Il avait été admis, en France, qu'un accélérateur de particules national de 45 GeV serait construit et que la France participerait, en outre, à la construction de la grande machine européenne. Ces projets semblent remis en question.

L'accélérateur de Serpoukhov est entré en service

L'accélérateur géant de Serpoukhov (à 90 km au sud de Moscou) est entré en service pour le cinquantième anniversaire de la révolution d'Octobre. Cependant, toutes les installations annexes n'étaient pas encore en place à cette date. La grande chambre à bulles à hydrogène Mirabelle, fabriquée à Saclay, n'arrivera à Serpoukhov qu'en 1969, avec les techniciens français, qui doivent l'exploiter en commun avec leurs collègues soviétiques. L'accélérateur de Serpoukhov, qui accélère des protons jusqu'à 70 GeV, doit être muni de plusieurs autres chambres à bulles, d'un calculateur très puissant permettant d'étudier les clichés, et d'un système d'éjection rapide des particules fourni par le CERN. (Journal de l'année 66-67)

La chasse au quark

Les physiciens dénombrent à présent quelque 200 particules élémentaires. Parvenue à ce stade, la science s'interroge sur la notion même de particule élémentaire. La compréhension de la structure intime de la matière exige aujourd'hui un effort de simplification et de synthèse, auquel travaillent en commun les spécialistes de la physique. Au cours de deux importantes réunions internationales, il est apparu que la vedette, dans le domaine étendu des hypothèses, appartient toujours aux quarks et au SU-3.

Les quarks sont des particules qui existent peut-être, mais ne sont, pour l'instant, que des éléments de calcul. Inventés en 1962 par l'Américain Gell-Mann, les quarks seraient les particules super-élémentaires à partir desquelles on pourrait reconstruire tout l'Univers. Depuis, on cherche les quarks avec ardeur, auprès des grands accélérateurs, dans les rayons cosmiques, et même dans la croûte terrestre, écrit l'un des grands théoriciens de la physique moderne, Yuval Ne'eman, de Tel-Aviv. Sans les trouver.

Parallèlement, l'effort de simplification s'est porté sur des modèles où les physiciens se sont efforcés de ranger en bon ordre les particules, d'une façon similaire à celle qu'utilisait Mendeleiev pour ranger les éléments chimiques. Les plus célèbres de ces modèles sont appelés SU-3 et SU-6. Le premier, fondé sur des éléments de symétrie et de charge électrique, a déjà permis de calculer l'existence probable d'une particule, dont la réalité a, ensuite, été prouvée par l'expérience.

Inventer des particules

Beaucoup de particules entrent dans un schéma théorique, et en particulier dans SU-3. Mais toutes n'y peuvent trouver place. Faudra-t-il trouver d'autres modèles, plus efficaces ? Ou, dans un autre sens, sera-t-il nécessaire d'inventer des particules plus aptes à entrer dans ces matrices ?

Peut-être la réalité est-elle encore plus compliquée que ne le croient les physiciens. « Peut-être, dit Ne'eman, les particules sont-elles faites les unes à partir des autres, comme les tigres dans la jungle subsistent grâce aux lézards, qui mangent eux-mêmes les moustiques — lesquels dévorent peu à peu les tigres. Ainsi les tigres sont faits de lézards, les lézards sont faits de moustiques, et les moustiques sont faits de tigres. Il n'y aurait, alors, pas de constituants élémentaires, mais seulement un système qui s'alimente lui-même et qui interagit fortement avec lui-même... »

Nouvelle définition de la seconde

Naguère définie comme la 86 400e partie du jour solaire moyen, la seconde était considérée, depuis 1960, comme la fraction 1/31 556 925,9747 de l'année tropique 1900. Beaucoup plus précise que la précédente, cette définition demeurait rattachée aux mouvements astronomiques. Or, même avec les instruments les plus perfectionnés, l'observation du passage d'un astre au méridien est entachée d'une marge d'erreur considérable.

Les progrès de la physique ont maintenant permis de faire de la seconde une unité atomique. Dans un corps donné, les électrons ne peuvent occuper autour du noyau que des niveaux d'énergie déterminés. Toute transition d'un niveau à un autre s'accompagne de l'émission d'un rayonnement électromagnétique de fréquence bien déterminée.