Même moins économique qu'on le voudrait, le Space Shuttle demeure révolutionnaire par ses possibilités. Outre qu'il pallie le manque de stations orbitales dont souffrent les Américains, il peut emporter les charges les plus diverses, notamment un ou plusieurs satellites qui sont abandonnés sur l'orbite voulue. Il peut poursuivre un satellite et l'accrocher pour l'inspecter, le réparer, le détruire ou le ramener au sol. Ces possibilités justifient la participation des militaires pour un quart du financement du programme.

Saliout-Soyouz-Progress

Sans exclure définitivement la formule navette, les Soviétiques considèrent qu'elle ne sera pas rentable avant une quinzaine d'années. Ils ont donc choisi le système, désormais au point, fondé sur l'emploi d'une station orbitale permanente (Saliout) et de vaisseaux habités (Soyouz T) ou de transport (Progress) simples, légers et peu coûteux. Le lanceur est, à quelques perfectionnements près, le même qu'aux débuts de l'astronautique, la fusée R 7. Il est sûr, car, dans un faisceau de 20 tuyères propulsives, il est aisé de minimiser les conséquences des défaillances éventuelles de l'une d'elles. Il est bon marché, car les quatre fusées latérales, larguées peu après le départ, sont récupérables et, d'autre part, il est construit en grande série (en 1980, l'URSS a lancé une centaine de satellites divers, ainsi que six Soyouz et quatre Progress).

En regard du Space Shuttle, vaisseau spatial de la deuxième génération, Saliout et Soyouz paraissent archaïques, mais leur simplicité les rend plus économiques et plus sûrs. Le caractère permanent de la station Saliout exclut les aléas des satellisations répétées et permet un emploi plus intensif du matériel. La navette américaine a une capacité de transport très supérieure et une grande liberté de manœuvre dans l'espace ; les Soviétiques ont, eux, compensé partiellement leur désavantage en multipliant les voyages de Progress sans aucun risque (puisque ces engins n'ont pas d'hommes à bord) et ils ont rendu plus maniable leur Soyouz T.

Heurs et malheurs de la NASA

La NASA ne semble pas pouvoir sortir de la situation qui lui avait été imposée par les restrictions de crédits consécutives à la crise économique et par les retards intervenus dans le programme nécessairement budgétivore qu'aura été la navette spatiale. C'est encore un budget en stagnation — voire en recul si l'on tient compte de l'inflation — qui lui a été alloué en 1981 : 5,54 milliards de dollars.

La NASA aura doublé en 1981 le nombre de ses lancements par rapport à 1980, mais cette dernière année avait été si creuse que le doublement donne un total modeste : 19 satellisations. Cinq de ces opérations seulement mettront en œuvre des engins appartenant à la NASA (3 vols de la navette et 2 satellites scientifiques) ; les 14 autres satellites sont lancés pour le compte d'entreprises publiques ou privées et pour celui des forces armées. Cette année encore, le gros des moyens matériels et humains est consacré à la navette spatiale que la NASA, après deux ans de retard, est pressée de mettre au point. Les travaux ont été accélérés en 1980 jusqu'à occuper 1 200 personnes se relayant 24 heures sur 24.

Les problèmes qu'il a fallu vaincre sont de deux ordres. Les uns ont trait à l'isolation thermique de la surface de l'Orbiter, assurée par une mosaïque de 31 000 tuiles réfractaires, toutes différentes les unes des autres, dont l'assemblage, la fixation et la tenue aux essais ont présenté des difficultés sans nombre. Plus graves encore ont été les ennuis causés par les trois moteurs, sans cesse endommagés lors des essais, même lors de la dernière phase de ceux-ci, les 12 juillet et 3 novembre 1980. Finalement l'ensemble propulseur a très bien fonctionné au cours des essais qui ont, en fait, commencé le 4 décembre.

Le montage du Space Shuttle, son transport et son lancement utilisent les installations et équipements qui avaient servi pour les lanceurs Saturn 5 des missions lunaires.

Voyager 1

Bon an mal an, la NASA engrange sa moisson de résultats glanés par ses sondes interplanétaires. Après avoir magistralement exploré Jupiter et ses principaux satellites en 1979, Voyager 1 a décrit un arc gigantesque qui, le 12 novembre 1980, l'a amené, trois ans après son départ de cap Kennedy, à photographier de près Saturne et les principaux membres de sa famille.