Entre les positions tranchées de la CGT et du gouvernement, FO tire la sonnette d'alarme pour la défense d'une politique contractuelle dont elle a toujours été l'ardent défenseur.

Cependant, au cours du premier semestre 1977, c'est FO qui, dans la fonction publique, pose des conditions très dures, c'est FO qui, à la SNCF, contribue à l'échec des négociations, c'est FO qui, à la RATP, hésite à les poursuivre. Bref, FO ne partage plus l'avis selon lequel « il vaut mieux un contrat discutable que pas d'accord du tout ».

Ainsi, ce mécanisme qui, selon Jacques Chaban-Delmas, pouvait permettre d'établir en France « un nouveau contrat social » est remis en cause. Et le ras le bol de la base dans le secteur public a pesé de tout son poids dans la décision de FO de participer à la grève nationale du 24 mai, la première sans doute depuis la Libération à réunir toutes les organisations syndicales, y compris la CGSI (Confédération générale des syndicats indépendants), certains syndicats CFT et les autonomes de la SNCF.

Incontestablement, avec l'échec des discussions dans le secteur public, le pas est franchi : l'image de FO syndicat sage récusant la grève, sauf en cas extrême, disparaît un peu.

Mais, le 27 juin, Raymond Barre reçoit André Bergeron. Le Premier ministre lâche du lest, et le secrétaire général de FO peut annoncer une reprise prochaine des négociations salariales dans le secteur public et nationalisé. Signe supplémentaire : l'entretien Valéry Giscard d'Estaing et Yvan Charpentié prévu dans la première quinzaine de juillet. Le leader de la CGC doit également rencontrer Raymond Barre en tête à tête.

Sécurité sociale

Mais peut-être même plus que les difficultés de la politique contractuelle, les mesures d'assainissement de la Sécurité sociale sont-elles significatives des paradoxes et des blocages des rapports sociaux. Après avoir annoncé sa crainte d'un déficit de 12 à 17 milliards de F, le gouvernement annonce, le 13 avril, une série de mesures désagréables pour les assujettis, mais qui laissent entier le problème d'une refonte d'ensemble d'un système vieux de trente ans. Et le trou annoncé se réduit subitement à 4 ou 5 milliards...

En fait, une nouvelle fois, l'échéance électorale dissuade le gouvernement d'aller au fond du débat réclamé par les syndicats, qui savent bien d'ailleurs qu'une réforme de fond créerait des tensions très fortes entre les différentes catégories professionnelles (cadres et non cadres, salariés et non salariés). Le patronat, lui, qui met en avant les charges sociales des entreprises, montre peu d'empressement à l'idée d'un bouleversement profond difficilement séparable d'une réforme fiscale d'ensemble.

L'assainissement de la Sécurité sociale

Le plan Veil du 13 avril 1977 prévoit une série de 12 mesures :

Les hôpitaux :
– création d'un forfait journalier hospitalier devant se substituer à l'actuel ticket modérateur ;
– augmentation de 12,5 % du prix de journée en 1977 ;
– amélioration de l'équipement hospitalier.

Les cotisations :
– relèvement des cotisations des salariés agricoles ;
– hausse des cotisations des salariés actifs de plus de 65 ans (même cotisation désormais que les moins de 65 ans) ;
– mise à l'étude des conditions de prise en charge de certains risques « excessifs » par la Sécurité sociale : par exemple, à l'occasion des accidents automobiles.

Les remboursements :
– réduction à 40 % au lieu de 70 % du taux de remboursement des médicaments dits « de confort » (fortifiants, levures, euphorisants...) ;
– gratuité pour certains médicaments coûteux ;
– amélioration des remboursements de soins dentaires à partir de 1978.

Les rapports avec les usagers :
– étude de mesures destinées à réduire l'absentéisme ;
– meilleur contrôle de l'activité des médecins invités à « l'autodiscipline » ;
– simplification et humanisation des rapports entre les caisses et les usagers.

Non-salariés :
– 3 700 000 non-salariés bénéficient, le 1er août 1977, des mêmes remboursements que les salariés pour l'hospitalisation et la longue maladie.

Interlocuteur

Pour le patronat, l'heure n'est plus aux initiatives hardies et aux grandes négociations avec les syndicats. L'essentiel de la vie contractuelle se réduit à l'aménagement des accords sur l'indemnisation du chômage, l'application du texte sur la formation et (suite à une recommandation gouvernementale) à la signature d'un accord sur la retraite à 60 ans : officiellement, il s'agit, à partir de l'accord de 1972 sur la préretraite, de conclure un contrat temporaire pour inciter les salariés à cesser leur activité plus tôt. Mais l'expérience montre que des mesures de ce type sont rarement temporaires et qu'il y a une logique des droits acquis.