À 18 h 54, utilisant son premier étage en guise de plate-forme de lancement, l'Aigle s'envole. Commandé automatiquement, le moteur de remontée confère à l'engin une vitesse de 6 650 km/h, qui le place sur une orbite semblable à celle qui était la sienne au moment de l'atterrissage. Il est rallumé à 19 h 49 mn pour passer sur une orbite circulaire inférieure de quelques kilomètres à celle de Columbia. Enfin, prenant ce dernier pour cible, l'Aigle procède aux manœuvres d'approche et d'accostage : à 22 h 35 mn, les deux appareils n'en font plus qu'un. Et c'est le mardi 22, à 0 h 47, que le premier cosmonaute regagne la cabine du CM ; Aldrin le suivra à 1 h 27 mn.

L'Aigle, dont une partie a été abandonnée sur la Lune, devient inutile. Les hommes s'en éloignent prudemment, rallument son moteur et, suivant le programme, l'envoient tourner pour l'éternité autour du Soleil.

Quant à Columbia, redevenu Apollo 11, il rallume aussi son moteur pour quitter l'orbite lunaire et s'engager sur la trajectoire de retour vers la Terre. La désatellisation a lieu ce 22 juillet, à 5 h 57 mn.

Le voyage de retour ne présente aucune difficulté. Les trois hommes se livrent à peu près aux mêmes activités qu'à l'aller. Le jeudi 24, trois heures avant la rentrée dans l'atmosphère terrestre, Collins oriente vers le Soleil le bouclier thermique de la capsule pour le préchauffer. L'engin suit la trajectoire prévue à la vitesse requise ; le SM, désormais inutile, est éjecté.

Précautions prises

À 17 h 39 mn, à quelque 125 km d'altitude, la résistance opposée par l'air commence à échauffer vivement le bouclier de la capsule, qui est rapidement porté à la température de 2 800 °C, tandis que le brutal freinage aérodynamique inflige aux hommes une décélération de 6 g, qui sextuple momentanément leur poids. À environ 7 500 m d'altitude, le bouclier est lui aussi éjecté.

Des 2 941 t qui se dressaient sur la plate-forme de lancement du cap Kennedy à l'aube du 16 juillet, des 44 t lancées ensuite vers la Lune, il ne reste que la capsule nue.

Freinée d'abord par deux parachutes spéciaux, qui, de 7 500 à 2 300 m, ont ramené sa vitesse à 200 km/h, la capsule descend maintenant, portée par trois autres parachutes. À 17 h 49 mn 54 s de ce 24 juillet, soit 8 j 3 h 17 mn 54 s après leur départ, les cosmonautes amerrissent à quelque 1 500 km des îles Hawaii et à une quinzaine de kilomètres du porte-avions Hornet, chargé de les accueillir.

Paradoxalement, c'est alors que commence, pour les trois héros, la phase la plus insupportable de leur mission. Loin de regagner triomphalement leurs foyers, il leur faut maintenant se soumettre à une quarantaine plus rigoureuse encore que celle qui frappait les marins au temps de la voile et des grandes épidémies. Il s'agit d'éviter que la Terre puisse être contaminée par quelque micro-organisme éventuellement ramené de la Lune. On doit donc empêcher les hommes, le matériel et les échantillons du sol lunaire d'entrer en contact avec l'atmosphère avant que de longues analyses aient prouvé la stérilité du milieu lunaire.

Un homme-grenouille, par l'écoutille entrouverte de la capsule, passe aux astronautes des combinaisons qui, comme celle qu'il porte lui-même, doit leur assurer une isolation biologique absolue. Comme la surface de cette tenue peut avoir été contaminée à l'intérieur de la cabine, l'homme-grenouille badigeonne généreusement d'eau de Javel les trois hommes, lesquels le lui rendent en l'aseptisant à son tour, avant que son radeau soit purement et simplement coulé, ce qui était aussi une façon de le stériliser.

La quarantaine commence

Repêchés par un hélicoptère, qui les dépose à 19 h 22 mn sur le pont du Hornet, les trois hommes n'ont pas même droit à la poignée de main du président Nixon, venu les accueillir.

Ils s'enferment aussitôt dans la cellule de quarantaine, sorte de caravane hermétiquement close, qu'ils partagent avec un médecin et un ingénieur. Débarquée aux îles Hawaii, puis transportée par avion à Houston, la caravane est finalement remorquée jusqu'à un garage, faisant fonction de sas, par lequel les hommes et le matériel (échantillons du sol lunaire, films photographiques et cinématographiques, etc.) passent aux laboratoires, rigoureusement isolés de l'atmosphère, du Lunar Receiving Laboratory, spécialement construit au Centre des vols habités de la NASA.

À 45 secondes près...

Il apparaît vite (on s'en doutait) qu'il n'existe aucune trace de vie à la surface de la Lune. Néanmoins, pendant que géologues et chimistes s'attaquent à leurs tâches, que les astrophysiciens captent les premiers sismogrammes lunaires et que les astronomes braquent leurs lasers sur la Lune, les astronautes subissent leur rigoureuse quarantaine. Ils seront libérés vingt et un jours plus tard, le 13 août.