Globalement, les pays de la région affichaient à la fin de l'année 1999 un produit intérieur brut de nouveau positif. Bien que les indicateurs macroéconomiques aient contribué à dresser un tableau un peu moins sombre que l'ampleur de la crise n'aurait pu le laisser supposer, la prudence restait de mise. Il serait en effet un peu hâtif d'en conclure que l'Asie du Sud-Est a retrouvé le chemin de la croissance, du moins pas cette croissance créatrice de « richesses », de projets et d'emplois. Quoi qu'il en soit, le « frémissement » de la croissance a été accueilli avec soulagement dans le reste du monde, qui a ainsi vu s'éloigner la menace d'une crise de dimension planétaire. Mais le « soulagement » de l'Occident n'a trouvé localement qu'un écho bien atténué, les indicateurs de l'économie réelle ne témoignant, au mieux, que d'un processus de rémission. Ainsi du chômage, qui a poursuivi une courbe ascendante tout au long de l'année, retardant une reprise de la demande intérieure pourtant indispensable.

Des situations contrastées

La Thaïlande, d'où est partie la crise, passe, paradoxalement, pour le pays qui est le mieux placé pour se redresser. Fin 1999, le royaume du Siam était pourtant loin d'être sorti de l'ornière, avec une contraction de près de 40 % du flux des investissements et un recul de l'ordre de 14 % de la consommation intérieure. C'est peu d'écrire que Bangkok continuait de rencontrer d'énormes difficultés pour relancer ses exportations. Situation peu encourageante aux Philippines où, sous les effets conjugués d'une inflation importante, de taux d'intérêt élevés et d'une dépréciation de la monnaie, s'est creusé un vide propice à la dégringolade des investissements. Le marasme n'a guère épargné Singapour et la Malaisie, deux économies dont la réputation de solidité paraissait, il y a encore peu, inattaquable. En 1999, la production industrielle de l'île-État peinait à repartir. Quant à la Malaisie, jadis championne toutes catégories de la croissance, elle a tout juste réussi à stabiliser la chute de son PIB.

Si la crise a bouleversé la donne économique, elle a également ébranlé le paysage politique. Sans la crise, la Corée du Sud n'aurait pas porté à sa tête Kim Daejung, un opposant de toujours au régime ; idem en Indonésie, où la population, étudiants en tête, a indiqué à Suharto le chemin de la sortie. La crise a souligné l'extrême fragilité du pouvoir en Malaisie où, pour faire face à la tourmente, le docteur Mahathir, jadis figure éponyme du libéralisme, a rétabli le contrôle des changes et engagé contre le numéro deux du régime un procès d'un autre âge. Enfin, pour dire un mot sur la modification des équilibres géopolitiques régionaux, ajoutons que la Chine aura accru très nettement son poids – c'est le sens qu'il convient de donner à son durcissement de ton à l'égard de Taïwan et à la dégradation de ses relations avec les États-Unis – au détriment du Japon, dont la crédibilité semble s'être abîmée dans la bulle spéculative ; et n'oublions pas l'émergence d'un antiaméricanisme alimenté par l'amertume ressentie par l'opinion des pays « malades » à l'endroit du FMI.

P. F.

Partout, le chômage

Le chômage s'est accentué tout au long de l'année et dans tous les pays touchés par la crise. Aussi les seuls chiffres disponibles, ceux de 1998, suffiront-ils à indiquer l'ampleur du phénomène. En Thaïlande, le taux de chômage était, selon les autorités, de 6,5 %, mais d'autres sources faisaient état de chiffres plus élevés (9, 10, voire 15 %). Aux Philippines, on parlait officiellement de 9,6 % de chômeurs. À Singapour, le taux de sans-emploi frôlait 5 %, le gouvernement redoutant qu'il ne dépasse 6 % en 1999. Enfin, en Indonésie, il était de 14,3 %, selon l'Organisation internationale du travail.

Proche-Orient : relance du processus de paix

En réactivant le mémorandum de Wye Plantation, le Premier ministre israélien Ehoud Barak a redonné vie à un processus de paix mis entre parenthèses pendant le mandat de Benyamin Netanyahou. L'accord conclu avec Yasser Arafat ouvre, de facto, la voie aux négociations sur le statut définitif des territoires de Gaza et de Cisjordanie.