Journal de l'année Édition 1993 1993Éd. 1993

Conséquence de la difficile transformation du pays et de l'incertitude politique, des milliers de Roumains et de représentants de certaines minorités (Tziganes et Allemands) prennent la voie de l'exil volontaire, vers la Pologne, la Hongrie et surtout vers l'opulente Allemagne. Ils se font de plus en plus refouler et, en novembre, le gouvernement de Bonn signe avec Bucarest un accord de rapatriement de 60 000 de ces « réfugiés économiques » contre une aide financière. Pour sa part, la minorité hongroise, si elle revendique son autonomie culturelle, n'entend pas quitter le pays.

Pour ce qui est de la politique étrangère, la nouvelle Roumanie a hérité des problèmes complexes et non résolus de voisinage avec les républiques d'Ukraine et de Moldavie (roumanophone, mais avec une forte minorité russe et ukrainienne). La Hongrie est toujours suspectée de visées sur la Transylvanie. Le souci de l'aide occidentale demeure l'alpha et l'oméga de la politique roumaine, la France étant perçue comme le pays le plus proche culturellement et politiquement. En novembre, après la Pologne, la Tchécoslovaquie et la Hongrie, la Roumanie signe à son tour un accord d'association avec la Communauté européenne.

Bulgarie

En jugeant successivement trois anciens Premiers ministres de l'époque communiste (MM. Filipov, Atanasov et Loukianov) et l'ancien chef du parti, Todor Jivkov, le pays semble avoir définitivement rompu avec son passé totalitaire.

En janvier, les élections présidentielles apportent la victoire à Jeliou Jelev, chef de l'Union des forces démocratiques (anticommuniste), par 52,8 % des suffrages, contre Velko Valkanov, candidat du Parti socialiste bulgare, ex-Parti communiste, qui obtient 47,2 % des voix. Au Parlement, l'UDF ne dispose pas de la majorité absolue (116 députés contre 110 élus du PSB). Dans ce contexte, les 24 voix des députés représentant la minorité turque constituent une importante force d'appoint nécessaire à la formation d'un gouvernement. Des crises politiques et parlementaires s'ensuivent en septembre et en octobre : démission de M. Savov, président de l'Assemblée nationale, et démission du gouvernement de Filip Dimitrov le 28 octobre. Ce dernier a été chargé de former le nouveau gouvernement le 13 novembre.

Néanmoins, dans cet équilibre instable, la Bulgarie évolue vers un modèle nouveau. Le vieil attachement à la Russie et les incertitudes du changement favorisent encore la nomenklatura ex-communiste, qui troque souvent ses positions politiques et administratives contre des situations importantes dans l'économie. Comme dans les autres pays de cette région, la question liée au développement de nationalismes face aux minorités ethniques (ici turque) pèse lourdement sur la situation intérieure et les relations internationales.

Aux frontières de l'ex-Yougoslavie se préparent des frictions avec la république de Macédoine, que la Bulgarie considérait depuis toujours comme partie intégrante de son territoire, alors que la Macédoine risque d'affronter les revendications de sa minorité albanaise.

Albanie

L'Albanie a été le dernier pays à se décommuniser. La victoire aux élections des 22 et 29 mars 1992 porte au pouvoir le Parti démocrate albanais. Le président Ramiz Alia démissionne le 3 avril pour être remplacé par le chef du PDA, Sali Berisha, cardiologue et membre du PC de 1970 à 1990. Le nouveau gouvernement est formé par Alexandre Meksi (PDA) avec dix-huit ministres, dont quinze appartenant au parti victorieux. Le nouveau pouvoir commence à gouverner un pays en ruine et en révolte. Des émeutes de la faim sont difficilement maîtrisées. La poussée vers l'émigration se maintient. Cependant, encore en juillet, les élections locales apportent un succès non négligeable au Parti socialiste (ex-communiste). Malgré tout, selon le célèbre écrivain albanais Ismaïl Kadaré, il n'y a plus de survie possible pour le communisme. Ces élections montrent seulement que, parmi les anciens communistes, il y a beaucoup de cadres expérimentés et de valeur, qui sont élus à titre personnel.

Chrono. : 19/01, 22/03, 5/06, 6/06, 20/06, 3/07, 10/07, 4/09, 10/10, 7/11.

André et Jean Sellier, Atlas des peuples d'Europe centrale, La Découverte, 1991.

Georges Mond
Membre du comité de rédaction de la Revue d'études comparatives Est-Ouest