P. F.

Sombres perspectives

À l'ouverture de sa 15e réunion à Caracas, le 26 octobre 1999, le Système économique latino-américain (SELA) a dressé de bien sombres perspectives économiques : « Avec une récession estimée entre – 1 % et – 2 %, l'Amérique latine se prépare à traverser la pire année de la décennie ». Bien que les crises internationales aient vu le jour dans d'autres régions du monde (en Asie en 1997 et en Russie en 1998), elles ont affecté de plein fouet l'Amérique latine, avec une contraction de son commerce, une chute du prix des matières premières et la réduction de son potentiel de financement consécutif au manque de confiance général envers les marchés émergents. C'est peu d'écrire que la Colombie était bien mal préparée pour amortir les effets de la crise.

« Nouvelle économie » aux États-Unis ?

Forte croissance, plein emploi, inflation maîtrisée, apogée du « high-tech », tels sont les ingrédients de la réussite économique américaine. D'aucuns y voient l'avènement d'un nouveau modèle économique, tiré par les technologies de l'information, et auquel la mondialisation offre son cadre.

Contre toute prévision, la croissance a augmenté, depuis 1996, de 4 % l'an et, si le record de longévité de la croissance a été enregistré entre 1961 et 1969, de nombreux signes indiquaient que l'année 1999 resterait comme un millésime faste. Le taux exceptionnel de création d'emplois – en huit ans, ce sont quelque 20 millions d'emplois qui ont vu le jour – est assurément l'indicateur le plus spectaculaire de la prospérité retrouvée. Tout aussi significatif apparaît le taux de chômage uniformément bas – environ 4 %, soit l'étiage le plus faible depuis 1970. Et la cerise sur le gâteau, une inflation endormie, l'indice des prix à la consommation dépassant à peine 2 %. Autre point fort, le déficit du budget fédéral américain semble appartenir à un ancien monde : à impôt égal, le gouvernement disposait en 1999 d'un excédent de 69 milliards de dollars.

Une « nouvelle économie » ?

Une croissance continue, une inflation stable, un chômage en recul ! Les Américains auraient-ils résolu la quadrature du cercle en conciliant une société de quasi-plein-emploi avec une inflation maîtrisée ? Et le ciel économique serait-il dégagé au-dessus du Nouveau Monde au point que l'on puisse parler de l'avènement d'une « nouvelle économie » ? Entendons les arguments de ses hérauts. Ces derniers avancent volontiers que la mondialisation a bouleversé la donne et revitalisé le débat. La « nouvelle économie » a fait, selon eux, son lit sur trois arguments. D'abord, l'ouverture des économies qui a eu pour effet d'accentuer de façon significative la part du commerce international et de l'investissement dans l'économie américaine. Ensuite, la coexistence d'un faible taux de chômage et d'une inflation très faible invite à repenser nos équations, voire à changer d'outils : gravée dans le marbre, la fameuse courbe de Phillips qui établissait un lien entre chômage, inflation et salaire serait dépassée. Enfin, sous l'effet de l'extraordinaire développement des technologies de l'information, le vieux monde de la production industrielle serait en train de basculer dans un espace nouveau, où le travail intellectuel aurait pris le pas sur le travail manuel. Bref, l'innovation serait plus importante que la production de masse.

Les motifs de satisfaction ne manquent donc pas outre-Atlantique, et l'on veut croire au caractère fondamentalement sain de la croissance, c'est-à-dire en sa pérennité. Pour autant, quelques voix se sont élevées pour tempérer l'euphorie ambiante en pointant d'un doigt accusateur les déséquilibres financiers de l'eldorado américain. Il y aurait de sérieuses raisons de s'inquiéter du déficit des paiements courants et, surtout, de la hausse du Dow Jones. L'indice boursier, dont la valeur a été multipliée par quatre en l'espace de 10 ans, paraît déconnecté de la courbe des profits des entreprises cotées.

P. F.

Nouvelles technologies et inflation

Dans un discours prononcé devant le Sénat des États-Unis en février 1999, Alan Greenspan, président de la Réserve fédérale, défendait l'idée d'une corrélation entre le développement du « high-tech » et la maîtrise des prix : « Non seulement la technologie a joué un rôle dans le ralentissement de l'inflation, mais elle a aussi fait sentir ses effets sur la productivité et les coûts aux États-Unis. Sur le plan international, les derniers développements techniques ont jeté à bas les obstacles au commerce transfrontière. »

L'OMC à la croisée des chemins

Chargée de la défense de la liberté du commerce, l'OMC est la première institution internationale dotée d'un véritable pouvoir supranational d'arbitrage entre les intérêts contradictoires des États. À l'heure de la mondialisation se fait sentir avec plus d'urgence le besoin d'encadrer les échanges – matériels et immatériels – et donc de donner au monde les règles du jeu. C'est tout particulièrement l'ambition que nourrit la France pour l'OMC.