Votée le 2 décembre 1970 par le Sénat, cette mesure prend place dans la lutte anti-nuisances engagée aux États-Unis depuis deux ou trois ans. Elle menace même un programme américain, le SST (Supersonic transport), confié à la firme Boeing pour la cellule et à General Electric pour la propulsion. Plus ambitieux que Concorde, plus lourd et prévu pour une vitesse de croisière de Mach 2,7, le SST a connu bien des ennuis depuis le lancement des premières études. Parvenu tant bien que mal au point de non-retour (deux prototypés sont en construction), le programme paraît actuellement compromis.

Perturbations planétaires

Quelles sont les nuisances des transports supersoniques ? Il y a la question des bang, ces ondes de choc produites par tout avion supersonique, mais dont l'intensité est fonction de la vitesse et de la taille de l'appareil. Même aux vitesses subsoniques, il faut tenir compte du bruit engendré par des réacteurs à hautes performances, de technologie inusitée en matière de transport commercial.

Beaucoup plus graves encore pourraient être les perturbations globales, à l'échelle de la planète, apportées par l'exploitation commerciale de centaines d'appareils supersoniques de type Concorde ou SST. Aux altitudes de croisière voisines ou supérieures à 20 000 m, ces avions rejetteront d'énormes quantités de vapeur d'eau, de gaz carbonique, d'oxyde d'azote, de particules solides (sulfureuses en particulier). Les experts les plus pessimistes considèrent que le gaz carbonique ainsi rejeté sera capable de provoquer un effet de serre au niveau des basses couches de l'atmosphère, avec échauffement progressif de la surface terrestre.

La vapeur d'eau, pourrait, aux latitudes élevées, perturber les mécanismes de formation des nuages, avec modification des climats. Les suies sulfureuses, provenant des chambres de combustion, pourraient agir dans le même sens que le gaz carbonique. On redoute aussi, parfois, des modifications de la ceinture d'ozone protégeant la surface terrestre du rayonnement ultraviolet solaire.

Pour inquiétantes qu'elles soient, ces prévisions ne sont encore étayées par aucune preuve, même indirecte, et les responsables du programme SST réclament des études scientifiques non entachées de prises de position émotionnelles.

Le « Tu-144 »

Les données précises sont rares sur le Tu-144, supersonique civil soviétique. Très proche dans sa conception de Concorde (avec, en particulier, la même voilure en double delta), le Tu-144 est un peu plus léger et prévu pour des vitesses de croisière plus élevées (Mach 2,35). Plus de cinq mois avant Concorde, c'est le premier supersonique civil qui a volé à Mach 2. En novembre 1970, il franchissait Mach 2,28. Si l'on se réfère à certains propos de responsables soviétiques, la mise en service du Tu-144 sur l'énorme réseau intérieur de l'Aeroflot pourrait être très proche.

Reste le problème de sa commercialisation. L'appareil trouvera-t-il des débouchés à l'exportation hors des pays du bloc communiste ? On peut en douter.

Renaissance du dirigeable

Les grands dirigeables vont-ils renaître ? À la fin de 1970, la question se pose. Une compagnie britannique de transports maritimes, Manchester Liners, a créé une filiale, Cargo Airships, chargée d'étudier les possibilités du dirigeable en matière de transport de fret.

L'URSS et les États-Unis s'intéressent au même problème. Un peu partout dans le monde, on est séduit par la capacité marchande que pourraient offrir des dirigeables géants, et par leur vitesse, supérieure de très loin à celle des navires.

Depuis la catastrophe du Hindenburg, en 1937, qui entraîna la disparition des grands vaisseaux de l'air mis en service par les Allemands sur l'Atlantique, les progrès technologiques ont été nombreux. Les matériaux composites, par exemple, permettraient de construire des structures légères à haute résistance. Quant à l'hélium, seul capable d'assurer en toute sécurité la sustentation de ces aéronefs, il est aujourd'hui produit en grandes quantités à partir des gisements de gaz naturel. Il est vrai qu'un chercheur allemand envisage de recourir non à l'hélium, mais à la vapeur d'eau.

Rentabilité incertaine

Quoi qu'il en soit, les problèmes ne sont pas seulement d'ordre technique. Une des tâches principales de Cargo Airships sera d'étudier la rentabilité économique du dirigeable de transport commercial. Sur ce point, bien des spécialistes restent pessimistes.