Ils en sortent déçus. Le gouvernement entend que ce rendez-vous, devenu traditionnel, prenne un nouveau style. Il le conçoit donc comme une large réflexion sur les orientations à moyen terme de l'agriculture et non comme l'occasion d'examiner les revendications professionnelles.

Les organisations agricoles demandent pourtant beaucoup : compensation financière pour le retard intervenu au printemps dans la fixation des nouveaux prix de campagne, détaxation du fuel, gaz à prix réduit pour les producteurs d'engrais, et enfin démantèlement des montants compensatoires institués après la dévaluation du franc en juin.

Ces correctifs monétaires, qui se traduisent en France par des subventions aux produits agricoles importés et par une taxe sur les produits agricoles exportés, pénalisent l'ensemble du secteur agro-alimentaire. Mais, pour les supprimer, il faut augmenter les prix agricoles français à proportion de la dévaluation du franc. Le gouvernement ne le veut pas en cette période de blocage des prix. Toutes les revendications agricoles sont rejetées.

Abondance

Deux promesses pourtant : les régions éprouvées par la sécheresse recevront une aide pour le transport des fourrages — ce sont pour beaucoup des régions d'élevage — et un effort sera consenti pour la promotion à l'exportation des produits laitiers. Ici et là, devant ces maigres résultats, des manifestations expriment le mécontentement des agriculteurs.

Mais les récoltes n'attendent pas. Les paysans retournent vite à leurs champs. Les récoltes céréalières sont belles. La production de blé bat tous ses records. À l'automne, celle de maïs se révèle plus abondante que ne le laissait prévoir la sécheresse. On assiste à une nouvelle croissance de la production d'oléagineux : colza et tournesol.

Malgré une réduction volontaire des surfaces, en raison de l'encombrement du marché international du sucre, la production de betterave, quoique moins importante que celle de l'année précédente, est encore forte. Au total, on escompte une progression de l'ordre de 5 % des productions végétales.

Il n'en va pas de même pour les produits animaux. La production de viande de gros bovins décline. Celle de viande de porc baisse légèrement. La production laitière n'augmente que très peu. En revanche, les tonnages de viande ovine, de volailles et d'œufs progressent ; c'est d'ailleurs la crise sur le marché de l'œuf, où les cours s'effondrent.

Il reste que, tout compte fait, la production agricole, considérée dans son ensemble, augmente. Mais les résultats sont très inégaux selon les régions. Et celles qui ont été affectées par la sécheresse connaissent de sérieuses difficultés.

Inquiétudes

L'abondance de la production n'empêche pas les prix de se bien tenir — sauf dans les secteurs des fruits et des œufs — : on estime que, en moyenne, ils auront augmenté de 11,2 % en cette année 1982 ; une progression encore inférieure à celle des coûts de production (+ 11,5 %).

Cours soutenus, belles récoltes... Pour la première fois depuis plusieurs années, on prévoit une amélioration du revenu des agriculteurs. Les estimations faites en novembre par la Commission des comptes de l'agriculture de la nation chiffrent à 2,9 % la progression moyenne du revenu réel par exploitant. Ce n'est pas, au reste, un phénomène spécifiquement français : les experts de la Communauté européenne évaluent, en effet, à 5 % l'augmentation du revenu réel des agriculteurs pour l'ensemble de l'Europe des Dix.

Au Parlement, dont les travaux interrompus fin juillet reprennent en septembre, les sénateurs débattent de nouveau, à leur tour, du projet de loi sur les Offices par produits, adopté en deuxième lecture le 28 juin par les députés. Ce texte qui, pour ses auteurs, doit permettre de renforcer l'organisation des marchés agricoles et de mieux soutenir les prix des produits est définitivement adopté le 1er octobre. Entre le projet d'origine et la loi, il y a un incontestable décalage. Le gouvernement a consenti des concessions pour apaiser les craintes des organisations agricoles. Mais il n'a pas réussi à apaiser toutes les inquiétudes.