régression spectaculaire de certains types de tumeurs malignes.

Il semblerait aussi que l'administration de chalones extraites de lymphocytes à un patient du professeur Georges Mathé (Villejuif), qui avait reçu une greffe de moelle osseuse, ait empêché la réaction de rejet.

Étant donné la complexité du cycle cellulaire, il se pourrait que les chalones ne soient qu'un facteur particulièrement important au sein du véritable orchestre qui gouverne la division cellulaire. Si les résultats expérimentaux obtenus jusqu'à ce jour paraissent exceptionnellement prometteurs, des inconvénients demeurent.

Les chalones existent dans les tissus à des concentrations incroyablement faibles : la purification de 100 microgrammes de l'une d'elles exige le traitement de 10 tonnes de tissus frais ! Cet inconvénient pourrait toutefois être pallié par le manque de spécificité entre deux espèces : les chalones extraites d'un tissu donné d'un mammifère particulier sont actives pour le même tissu chez une autre espèce de mammifère.

De nombreuses mises au point sont encore nécessaires, notamment dans le sens d'une meilleure caractérisation chimique.

Demi-victoire contre la marée rhumatismale

Deux mille spécialistes, venus de 53 pays, ont pris part au 23e Congrès international de rhumatologie en octobre 1973 à Kyoto. En février 1974, 1 500 médecins de la région parisienne ont été invités à entendre les sommités de la rhumatologie française, venues les entretenir de deux maladies préoccupantes : l'arthrite rhumatoïde et la lombalgie.

Ce n'est certes point dans ces réunions géantes que l'on s'attend à trouver la grande nouvelle de la découverte de l'arme absolue contre les rhumatismes, mais elles permettent de faire le point, et des résultats acquis et des recherches en cours, et, dans une très large mesure, d'apprécier, de congrès en congrès, la valeur des améliorations et des succès obtenus dans le traitement ou la prévention des maladies rhumatismales. Pause critique indispensable en un temps où les maladies rhumatismales constituent un fléau social, tout comme les maladies cardio-vasculaires, les maladies respiratoires, le diabète, le cancer et les maladies mentales.

Fléau

Aux États-Unis, on dénombre environ 10 millions de rhumatisants, dont plus de 300 000 sont rendus invalides pendant plus d'un an. Le nombre des journées de travail perdues est de 105 millions par an, ce qui classe les rhumatismes en deuxième position, immédiatement après les maladies nerveuses et mentales et à égalité avec les maladies cardio-vasculaires.