L'engin commence par faire deux fois le tour de la Terre sur une orbite d'attente (182 à 185 km), puis, mettant en marche ses moteurs, s'élance vers la Lune. Le 24, le vaisseau spatial freine et se trouve ainsi transféré sur une orbite circumlunaire.

La première phase du vol s'est donc déroulée dans de bonnes conditions et les astronautes, émerveillés, peuvent contempler à loisir le spectacle magnifique qui se déroulera dix fois sous leurs yeux. La Lune a beau n'être qu'un rocher nu, son immensité désolée n'en offre pas moins quelques fastes : de majestueux levers de Soleil et de Terre, d'impressionnants jeux d'ombres et de lumières.

Le 25 décembre, vers 7 heures, suspense à Cap Kennedy : après dix tours de la Lune, c'est au-dessus de l'hémisphère invisible de notre satellite que les astronautes doivent rallumer le moteur pour quitter l'orbite lunaire et s'engager sur la trajectoire de retour à la Terre. Or, tant que le globe lunaire s'interpose entre le vaisseau spatial et ses bases terrestres, les liaisons radio demeurent impossibles.

Bientôt Apollo émerge et, avec un léger retard, vite devenu dramatique, Borman rassure par un : « Sachez que le père Noël existe » significatif de l'instant d'angoisse qu'il venait lui-même de connaître.

Le retour d'« Apollo 8 »

Reste à réussir la rentrée dans l'atmosphère terrestre. On sait qu'elle ne présente pas de difficultés particulières pourvu que l'engin satisfasse à deux conditions : que la base de la capsule conique soit dirigée en avant (car seule cette partie frontale a un revêtement réfractaire capable de supporter les énormes températures engendrées par le frottement de l'air) ; que la rentrée se fasse suivant un angle déterminé qui n'admet pas de grands écarts.

On peut dire que la première condition est satisfaite automatiquement, puisque la position du centre de gravité de la cabine et l'action des forces aérodynamiques contribuent à lui conférer la bonne position.

L'angle de rentrée inspire des inquiétudes à certains spécialistes. En fait, les astronautes disposent pour ce vol d'un atout exceptionnel. Il faut, pour un simple survol de la Lune, une quantité de propergol bien moindre que pour un vol avec débarquement à la surface lunaire. Or, les moyens propulsifs dont disposent les astronautes pour ce premier survol de la Lune étaient ceux qui sont prévus pour l'expédition lunaire : un excès de 4 t de propergol leur aurait permis, en cas de besoin, d'effectuer les manœuvres correctives de freinage ou d'accélération nécessaires pour aborder la Terre dans les conditions requises.

Tout va donc bien, et le 27 décembre, à 16 h 51 (soit à la minute près !), un amerrissage satisfaisant met un point final à un vol dont les annales retiendront qu'il fut un magnifique coup d'essai (d'ailleurs non exempt d'émotions jusqu'à la dernière minute : même après l'amerrissage, les astronautes passèrent un mauvais moment lorsqu'ils s'aperçurent, pendant qu'ils attendaient l'hélicoptère sauveur, que la cabine embarquait de l'eau...).

En plein hiver

Le lancement d'un Soyouz 2 inhabité a lieu le 25 octobre 1968. Le lendemain, c'est la satellisation de Soyouz 3, piloté par Georgi Beregovoï. Un ballet bien réglé se déroule ; dès la première révolution, le second vaisseau est rejoint par le premier, qui s'en rapproche à 200 m. Beregovoï manœuvre alors pour assurer un vol de conserve ; puis les deux engins s'écartent de 500 km. Le 27, le cosmonaute procède à un nouveau rendez-vous, non suivi d'accostage. Le programme s'achève sur ces manœuvres. Soyouz 2 est récupéré le 28 ; Beregovoï atterrira le 30.

Cette expérience en prépare une autre, plus complexe, qui a eu lieu en janvier 1969. Le 14 janvier, c'est la satellisation du lieutenant-colonel Vladimir Chatalov, aux commandes de Soyouz 4. Il fait – 25 °C au cosmodrome de Tyuratan et l'on s'interroge sur les raisons qui poussent les Soviétiques à lancer des engins habités en plein hiver.

Le lendemain, alors qu'il survole le cosmodrome d'où il est parti, Chatalov assiste au lancement de Soyouz 5, porteur de trois hommes : le docteur es sciences Boris Volynov (commandant de bord) et l'ingénieur Eugène Khrounov, tous deux compagnons de promotion de Gagarine, et l'ingénieur d'aviation Alexeï Elisseiev.