Bref, le secrétaire d'État plaide la bonne foi et, semble-t-il, la naïveté de Mgr Marcinkus. Entre-temps, un incident diplomatique — le premier depuis les accords du Latran de 1929 — oppose le Vatican à l'Italie : les enquêteurs italiens qui voulaient examiner les comptes de l'IOR se sont vu opposer une fin de non-recevoir parce que leur demande n'a pas été formulée par la voie diplomatique.

Le 24 décembre, enfin, les deux États signent un accord de coopération « pour procéder conjointement à l'établissement de la vérité sur les rapports entre le Banco Ambrosiano et l'Institut pour les œuvres de religion ». On attend donc les conclusions des six experts désignés par les deux parties.

Filière bulgare

À la même époque, une autre enquête fait grand bruit : celle qui mènent magistrats et policiers italiens sur ce qu'on appelle la filière bulgare, afin de découvrir les éventuels complices ou commanditaires bulgares de Mehmet Ali Agca, le Turc appartenant au mouvement d'extrême droite dit des loups gris qui avait tenté de tuer le pape.

Condamné à la prison à vie, au terme d'un procès au cours duquel les juges avaient qualifié l'attentat de « fruit d'une machination complexe orchestrée par des cerveaux occultes », Agca a été enfermé dans un pénitencier d'Italie centrale.

C'est là qu'après des mois de détention il a lancé de très graves accusations contre certains de ses compatriotes et plusieurs ressortissants bulgares.

En sortant de son pays, dix-huit mois avant l'attentat de la place Saint-Pierre, il est passé par Sofia où il a fréquenté, entre autres, des Turcs ayant pignon sur rue dans la capitale de cette démocratie populaire et dont certains s'adonnent, à grande échelle, à des trafics d'armes et de drogue (c'est du moins ce qu'affirment plusieurs polices occidentales).

L'un d'eux lui aurait fourni l'argent nécessaire à sa mission. Et, dans l'accomplissement de celle-ci, deux Bulgares auraient joué un rôle déterminant : Sergueï Ivanov Antonov, directeur adjoint à Rome de la compagnie aérienne bulgare Balkan Air, et Teodore Ayvazov, comptable à l'ambassade hongroise à Rome.

Le magistrat qui instruit l'affaire, le juge Ilaro Martella, estime le 20 octobre avoir rassemblé assez d'éléments pour alerter, au cours d'un entretien en tête à tête, le président du Conseil, Giovanni Spadolini. Mais quand, trois semaines plus tard, les policiers italiens voudront interpeller les Bulgares, Ayvazov a quitté le pays (alors même qu'il était surveillé).

Révélations

Seul Antonov est arrêté, et proteste hautement de son innocence. À la veille de Noël, les autorités bulgares démentiront aussi, formellement, avoir trempé en quoi que ce soit dans toute cette histoire. Pendant ce temps, à Rome, les journaux multiplient les révélations sensationnelles, et les milieux politiques exploitent l'affaire au maximum. Ce qui paraît gêner le magistrat instructeur.

Autant qu'on puisse en juger, son dossier n'est pas mince. Agca connaissait les numéros de téléphone des Bulgares, Agca pouvait décrire l'appartement d'Antonov, Agca a été capable, au cours d'une reconstitution, d'amener le juge Martella devant l'immeuble où habitait Antonov, sans même connaître les noms des rues ni un seul mot d'italien.

On peut imaginer, bien sûr — et cette hypothèse est lancée à l'Est —, qu'il s'agit d'une manipulation, qu'on a soufflé à Agca ce qu'il fallait dire au juge pour faire peser les soupçons sur les Bulgares et par là sur le communisme international. Cela supposerait une opération très habilement montée. Et il est vrai que dans les accusations d'Agca apparaissent quelques obscurités, ou des affirmations, pour le moins surprenantes. C'est sans doute pourquoi, à la fin de 1982, magistrats et policiers italiens supplient la presse et les politiciens de les laisser travailler en paix. Ils ont le sentiment d'entreprendre l'enquête la plus difficile qui soit. La plus délicate aussi.

Protestants

Pour minoritaire qu'il soit, le protestantisme français, dans sa diversité extrême, demeure une réalité vivante dans la société contemporaine, à la fois comme force sociale et comme dynamique spirituelle.